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Droit pénal général
Interprétation stricte de l’article relatif à l’infraction d’abandon de famille
Mots-clefs : Rétroactivité in mitius (art. 112-1 C. pén.), Abandon de famille, Infraction (élément légal, élément matériel, élément intentionnel), Prestation compensatoire, Loi de simplification, Renvois
L’infraction d’abandon de famille ne concerne plus que les manquements aux obligations dues au titre de l’autorité parentale, à l’exclusion de la prestation compensatoire due par l’ex-époux après le divorce.
Au cours de l’année 2009, le parquet de Paris avait malencontreusement requis la dissolution de l’Église de Scientologie, accusée d’escroquerie, alors que la loi de simplification et de clarification du droit du 12 mai 2009 avait supprimé cette peine pour les personnes morales, sans que personne ne s’en émeuve (v. blog de Maître Eolas, post du 15 sept. 2009).
Dans notre espèce, une nouvelle conséquence des imperfections de la loi de 2009 est apparue, relative à l’abandon de famille. Les faits étaient les suivants : une femme et son mari avaient divorcé. Ce dernier devait verser, au titre de la prestation compensatoire, un capital de 470 000 euros. N’ayant pas versé cette somme dans les deux mois suivant son exigibilité, il avait été poursuivi, et condamné en première instance pour abandon de famille. La cour d’appel avait confirmé la décision, dans un arrêt en date du 28 avril 2010.
Toutefois, à cette époque, la loi de simplification du droit était entrée en vigueur, car promulguée le 12 mai 2009. Et, l’article 133 III de cette loi (qui modifie à lui seul 5 dispositions législatives existantes…) avait supprimé, dans l’article 227-3 du Code pénal incriminant l’abandon de famille, le renvoi aux titres V, VI, VII et VIII relatifs respectivement au mariage, au divorce, à la filiation et à la filiation adoptive, pour ne garder que celui concernant l’autorité parentale (titre IX).
Ces renvois permettaient d’inclure dans l’abandon de famille le non-respect d’une « décision judiciaire ou une convention judiciairement homologuée […] imposant [au débiteur] de verser au profit » de la personne victime de l’abandon une pension/rente/prestation prévue dans un de ces titres. Toutefois, le nouvel article 227-3 fait toujours mention des versements au profit « d'un enfant mineur, d'un descendant, d'un ascendant ou du conjoint », ce qui paraît englober les prestations compensatoires dues par l’ancien conjoint.
La chambre criminelle n’est pas de cet avis. Selon elle, une fois supprimés, ces renvois font perdre à l’infraction son élément légal, c'est-à-dire sa définition dans la loi (qui est le corollaire du principe de légalité des délits et des peines, v. Précis Dalloz, p. 94 s.). Or, l’article 112-1 du Code pénal est clair : « Sont seuls punissables les faits constitutifs d'une infraction à la date à laquelle ils ont été commis ». En cours de procédure, en l’absence d’une condamnation définitive, le juge ne peut pas condamner une personne pour un délit qui n’existe plus.
La Cour de cassation annule donc la condamnation pénale (trois mois avec sursis) du demandeur au pourvoi. Toutefois, elle « récupère » la procédure en validant les dommages-intérêts civils versés au titre du préjudice subi par l’ex-épouse du fait du non-versement de la prestation compensatoire.
Crim. 16 févr. 2011, n° 10-83.606
Références
« Ensemble des prérogatives conférées par la loi aux père et mère sur la personne et les biens de leur enfant mineur et non émancipé. Chaque prérogative est constituée d’un droit (agir) et d’un devoir (d’agir dans l’intérêt du mineur). Les parents doivent ainsi protéger l’enfant dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à la personne. Jadis conférée au seul père, sous le nom de « puissance paternelle », l’autorité parentale est, en principe, exercée en commun par les père et mère. »
« Capital destiné à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux divorcés et dont le paiement a lieu soit sous la forme du versement d’une somme d’argent, soit par l’attribution de biens en propriété ou d’un droit temporaire ou viager d’usage, d’habitation ou d’usufruit.
À titre exceptionnel, lorsque l’âge ou l’état de santé du créancier ne lui permet pas de subvenir à ses besoins, le juge peut fixer la prestation compensatoire sous forme de rente viagère »
« Fait :
1. de ne pas exécuter intégralement pendant plus de deux mois, une décision judiciaire ou une convention judiciairement homologuée, qui impose le versement de prestations ou pensions au profit d’un enfant mineur, d’un descendant, d’un ascendant ou du conjoint ;
2. ou de s’abstenir de notifier un changement de domicile au créancier de ces prestations ou pensions, dans le délai d’un mois à compter de ce changement.
Depuis le 1er mars 1994, date d’entrée en vigueur du nouveau Code pénal, ne sont plus des délits l’abandon physique du foyer familial par le père ou la mère, ainsi que l’abandon par le mari de sa femme enceinte. Quant à l’abandon moral des enfants, qui était lui aussi incriminé, il s’agit désormais d’une hypothèse de mise en péril des mineurs. »
« Action ou omission violant une norme de conduite strictement définie par un texte d’incrimination entraînant la responsabilité pénale de son auteur. Elle peut être constitutive d’un crime, d’un délit ou d’une contravention en fonction des peines prévues par le texte. »
« Application d’une loi pénale plus douce à des faits commis avant sa promulgation et non définitivement jugés. Ainsi en est-il d’une loi qui diminue une pénalité. »
« Somme d’argent destinée à réparer le dommage subi par une personne en raison de l’inexécution, de l’exécution tardive, ou de l’exécution défectueuse d’une obligation ou d’un devoir juridique par le cocontractant ou un tiers ; on parle alors de dommages et intérêts compensatoires. Lorsque le dommage subi provient du retard dans l’exécution, les dommages et intérêts sont dits moratoires. »
Sources : Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
(Ancienne rédaction)
« Le fait, pour une personne, de ne pas exécuter une décision judiciaire ou une convention judiciairement homologuée lui imposant de verser au profit d'un enfant mineur, d'un descendant, d'un ascendant ou du conjoint une pension, une contribution, des subsides ou des prestations de toute nature dues en raison de l'une des obligations familiales prévues par les titres V, VI, VII et VIII du livre I du code civil, en demeurant plus de deux mois sans s'acquitter intégralement de cette obligation, est puni de deux ans d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.
Les infractions prévues par le premier alinéa du présent article sont assimilées à des abandons de famille pour l'application du 3° de l'article 373 du code civil. »
(Nouvelle rédaction)
« Le fait, pour une personne, de ne pas exécuter une décision judiciaire ou une convention judiciairement homologuée lui imposant de verser au profit d'un enfant mineur, d'un descendant, d'un ascendant ou du conjoint une pension, une contribution, des subsides ou des prestations de toute nature dues en raison de l'une des obligations familiales prévues par le titre IX du livre Ier du code civil, en demeurant plus de deux mois sans s'acquitter intégralement de cette obligation, est puni de deux ans d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.
Les infractions prévues par le premier alinéa du présent article sont assimilées à des abandons de famille pour l'application du 3° de l'article 373 du code civil. »
■ Bouloc B., Droit pénal général, 21e éd., 2009, Dalloz, coll. « Précis », p. 94 s.
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