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Droit de l'entreprise en difficulté
La confirmation du principe d’indivisibilité entre les parties dans le cadre de l’admission des créances
La décision concernait l’hypothèse d’une créance admise au passif d’une procédure collective. La Cour de cassation approuve une décision de la cour d’appel d’Aix-en-Provence du 22 septembre 2016, qui affirmait l’existence d’un lien d’indivisibilité en matière de vérification des créances. Dès lors, la personne intéressée devait appeler à l’instance l’ensemble des parties.
En l’espèce une banque avait consenti un prêt à une société, lequel avait été garanti par une hypothèque constituée par le gérant de la société emprunteuse avec le consentement de son épouse.
Cette société a été mise en redressement le 30 septembre 1994 et puis en liquidation judiciaire le 27 octobre 1997. Le juge commissaire, par une ordonnance du 18 mai 2001, a admis la créance d’une société tierce, cessionnaire de la créance de prêt consenti par la banque. L’épouse du gérant a formé, par déclaration au greffe du tribunal de commerce du 6 avril 2012, réclamation contre cette décision d’admission. Le mandataire ad hoc de la société débitrice, la banque créancière et le liquidateur ont été convoqués devant le juge-commissaire. Ce dernier a déclaré recevable la réclamation de l’épouse, mais l'a rejetée. L’épouse a donc fait appel de cette ordonnance, en intimant le liquidateur, ès qualités, en sa qualité de mandataire ad hoc de la société débitrice, et la société créancière, puis s'est désistée de son appel contre la société débitrice et contre la société créancière. Le liquidateur, demeurant seul intimé, a formé un incident pour voir déclarer l’appel irrecevable. L’ordonnance lui étant favorable.
En effet, la cour d’appel a confirmé l'ordonnance du conseiller de la mise en état ayant déclaré l’appel de l’épouse irrecevable. L’épouse forme un pourvoi en cassation. La Cour de cassation rejette le pourvoi et confirme la décision rendue par la cour d’appel sous le fondement que : « le lien d'indivisibilité existant en matière d'admission des créances entre le créancier, le débiteur et le liquidateur implique que la personne intéressée, appelante de l’ordonnance du juge-commissaire ayant rejeté sa réclamation contre une décision d’admission portée sur l’état des créances, appelle à l’instance l’ensemble de ces parties ; qu’ayant relevé que tant la société créancière, que le mandataire ad hoc de la société débitrice et le liquidateur étaient parties devant le juge-commissaire saisi de la réclamation de [l’épouse du gérant de la société emprunteuse] et que cette dernière, après les avoir tous intimés par sa déclaration d’appel, s’est désistée de son appel à l’égard du créancier et du débiteur, l’arrêt retient exactement que la décision à intervenir sur la réclamation étant susceptible d’avoir une incidence sur l’admission de la créance et l’appel de la décision statuant sur la réclamation, dont la cour d’appel demeure saisie, n’opposant plus que la personne intéressée formant la réclamation et le liquidateur, cet appel est irrecevable … ».
En vertu donc du caractère indivisible en matière d’admission des créances, la personne intéressée, en l’espèce l’épouse appelante de l’ordonnance du juge-commissaire, devrait appeler à l’instance l’ensemble des parties, c’est-à-dire, le créancier, le débiteur et le liquidateur. L’épouse de la société emprunteuse en tant que « personne intéressée » peut, selon les termes de l’article R. 624-8, alinéa 3, du Code de commerce, « présenter une réclamation devant le juge-commissaire dans le délai d’un mois à compter de la publication » de la décision d’admission ; et l’article R. 624-10, alinéa 3, du Code de commerce ajoute que « le recours contre les décisions du juge-commissaire statuant sur une réclamation est formé devant la cour d’appel ». Or l’article 553 du Code de procédure civile prévoit qu’« en cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel de l'une produit effet à l'égard des autres même si celles-ci ne se sont pas jointes à l'instance ; l'appel formé contre l'une n'est recevable que si toutes sont appelées à l'instance » ; d’où la nécessité de respecter la règle selon laquelle l’ensemble des parties doit être d’appelé à l’instance.
Par ailleurs, la Cour de cassation avait déjà décidé dans un arrêt de cassation qu’« en cas d’indivisibilité à l’égard de plusieurs parties, l’appel formé contre l’une n’est recevable que si toutes sont appelées à l’instance ; …il existe un tel lien d’indivisibilité en matière d’admission des créances entre le créancier, le débiteur et le liquidateur ». (Com. 15 nov. 2016, n° 14-29.885). La Haute juridiction rappelle dans son attendu de principe qu’en cas d’indivisibilité entre les parties, les juges d’appel doivent relever d’office l’irrecevabilité de l’appel, en réaffirmant donc l’existence d’un lien d’indivisibilité en matière de vérification des créances (Com. 29 sept. 2015, n° 14-13.257).
Ainsi, il appartient à l’appelant de vérifier scrupuleusement s’il existe, concrètement, un lien d’indivisibilité entre les parties et, dans l’affirmative, de mettre en cause l’ensemble des parties concernées par cette indivisibilité, à peine d’irrecevabilité du recours.
Com. 28 mars 2018, n° 16-26.453 P
Références
■ Com. 15 nov. 2016, n° 14-29.885 P: D. 2016. 2334 ; RTD com. 2017. 181, obs. A. Martin-Serf.
■ Com. 29 sept. 2015, n° 14-13.257: D. 2015. 2007.
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