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Procédure pénale
La partie civile devenue témoin
Mots-clefs : Intervention, Qualité pour intervenir, Partie civile, Cour d'appel, Témoin, Procès pénal, Avocat, Victime
Lorsque les dispositions civiles du jugement sont devenues définitives, la partie civile, constituée en première instance, qui n’est plus partie en appel, ne peut comparaître à l’audience ou s’y faire représenter et ne peut être entendue qu’en qualité de témoin. Dans ce dernier cas, elle ne saurait, dès lors, être assistée d'un avocat.
Deux arrêts de la Chambre criminelle viennent préciser le statut de la victime dans le procès pénal, constituée partie civile en première instance, et donc partie au procès, et qui par la suite, n’est plus partie devant la juridiction du second degré, faute pour elle d’avoir interjeté appel des dispositions civiles du jugement de relaxe.
Dans le premier arrêt (n° 16-82.484), la victime de faits de harcèlement moral aggravé par conjoint s’était constituée partie civile dans la procédure ouverte à l’encontre de son époux. Le tribunal avait relaxé celui-ci et débouté la partie civile de ses demandes. Sur appel du procureur de la République, la cour d’appel, après avoir entendu en qualité de témoin l’épouse, « assistée de son conseil », a infirmé la première décision et est entrée en voie de condamnation contre le prévenu. Dans son pourvoi, le mari reprochait aux juges d’appel l’absence de prestation de serment de sa femme entendue comme témoin et contestait qu’elle ait été entendue en cette qualité avec l’assistance d’un avocat. Lui donnant partiellement raison, la Chambre criminelle censure la décision rendue rappelant « qu'en procédant ainsi, alors que, si le témoin était dispensé de prêter serment en application de l’article 448, 5°, du code de procédure pénale, il ne pouvait être assisté d’un avocat ».
Dans la seconde affaire (n° 15-86.434), cinq personnes étaient poursuivies, les unes pour abus de biens sociaux en récidive, banqueroute, abus de confiance, faux et usage en récidive, les autres pour recels et complicité d’abus de biens sociaux. Par jugement du 18 juin 2013, les demandeurs ont été condamnés à diverses peines pour une partie des faits qui leur étaient reprochés ainsi qu’à payer des dommages et intérêts à deux parties civiles constituées. Devant la cour d’appel, saisie du seul appel du procureur de la République, l’avocat de l’une des parties civiles a été entendu en sa plaidoirie. Statuant sur les pourvois formés par les prévenus, là encore la chambre criminelle prononce un arrêt de cassation. Rappelant dan un chapeau que « l’affaire est dévolue à la cour d’appel dans la limite fixée par l’acte d’appel et la qualité de l’appelant (C. pr. pén., art. 509) et que seuls le ministère public et les parties en cause ont la parole devant ladite cour (C. pr. pén., art. 513, al. 3), elle en déduit que « lorsque les dispositions civiles du jugement sont devenues définitives, la partie civile, constituée en première instance, qui n’est plus partie en appel, ne peut comparaître à l’audience ou s’y faire représenter et ne peut être entendue qu’en qualité de témoin ».
Si en qualité de partie civile, la victime peut interjeter appel de la plupart des décisions rendues relativement à ses intérêts civils, et ce, à chacun des stades de la procédure, il n’en est pas de même concernant les décisions relatives à l’action publique. Ainsi en est-il de l’article 497, 3° du Code de procédure pénale, qui n'admet qu'une faculté d'appel limitée de la partie civile contre les décisions de relaxe des juridictions correctionnelles. Dans cette hypothèse, le droit d’appel de la partie civile est limité à ses seuls intérêts civils. Il lui est impossible de relever appel des dispositions pénales. Cette limitation a été considérée conforme à la Constitution (Cons. const. 31 janv. 2014, n° 2013-363 QPC). Dès lors que la victime partie civile n’interjette pas appel, la première décision, sur la question des intérêts civils, devient définitive. L'affaire étant dévolue à la cour d'appel dans la limite fixée par l'acte d'appel et par la qualité de l'appelant, les juridictions d’appel, en l’espèce, n’étaient saisies que des dispositions pénales en raison du seul appel du ministère public.
La victime partie civile, non appelante d'un jugement de relaxe, n'est plus partie à l'instance d'appel (Crim. 9 mars 2005, n° 04-80.384). Faute d’avoir exercé cette voie de recours, la victime partie-civile devient devant la Cour d’appel une « victime-témoin» et perd donc les droits afférents au statut de partie civile notamment le droit à l’assistance d’un avocat (ou être représentée par son avocat : Crim. 18 juin 2014, n° 13-87.951). C’est là une solution classique et logique que rappelle la Chambre criminelle.
S’agissant de l’obligation de serment imposé au témoin entendu à l’audience d’une juridiction répressive, avant de commencer leur déposition, de prêter le serment de dire toute la vérité, rien que la vérité, elle n’est pas applicable aux personnes qui en raison de leur lien de famille avec l'accusé ne prêtent pas serment et ne peuvent en conséquence être entendus qu'à titre de simples renseignements. Ainsi en est-il, selon l’article 448 du Code de procédure pénale des parents, des enfants, des frères et sœurs, ou encore du conjoint (même après divorce : C. pr. pén., art. 448, 5°) de l'accusé. La cour d’appel pouvait donc recevoir le témoignage de l’épouse (n° 16-82.484), sans que celle-ci n’ait préalablement prêté serment de dire toute la vérité, rien que la vérité.
Crim. 29 mars 2017, n° 16-82.484
Crim. 29 mars 2017, n° 15-86.434
Références
■ Cons. const. 31 janv. 2014, n° 2013-363 QPC, D. 2014. 651, note A. Botton ; AJ pénal 2014. 136, obs. C. Lacroix.
■ Crim. 9 mars 2005, n° 04-80.384 P, D. 2005. 1302.
■ Crim. 18 juin 2014, n° 13-87.951 P, Dalloz actualité, 23 juill. 2014, obs. C. Fonteix.
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