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Droit des sociétés
L’action ut singuli : pas d’extension aux tiers
Mots-clefs : Société, Action sociale en responsabilité, Recevabilité, Conditions, Qualité des défendeurs
L’action sociale en responsabilité, engagée par les actionnaires pour le compte d’une société, ne peut être dirigée que contre les administrateurs ou le directeur général.
Des actionnaires minoritaires d’une société d’hôtellerie déclarent vouloir exercer, ut singuli, l’action en réparation des préjudices subis par ladite société, comme le prévoit expressément le Code de commerce. En effet, les actionnaires peuvent poursuivre en vue d’obtenir réparation de l’entier préjudice subi par la société dont ils détiennent des actions ; le cas échéant, c’est à la personne morale que des dommages-intérêts seront alloués.
En l’espèce, leurs demandes indemnitaires sont néanmoins rejetées en appel au motif de l’irrecevabilité de leur action tenant au fait que les sociétés attaquées, défenderesses au litige, ne revêtent ni la qualité d’administrateur social ni celle de directeur général. Au soutien de leur pourvoi en cassation, les demandeurs font alors valoir la règle selon laquelle les actionnaires d’une société peuvent agir individuellement, au nom de la société, en réparation du préjudice subi par celle-ci et précisent également que la recevabilité de cette action s’impose à l’égard des tiers qui ont causé le préjudice subi par la société dès lors que celle-ci est mise en cause.
Le rejet du pourvoi était cependant prévisible, les demandeurs s’étant démarqués de la lettre de l’article L. 225-252 du Code de commerce qui limite le cercle des défendeurs à ce type d’action : « outre l’action en responsabilité du préjudice subi personnellement, les actionnaires peuvent, soit individuellement, soit par association (…), soit en se groupant dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État, intenter l’action sociale en responsabilité contre les administrateurs ou le directeur général (…) ».
C’est donc très logiquement que la chambre commerciale confirme l’exacte application du texte par les juges du fond, ces derniers ayant pu constater pour déduire l’irrecevabilité des demandes formées : « qu’aucune des sociétés visées par les demandes des actionnaires minoritaires n’était investie de [la] qualité » d’administrateurs ou de directeur général.
Ainsi, l’action sociale en responsabilité ne doit pas être étendue aux tiers étrangers aux fonctions essentielles de la société dont la réparation du préjudice est demandée. Soulignons, toutefois, que la chambre criminelle a procédé à une seule lecture extensive de l’article L. 225-252 du Code de commerce le combinant avec l’article 480-1 du Code de procédure pénale, pour admettre la recevabilité de l’action sociale contre des personnes n’ayant pas la qualité d’administrateurs de la société mais ayant été condamnées pour complicité de délits commis par des administrateurs (v. not., Crim. 28 janv. 2004).
Com. 19 mars 2013, n°12-14.213
Références
[Droit général]
« Ut singuli : “ en tant que chacun en particulier ” (littéralement).
Ut universi : “ en tant que tous ensemble ” (littéralement).
Lorsque l’on considère une personne, un bien, l’exercice d’une action en justice, à titre individuel, on emploie l’expression ut singuli. En revanche, l’expression ut universi indique que l’on envisage des biens ou des actions dans le cadre d’une universalité (ainsi d’une succession). »
Source : Lexique des termes juridiques 2013, Dalloz.
■ Article L. 225-252 du Code de commerce
« Outre l'action en réparation du préjudice subi personnellement, les actionnaires peuvent, soit individuellement, soit par une association répondant aux conditions fixées à l'article L. 225-120 soit en se groupant dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État, intenter l'action sociale en responsabilité contre les administrateurs ou le directeur général. Les demandeurs sont habilités à poursuivre la réparation de l'entier préjudice subi par la société, à laquelle, le cas échéant, les dommages-intérêts sont alloués. »
■ Article 480-1 du Code de procédure pénale
« Les personnes condamnées pour un même délit sont tenues solidairement des restitutions et des dommages-intérêts.
En outre, le tribunal peut, par décision spéciale et motivée, ordonner que le prévenu qui s'est entouré de coauteurs ou de complices insolvables sera tenu solidairement des amendes. »
■ Crim. 28 janv. 2004, n°02-87-585, D. 2004. 1447.
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