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Droit pénal spécial
« Harcèlement téléphonique » : des SMS suffisent
Mots-clefs : Appels téléphoniques malveillants, Agressions sonores, Interprétation stricte de la loi pénale, Principe de légalité criminelle, Dol spécial, SMS
La réception d'un SMS, dès lors qu'elle se manifeste par l'émission d'un signal sonore par le téléphone portable de son destinataire, entre dans le champ d'application de l'article 222-16 du Code pénal relatif aux appels téléphoniques malveillants.
L'envoi d'un SMS tombe-t-il sous le coup de l'article 222-16 du Code pénal qui punit d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende les appels téléphoniques malveillants ou les agressions sonores ? C'est à cette question — a priori inédite — que la Cour de cassation répond dans l'arrêt du 30 septembre 2009.
En l'espèce, une personne avait adressé à une autre, d'avril à mai 2007, des SMS malveillants et réitérés, de jour comme de nuit, dans le but de troubler sa tranquillité. La victime, qui s'était constituée partie civile, obtint des juges du fond la condamnation de l'auteur des messages à deux mois d'emprisonnement avec sursis sur le fondement de l'article 222-16 du Code pénal. Saisie par le prévenu, qui se prévalait notamment du principe de l'interprétation stricte de la loi pénale (art. 111-4 C. pén.), corollaire du principe de légalité criminelle, la chambre criminelle approuve les juges du fond. Elle justifie cette solution par le fait que « la réception d'un SMS se manifeste par l'émission d'un signal sonore par le téléphone portable de son destinataire ». Est-ce à dire que les SMS qui ne se manifestent pas par l'émission d'un signal sonore doivent échapper à la répression ? Rien n'est moins sûr. Il semble, en effet, que la Haute Cour se fonde essentiellement sur le but des appels (dol spécial consistant à troubler la tranquillité d'autrui) et non sur les moyens utilisés. Ainsi a-t-elle déjà estimé que les appels adressés à une boîte vocale ne perdaient pas leur caractère malveillant dès lors que leur répétition avait pour but et pour résultat d'atteindre, de manière différée, la personne concernée, en créant un climat d'insécurité propre à perturber sa vie privée et à troubler sa tranquillité (Crim. 20 févr. 2002).
Crim. 30 sept. 2009
Références
■ Code pénal
Article 111-4
« La loi pénale est d'interprétation stricte. »
Article 222-16
« Les appels téléphoniques malveillants réitérés ou les agressions sonores en vue de troubler la tranquillité d'autrui, sont punis d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende. »
■ Dol spécial
« [En droit pénal] Attitude psychologique du délinquant consistant de sa part à avoir voulu commettre l’infraction. Il y a dol éventuel lorsque l’agent n’a pas voulu le résultat dommageable tout en ayant prévu la possibilité de sa réalisation. Dans ce cas il répond d’une simple faute non intentionnelle. La théorie selon laquelle les fautes non intentionnelles les plus graves mériteraient d’être assimilées à de véritables intentions (excès de vitesse persistant…) n’a jamais été retenue, ni en jurisprudence, ni dans la loi, parce qu’elle consacre un raisonnement par analogie : ainsi, la faute délibérée, malgré son caractère volontaire, reste non intentionnelle, tout en étant soumise à un régime répressif plus sévère. (…)
Il y a dol indéterminé lorsque l’agent a agi intentionnellement sans se fixer un résultat bien déterminé; il répondra du résultat effectivement causé car le droit présume que l’intention est toujours conforme au résultat atteint. On dit que, indéterminée dans son principe, elle est déterminée par l’événement (“ Dollus indeterminatus determinatur eventu ”). »
■ Interprétation stricte de la loi pénale
« Principe dérivé de la légalité pénale, selon lequel les lois d’incrimination et de pénalité doivent être appliquées sans extension ni restriction. »
■ Principe de légalité
« [En droit pénal] Principe, contenu dans l’adage latin “ Nullum crimen sine lege, nulla poena sine lege ”, selon lequel les crimes et les délits doivent être légalement définis avec clarté et précision, ainsi que les peines qui leur sont applicables. Pour ce qui est des contraventions, soumises aux mêmes exigences, leur définition relève, depuis la Constitution de 1958, du domaine réglementaire. »
Source : Lexique des termes juridiques 2010, 17e éd., Dalloz, 2009.
■ Crim. 20 févr. 2002, Bull. crim. n° 37; D. 2003. Somm. 248, obs. Mirabail.
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