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Droit de la famille
L’adoption de l’enfant peut être contraire à son intérêt
Mots-clefs : Adoption simple, Conditions, Respect de la vie familiale, Intérêt de l’enfant
N’est pas conforme à l’intérêt de l’adoptée l’adoption qui constitue pour les parties un bouleversement anormal de l’ordre familial.
Des grands-parents saisissent le tribunal de grande instance d’une demande d’adoption simple de leur petite-fille, née de la relation de leur fils avec la mère de l’enfant. Leur requête est rejetée. En appel, leur demande d’adoption est également refusée au motif que l’adoption projetée promet de créer un bouleversement anormal de l’ordre familial contraire à l’intérêt de l’enfant. Les grands-parents se pourvoient en cassation. Ils soutiennent que l’avis défavorable des parents de l’enfant est indifférent dès lors que la loi n’érige pas le consentement des parents de l’enfant en condition de l’adoption simple. La Cour de cassation rejette néanmoins leur pourvoi, confirmant l’analyse de la cour d’appel, laquelle a souverainement estimé que l’adoption projetée attenterait au respect dû à la vie familiale et contrarierait l’intérêt de l’enfant.
À la différence de l’adoption plénière, l’adoption simple laisse subsister la filiation par le sang en y adjoignant simplement la filiation adoptive. Dans le cadre de cette adoption, les liens du sang avec la famille d’origine sont donc maintenus, et ainsi préservés. Les conditions de l’adoption simple sont par conséquent moins exigeantes et nombreuses que celles requises pour l’adoption plénière ; sur ce point, l’arrêt rapporté est significatif. Il rappelle en effet qu’aux termes des dispositions de l’article 360 du Code civil, l’adoption simple est permise quel que soit l’âge de l’adopté, alors que l’adoption plénière n’est possible que pour des enfants âgés de moins de quinze ans. Il rappelle également qu’en vertu des articles 361 et 347 du même code, le consentement des parents à l’adoption simple n’est pas requis dès lors que l’enfant dont l’adoption est sollicitée est majeur et a lui-même consenti à l’adoption, alors que le consentement parental est toujours exigé en cas d’adoption plénière (C. civ., art. 348).
En l’espèce, l’enfant était mineur et avait valablement consenti au projet de son adoption par ses grands-parents, d’où l’indifférence invoquée par les auteurs du pourvoi, ensuite confirmée par les juges, au défaut de consentement à l’adoption des parents de la jeune fille. Cela étant, la défaveur des parents au projet d’adoption fut prise en compte, non comme condition à l’adoption mais comme élément d’appréciation de l’intérêt de l’enfant lequel est, lui, une condition déterminante du prononcé de l’adoption.
En effet, le contrôle de la conformité du projet d’adoption à l’intérêt de l’enfant est rigoureusement assuré par le juge administratif comme par le juge civil, chacun procédant à une appréciation concrète et circonstanciée des intérêts en présence. C’est la raison pour laquelle dans cette affaire, les juges ont naturellement pris en considération les arguments exprimés par les parents au soutien de leur position, ces derniers invoquant principalement la volonté des grands-parents de les « déposséder » de leur enfant. Pour constater le défaut d’intérêt de l’enfant à l’adoption, les juges ont également tenu compte du fait que cet enfant a une filiation, maternelle comme paternelle, légalement établie et que par ailleurs, les grands-parents ont déjà obtenu une délégation entière de l’autorité parentale.
En somme, les juges soulignent ici que le prononcé d’une adoption simple ne dépend pas seulement de la satisfaction des conditions légales, en l’espèce établie. Encore faut-il que l’adoption projetée repose sur des motifs légitimes et conformes à l’intérêt de l’enfant.
Or, en l’espèce, la légitimité de la finalité de l’adoption comme sa conformité à l’intérêt de l’adoptée n’ont pas été démontrées. Une demande d’adoption motivée par des rivalités familiales et qui engendrerait une confusion de génération inutile en présence d’un lien de parenté déjà très proche est évidemment contraire à l’intérêt de l’enfant et doit, en conséquence, être rejetée.
Civ. 1re, 6 mars 2013, n°12-17.183
Références
■ Code civil
« Peuvent être adoptés :
1° Les enfants pour lesquels les père et mère ou le conseil de famille ont valablement consenti à l'adoption ;
2° Les pupilles de l'État ;
3° Les enfants déclarés abandonnés dans les conditions prévues par l'article 350. »
« Lorsque la filiation d'un enfant est établie à l'égard de son père et de sa mère, ceux-ci doivent consentir l'un et l'autre à l'adoption.
Si l'un des deux est mort ou dans l'impossibilité de manifester sa volonté, s'il a perdu ses droits d'autorité parentale, le consentement de l'autre suffit. »
L'adoption simple est permise quel que soit l'âge de l'adopté.
S'il est justifié de motifs graves, l'adoption simple d'un enfant ayant fait l'objet d'une adoption plénière est permise.
Si l'adopté est âgé de plus de treize ans, il doit consentir personnellement à l'adoption. »
« Les dispositions des articles 343 à 344, du dernier alinéa de l'article 345, des articles 346 à 350,353,353-1, 353-2, 355 et des trois derniers alinéas de l'article 357 sont applicables à l'adoption simple. »
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