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[ 13 novembre 2009 ] Imprimer

Procédure pénale

Garde à vue : nouvelle présomption de grief

Mots-clefs : Garde à vue, Nullité (grief présumé), Examen médical, État de santé (incompatibilité), Droit à un médecin

La poursuite de la garde à vue d'une personne dans des conditions qui sont, selon le constat médical, incompatibles avec son état de santé, porte nécessairement atteinte à ses intérêts.

Par l'arrêt du 27 octobre 2009, la chambre criminelle pose une nouvelle présomption de grief pour sanctionner la méconnaissance du certificat médical concluant à l'incompatibilité entre l'état de santé de la personne et son maintien en garde à vue. 

Selon l'article 63-3 du code de procédure pénale, toute personne placée en garde à vue peut, à sa demande, être examinée par un médecin désigné par le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire ; l'examen doit avoir lieu sans délai et le certificat se prononcer notamment sur l'aptitude au maintien en garde à vue. En cas d'inaptitude constatée, les interrogatoires ne peuvent pas se poursuivre (Circ. 1er mars 1993), le procureur étant, en pratique, contraint de mettre fin à la mesure (v. Crim. 18 déc. 2007). Aucune nullité n'est cependant formulée et la Cour de cassation considérait jusqu'à présent que ces prescriptions exigeaient la démonstration d'un grief (v. Crim. 25 févr. 2003 ; 10 déc. 2008).

En l'espèce, une garde à vue avait continué malgré les conclusions d'un examen médical pratiqué deux heures après le début de la mesure (un second certificat, établi quelques heures plus tard, était intervenu en sens contraire). L'intéressé saisit la chambre de l'instruction d'une requête en annulation de l'ensemble des actes de procédure intervenus après la constatation, par le premier médecin, de l'incompatibilité entre son état de santé et la poursuite de la mesure. La cour d'appel rejeta cette requête au motif qu'aucune atteinte n'avait été portée aux intérêts du gardé à vue. 

Cette décision est cassée au visa de l'article 63-3, la chambre criminelle affirmant, dans un attendu de principe, que « la poursuite de la garde à vue dans des conditions qui sont, selon le constat médical, incompatibles avec son état de santé, porte nécessairement atteinte à ses intérêts ». Cette nouvelle présomption de grief, qui s'ajoute à celle existant en matière de notification tardive des droits ou d'information tardive du procureur de la République, devrait jouer en cas de retard pris dans l'exécution du droit à un examen médical.

Crim. 27 oct. 2009

Références

 Article 63-3 du Code de procédure pénale

« Toute personne placée en garde à vue peut, à sa demande, être examinée par un médecin désigné par le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire. En cas de prolongation, elle peut demander à être examinée une seconde fois. 

A tout moment, le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire peut d'office désigner un médecin pour examiner la personne gardée à vue. 

En l'absence de demande de la personne gardée à vue, du procureur de la République ou de l'officier de police judiciaire, un examen médical est de droit si un membre de sa famille le demande ; le médecin est désigné par le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire. 

Le médecin examine sans délai la personne gardée à vue. Le certificat médical par lequel il doit notamment se prononcer sur l'aptitude au maintien en garde à vue est versé au dossier. 

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables lorsqu'il est procédé à un examen médical en application de règles particulières. »

■ Crim. 25 févr. 2003, n° 02-86.144, Bull. crim. n° 50, RSC 2004. 421, obs. Buisson.

■ Crim. 18 déc. 2007, n° 07-86.955.

■ Crim. 10 déc. 2008, n° 08-83.408. 

■ C. Girault, « Les nullités de la garde à vue »AJ pénal 2005. 140.

■ P. Chariot, « L'intervention du médecin en garde à vue », AJ pénal 2004. 279.

■ P. Chariot et C. Boraud, « L'intervention du médecin en garde à vue : le chemin sinueux vers une harmonisation des pratiques », AJ pénal 2008. 265. 

■ B. BoulocProcédure pénale21e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2008, nos 419 s. et 777 s. 

 

Auteur :S. L.

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