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[ 4 février 2015 ] Imprimer

Droit européen et de l'Union européenne

La relation entre l’avocat et son client soumise au respect de la protection du consommateur

Mots-clefs : Avocat, Clause abusive, Consommateur, Clauses standardisée, Secret professionnel

La protection du consommateur est un objectif récurrent du droit de l’Union européenne et qui a donné lieu à l’adoption notamment de la directive 93/13/CEE du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs. La Cour juge que cette directive s’applique aux avocats lorsque le contrat reprend des clauses standardisées pour une prestation juridique. Cependant, pour qu’une clause soit qualifiée d’abusive, la Cour exige que la nature particulière du service soit prise en considération au regard du caractère clair et compréhensible des clauses contractuelles.

Le droit de l’Union entend lutter contre les clauses abusives dans le cadre des relations entre professionnel et consommateur sur le fondement de la directive 93/13/CEE du 5 avril 1993. Le consommateur est entendu, dans cette directive, comme quelqu’un qui n’agit pas à des fins qui entrent dans le cadre de son activité professionnelle. Si cette directive ne se limite pas à un champ d’activité, la question de son application aux services juridiques et plus particulièrement à l’activité des avocats n’apparaissait pas évidente. Aussi, un juge lituanien a préféré poser plusieurs questions afin de s’en assurer.

Ce juge était saisi d’un litige opposant une femme à son avocat. La cliente avait conclu trois contrats standardisés de prestation de services juridiques avec son avocat. Le premier contrat visait la procédure de divorce dont le partage des biens et la détermination du lieu de résidence de l’enfant. Le deuxième portait sur une procédure d’annulation d’une transaction et le troisième sur une procédure d’appel. Les modalités de paiement n’avaient pas été fixées dans le contrat, tout comme les prestations juridiques n’étaient pas détaillées. C’est ainsi que le versement des honoraires n’a pas été effectué, conduisant l’avocat à saisir les juridictions lituaniennes. La première instance et l’appel ont donné gain de cause à l’avocat, cependant la juridiction de cassation a choisi de prendre en considération le moyen fondé sur la protection du consommateur.

Fort des questions posées sur l’application de la directive, la Cour de justice reconnaît que le texte européen peut s’appliquer aux prestations de services juridiques. En effet, la directive vise tous les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur. La Cour juge que cette application est d’autant plus justifiée que l’avocat dispose de compétences techniques élevées que ne possède pas nécessairement le consommateur. Dès lors, la relation est asymétrique, exigeant une protection réelle.

La Cour précise que le caractère public de cette prestation n’a aucune incidence conformément au contenu de la directive. De même que la spécificité de la mission et les obligations déontologiques de l’avocat n’ont aucune incidence, puisque les clauses généralisées ne peuvent contenir des informations personnalisées risquant de porter atteinte au secret professionnel. La Cour garantit l’effet utile de la directive.

Toutefois la Cour précise les hypothèses d’application de la directive, permettant de comprendre que les relations entre un avocat et son client ne sont pas systématiquement soumises à ces dispositions. Deux conditions semblent se dégager de l’arrêt.

Il faut, tout d’abord, être face à des clauses standardisées soit à l’initiative de l’avocat, soit à l’initiative de l’ordre, dès lors qu’il s’agit d’un choix de l’avocat de les intégrer dans le contrat. Ainsi il ne faut pas que ces clauses soient imposées par le pouvoir législatif ou réglementaire. Également, ne rentrent pas dans ce champ, les clauses qui font l’objet d’une négociation individuelle, puisque celles-ci peuvent contenir des informations confidentielles. La Cour exclut explicitement, en raison de cet élément, les clauses négociées concernant les honoraires.

Il faut, ensuite, que le juge national prenne en considération la nature du service, objet du contrat et les circonstances de sa conclusion, afin de déterminer si les clauses ont un caractère clair et compréhensible. Aussi la conclusion automatique de l’existence d’une clause abusive apparaît-elle finalement réduite.

Pour les avocats, le risque d’une sanction pour clause abusive semble s’éloigner ; toutefois il ne faut pas négliger qu’en cas de doute sur le sens de la clause, l’interprétation retenue doit profiter au consommateur.

CJUE 15 janv. 2015, Biruté Siba c/ Arunas Devènas, C-537/13

 

Auteur :V. B.


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