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Droit de la concurrence
La CJCE se prononce sur le monopole d'exploitation des jeux de hasard en ligne
Mots-clefs : Jeux en ligne, Concurrence, Libre prestation des services, Article 49 TCE
La Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) indique, dans un arrêt du 8 septembre 2009, que l’article 49 du traité CE ne s’oppose pas à une réglementation nationale qui interdit à des opérateurs établis dans d’autres États membres, où ils fournissent légalement des services analogues, de proposer des jeux de hasard internet sur le territoire de l'État concerné.
Saisie d'une demande de décision préjudicielle introduite par une juridiction répressive portugaise, dans le cadre d'une procédure opposant la société Bwin international Ltd (entreprise privée de jeux en ligne établie à Gibraltar) et la ligue portugaise de football professionnel au département des jeux de la Santa Casa da Misericórdia de Lisboa (l'organisme titulaire, au Portugal, du droit exclusif d'organiser et d'exploiter les loteries, jeux de loto et paris sportifs en ligne), la Cour de Luxembourg était amenée à se prononcer sur la conformité de la réglementation portugaise — qui accorde un droit exclusif à un organisme dépendant du gouvernement et prévoit des sanctions sous forme d'amendes en cas de non-respect de ce monopole — au principe de libre prestation des services posé par l'article 49 du traité CE.
Dans son analyse, elle relève que la législation portugaise constitue une restriction à la libre prestation des services. Celle-ci devait donc, pour être conforme au droit communautaire, obéir à plusieurs conditions :
– être propre à garantir la réalisation des objectifs invoqués par l'État membre concerné ;
– ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour l'atteindre ;
– et, en tout état de cause, être appliquée de manière non discriminatoire.
Sur le premier point, la Cour constate que l'objectif principal poursuivi est la lutte contre la criminalité, et plus spécifiquement la protection des consommateurs contre des fraudes commises par les opérateurs. Sur le deuxième point, la Cour admet que l'octroi de droits exclusifs à un opérateur soumis à un contrôle étroit des pouvoirs publics peut permettre de canaliser l'exploitation des jeux dans un circuit contrôlé et être considéré comme apte à protéger les consommateurs. Sur le dernier point, enfin, elle estime qu'un État membre est en droit de considérer que le seul fait qu'un opérateur privé propose légalement des services analogues dans l'État membre où il est établi et où il est en principe déjà soumis à des conditions légales et à des contrôles ne saurait être considéré comme une garantie suffisante de protection des consommateurs nationaux. Elle en conclut que « la restriction en cause au principal peut, eu égard aux particularités liées à l'offre de jeux de hasard par internet, être considérée comme justifiée par l'objectif de lutte contre la fraude et la criminalité » (pt. 72).
Cet arrêt, qui concerne le Portugal, pourrait avoir un écho particulier en droit français. Le gouvernement envisage en effet d'ouvrir à la concurrence le secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne, officiellement pour lutter contre l'offre illégale qui s'est développée face au monopole du PMU et de la Française des jeux (sur ce texte, v. références). Le projet entend cependant maîtriser cette ouverture et subordonner, à compter du 1er janvier 2010, l'activité des opérateurs à l'obtention d'un agrément valable cinq ans, délivré en fonction du respect d'un cahier des charges précis et devant permettre un contrôle étroit et permanent de l'activité des sites par les pouvoirs publics.
CJCE 8 septembre 2009, n° C-42/07
Références
■ Traité sur l’Union européenne (Chapitre 3 - Les services)
Article 56 (ex-article 49 TCE)
« Dans le cadre des dispositions ci-après, les restrictions à la libre prestation des services à l'intérieur de l'Union sont interdites à l'égard des ressortissants des États membres établis dans un État membre autre que celui du destinataire de la prestation.
Le Parlement européen et le Conseil, statuant conformément à la procédure législative ordinaire, peuvent étendre le bénéfice des dispositions du présent chapitre aux prestataires de services ressortissants d'un État tiers et établis à l'intérieur de l'Union. »
■ Sur le projet du gouvernement d’ouvrir à la concurrence le secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne : D. 2009. Act. 865.
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