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Droit des obligations
La charge de la preuve dans le contentieux de la vente sous condition suspensive
S’il appartient, dans un premier temps, au bénéficiaire d’une promesse unilatérale de vente sous condition suspensive de prouver qu’il a accompli les diligences nécessaires à l’obtention du prêt, il incombe ensuite au vendeur de démontrer que l’acquéreur a empêché la réalisation de cette condition.
Suite à la conclusion d’une promesse unilatérale de vente d’une maison sous condition suspensive de l’obtention d’un ou plusieurs prêts destiné à en financer l’acquisition, les bénéficiaires de la promesse ont versé une indemnité d’immobilisation entre les mains du notaire du promettant.
Les prêts n’ont finalement pas été obtenus par les bénéficiaires de la promesse, qui assignent alors le propriétaire de la maison en restitution de l’indemnité d’immobilisation. En effet, la défaillance de la condition suspensive entraîne l’anéantissement rétroactif du contrat, et donc la restitution de l’indemnité d’immobilisation versée en exécution dudit contrat s’impose.
La cour d’appel fait droit à cette demande, constatant le défaut de réalisation de la condition suspensive, et dès lors la caducité de la promesse unilatérale de vente.
Le promettant forme alors un pourvoi en cassation, à l’appui duquel il fait valoir que les demandes de prêt n’étaient pas conformes aux stipulations de la promesse de vente, et que les bénéficiaires ont, par conséquent, empêché la réalisation de la condition suspensive. Il se prévaut ainsi du bénéfice de l’ancien article 1178 du Code civil qui prévoit, à titre de sanction, que la condition est réputée accomplie chaque fois que le bénéficiaire de la promesse en aura empêché la réalisation. La jurisprudence applique régulièrement cette règle, laquelle n’est pas remise en cause par l’ordonnance du 10 février 2016, applicable aux contrats conclus après le 1er octobre 2016 (C. civ., art. 1304-3). Il a ainsi notamment été jugé, que la sanction de l’article 1178 devait s’appliquer lorsque l’acquéreur avait demandé un prêt d’un montant supérieur à celui stipulé dans la promesse (Civ. 3e, 15 déc. 1998, n° 97-18.708), ou avait annulé sa demande de prêt (Civ 1re, 16 juill. 1991, n° 89-13.269).
Mais cet argument ne convainc pas la Cour de cassation, qui, pour rejeter le pourvoi et entériner le raisonnement de la cour d’appel, se situe sur le terrain de la preuve. En effet, il est relevé que le promettant ne rapportait pas la preuve que le défaut de réalisation de la condition suspensive était imputable aux bénéficiaires de la promesse de vente, tandis que ces derniers ont quant à eux démontré qu’ils avaient accompli les démarches nécessaires à l’obtention du prêt, et ce dans les délais impartis.
Cette solution s’inscrit dans une jurisprudence classique, selon laquelle c’est à l’acquéreur, dans un premier temps, de prouver qu’il a accompli les diligences nécessaires à l’obtention du prêt, puis au vendeur, dans un second temps, de démontrer que le bénéficiaire de la promesse a empêché la réalisation de la condition d’obtention du prêt stipulée (Civ. 3e, 26 mai 2010, n° 09-15.317 ; Civ 3e, 6 oct. 2010, n° 09-69.914). La charge de la preuve pèse donc initialement sur l’acquéreur, car c’est a priori lui qui détient les pièces propres à prouver l’exécution de l’obligation. Cependant, si ce dernier a prouvé qu’il a exécuté son obligation, il paraît opportun d’imposer ensuite au promettant, qui invoque une faute de son contractant, de prouver celle-ci.
Civ. 3e, 3 mai 2018, n° 17-15.603
Références
■ Civ. 3e, 15 déc. 1998, n° 97-18.708.
■ Civ 1re, 16 juill. 1991, n° 89-13.269 : RDI 1993. 91, obs. J.-C. Groslière et C. Saint-Alary-Houin.
■ Civ. 3e, 26 mai 2010, n° 09-15.317 P : D. 2010. 1483.
■ Civ 3e, 6 oct. 2010, n° 09-69.914 P.
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