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Droit de la consommation
Information relative aux contrats conclus hors établissement : attention aux risques d’annulation !
Par deux arrêts rendus le 24 janvier dernier, la Cour de cassation confirme la rigueur avec laquelle elle entend appliquer les textes du code de la consommation relatifs au formalisme informatif destiné à protéger l’acheteur ayant conclu un contrat hors établissement. Elle innove également en faisant une première application de sa nouvelle jurisprudence ajoutant des conditions à la confirmation tacite, par le consommateur, d’une vente nulle.
Civ. 1re, 24 janv. 2024, n° 21-20.693 et 21-20.691
Le 20 décembre 2023, la première chambre civile procédait à une application rigoureuse du formalisme informatif requis par le code de la consommation concernant les caractéristiques essentielles de la prestation promise dans un contrat conclu hors établissement (Civ. 1re, 20 déc. 2023, n° 22-14.020). Comme souvent, les faits trouvaient leur origine, ainsi dans les deux espèces rapportées, dans une convention de fourniture et de pose de panneaux photovoltaïques entre un professionnel et un consommateur. Se plaignant de certaines irrégularités du bon de commande, les consommateurs reprochaient à ce document plusieurs insuffisances relatives aux caractéristiques des produits acquis, à savoir les caractéristiques du kit photovoltaïque et la puissance de l’onduleur. Ces deux éléments étant, dans une installation photovoltaïque, d’une importance déterminante pour le bon fonctionnement de l’ensemble, ils comptent, naturellement, parmi les « caractéristiques essentielles » du bien à porter au contrat. C’est donc sans surprise que les consommateurs avaient obtenu l’annulation du bon de commande, sur ce point lacunaire, et du prêt affecté à cette fin. La Cour avait en outre précisé qu’une annexe au bon de commande prévoyant toutes les caractéristiques du bien vendu ne peut suppléer, malgré sa valeur contractuelle, le défaut d’information observé dans le bon de commande sur les caractéristiques essentielles du produit. L’article L. 121-17 imposait déjà (v. désormais le nouv. art. L. 221-5 depuis l’ord. n° 2016-301 du 14 mars 2016) que le contrat mentionne de manière claire et compréhensible « les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné », et le support durable visé par le Code de la consommation ( anc. art. L. 121-18-1 ; art. L. 221-9 nouv.) a toujours été exclusif en ce que l’ensemble des informations requises ne peuvent figurer que dans le contrat.
Depuis toujours requise par les textes du Code de la consommation, cette exclusivité du bon de commande est réaffirmée, par le premier arrêt rapporté, à propos de la date d’exécution de la prestation : « Ayant retenu que la mention d'un délai maximum (de livraison) dans les conditions générales, au demeurant illisible sur l'exemplaire remis au consommateur, ne permettait pas de suppléer l'absence d'indication, sur le bon de commande, de la date d'exécution des différentes prestations, la cour d'appel, (…), en a exactement déduit que le contrat ne satisfaisait pas aux exigences formelles prévues à peine de nullité par le Code de la consommation » (21-20.693). Autrement dit, l’argument tiré de la régularité informative de documents contractuels annexes au contrat principal, s’il eût été recevable sur le terrain du droit des obligations, ne l’est pas sur celui du droit de la consommation, dont les exigences formelles doivent être strictement respectées. Est alors impérative la remise par le professionnel au consommateur d’un exemplaire du contrat conclu hors établissement comprenant, à peine de nullité, toutes les informations légalement requises, dont la date ou le délai de livraison.
Par le second arrêt rapporté, la première chambre civile renforce également la rigueur exprimée dans son arrêt du 20 décembre dernier, dont elle étend le domaine d’application (21-20.691). Au nombre des insuffisances informatives reprochées à leur vendeur, le couple de consommateurs dénonçait une erreur sur la marque de l’onduleur. Ce n’était donc plus, comme dans l’arrêt précité, les caractéristiques techniques du bien, en termes de performance, qui étaient en cause pour déterminer si celles-ci figuraient parmi les caractéristiques « essentielles » du bien à propos desquelles une complète information est exigée. Il s’agissait tout autrement de savoir si la marque d’un produit de consommation peut également revêtir ce qualificatif. Le cas échéant, elle devrait également intégrer le champ d’application des dispositions des articles L. 111-1, L. 121-17 et L. 121-18-1 du Code de la consommation. L’occasion pour la Cour d’affirmer sans réserve que la marque est une caractéristique essentielle du bien de consommation. Le contrôle normatif est ici assez restreint bien que la cour d’appel ait, par ce seul motif, décidé d’annuler le contrat et le crédit affecté à son financement. Il est vrai que la marque est un indice de la qualité de l’installation. Ce qu’elle augure de son bon fonctionnement justifie donc qu’elle rentre dans le champ d’application des règles informatives applicables aux « caractéristiques essentielles ». En l’espèce, faute d’indication de la marque exacte du bien vendu, la sanction de l’annulation trouve à s’appliquer.
Il est encore à noter que la première chambre civile fait ici une première application de sa nouvelle jurisprudence sur la confirmation tacite (Civ. 1re, 24 janv. 2024, n° 22-16.115) en jugeant que le seul respect du formalisme informatif requis dans le bon de commande ne suffit pas à révéler à l'acquéreur les vices affectant ce bon, en sorte que la cour d'appel a pu en déduire que la confirmation tacite de l'acte entaché de nullité n'était pas caractérisée (§11).
Enfin, les deux décisions font application de la règle issue du droit des obligations selon laquelle l'annulation d'une vente entraînant de plein droit la remise des parties en l'état où elles se trouvaient antérieurement à sa conclusion, ne méconnaît pas l'objet du litige le juge qui, même à défaut de demande en ce sens, ordonne à l'issue d'une telle annulation la restitution de la chose vendue et celle du prix. Conséquence légale de l’annulation, le jeu des restitutions est de droit en sorte que même en l’absence de demandée formée en ce sens par le consommateur, le vendeur est tenu de restituer le prix versé.
Dont acte : Face au risque accru d’annulation de leurs contrats, avec les conséquences qui s’ensuivent, les services juridiques des sociétés venderesses de ces installations doivent renforcer leur vigilance et prêter une attention particulière et renforcée à la rédaction des bons de commande, décrivant précisément sur ce seul support l’ensemble des éléments essentiels à leur livraison et à leur fonctionnement.
Références :
■ Civ. 1re, 20 déc. 2023, n° 22-14.020 : Dalloz actualité, 25 janvier 2024, note Cédric Hélaine, D. 2024. 4
■ Civ. 1re, 24 janv. 2024, n° 22-16.115 : DAE, 8 févr. 2024, note Merryl Hervieu, D. 2024. 165
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