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Droit des obligations
Assurance annulation et supplément de prix optionnel d'un billet d'avion
Mots-clefs : Notion de supplément de prix optionnel, Assurance annulation de vol, Offre, Acceptation, Consentement, Protection du consommateur, Prix, Transparence, Contrat électronique, Droit communautaire, Question préjudicielle
L’assurance annulation de vol lors de la vente de billet d’avion sur Internet constitue un « supplément de prix optionnel ». Par conséquent, elle doit faire l’objet d’une démarche explicite d’acception par l’acheteur et ne peut être inclue par défaut.
Afin de permettre au consommateur de comparer les prix des services aériens pratiqués par les différentes compagnies et de favoriser la transparence de ces derniers, l’article 23 du règlement n°1008/2008 du 24 septembre 2008 établissant des règles communes pour l'exploitation de services aériens dans la Communauté oblige notamment les vendeurs à préciser à tout moment le « prix définitif » des billets d’avion. La notion de « prix définitif » comprend le tarif des passagers ou le tarif du fret applicable ainsi que l’ensemble des taxes, des redevances, des suppléments et des droits indispensables pour les besoins du vol. En revanche, les « suppléments de prix optionnels » en sont exclus. Ils doivent en effet, selon les termes du règlement, être communiqués de façon « claire, transparente et non équivoque au début de toute procédure de réservation et leur acceptation par le client [doit] résulte[r] d’une démarche explicite d’acceptation».
La question préjudicielle posée dans cette affaire par une juridiction allemande porte sur l’étendue de la qualification de « supplément de prix optionnel ». Il était en l’espèce nécessaire de déterminer si l’assurance annulation de vol fournie par une partie autre que le transporteur aérien et facturée au client par le vendeur de ce voyage avec le tarif du vol, sous la forme d’un prix global constituait un « supplément de prix optionnel ». En effet, de cette qualification dépend l’appréciation de la conformité de l’inclusion par défaut d’une telle assurance. De cette même qualification dépendait donc l’issue du litige au principal.
Il était en l’espèce reproché à une société, qui commercialise des voyages aériens via un portail Internet, d’inclure par défaut l’assurance annulation dans le tarif du vol. Une telle inclusion par défaut implique que la liberté contractuelle du client ne s’exerce positivement non sur le fait de s’engager, mais sur celui de ne pas s’engager, situation quelque peu inédite. Au cours de la réservation, le client est informé au bas de la page Internet, de la démarche à suivre pour refuser l’assurance. En cas de paiement par le client du prix global incluant par défaut l’assurance annulation, la société verse à chacun son du : le prix du vol à la compagnie aérienne, les taxes de redevances aux autorités compétentes et enfin, la prime d’assurance à la société d’assurance.
Cette pratique, qui conduit à faire d’une abstention le fait générateur de l’obligation, est jugée équivoque et contraire à la logique de transparence et de compréhension des transactions voulue par le droit communautaire, par l’Union fédérale des centrales et associations de consommateurs qui assigne la société. La demanderesse soutient qu’en tant que supplément de prix optionnel, l’assurance annulation de vol est soumise au régime protecteur mis en place par le règlement en la matière.
Dans cette décision, la Cour qualifie l’assurance annulation de vol, prestation fournie par une partie autre que le transporteur aérien et facturée au client par le vendeur du voyage avec le tarif du vol, sous la forme d’un prix global, de « supplément de prix optionnel ». La procédure d’achat d’une assurance annulation de vol est donc soumise au régime protecteur du règlement. Celle-ci doit être explicitement acceptée par le client (opt-in), et non explicitement refusée (opt-out).
Au-delà du droit de la consommation, cette réponse de la CJUE est conforme aux objectifs de protection de l’intégrité du consentement. En effet, l’acceptation d’une offre doit être explicite, le silence ne valant rarement acceptation (Civ., 25 mai 1870). Si la Cour de cassation admet le contraire dans certaines circonstances notamment lorsque l’offre est conforme aux relations habituelles des parties (Com. 15 mars 2011) il semble qu’exiger par principe un refus explicite pour désengager le client dans le cadre d’un contrat d’adhésion conclu sur Internet viole la logique irriguant la protection du consentement. Faire d’une simple abstention une acceptation pure et simple semble donc plus simple que pur : plus simple en ce qu’elle passe inaperçue, moins pure pour cette unique et même raison ! La réponse de la CJUE s’élève donc à la hauteur des exigences de protection du consentement.
CJUE, 19 juillet 2012 ebookers.com Deutschland Gmbh n° C-112/11
Références
■ Article 23 du règlement n°1008/2008 (24 septembre 2008) établissant des règles communes pour l'exploitation de services aériens dans la Communauté
« Les tarifs des passagers et les tarifs de fret offerts au public mentionnent les conditions applicables lorsqu’ils sont proposés ou publiés sous quelque forme que ce soit, y compris sur Internet, pour les services aériens au départ d’un aéroport situé sur le territoire d’un État membre auquel le traité s’applique. Le prix définitif à payer est précisé à tout moment et inclut le tarif des passagers ou le tarif de fret applicable ainsi que l’ensemble des taxes, des redevances, des suppléments et des droits applicables inévitables et prévisibles à la date de publication. Outre l’indication du prix définitif, les éléments suivants au moins sont précisés:
a) tarif des passagers ou tarif de fret;
b) taxes;
c) redevances aéroportuaires; et
d) autres redevances, suppléments ou droits, tels que ceux liés à la sûreté ou au carburant;
Lorsque les éléments énumérés aux points b), c) et d) ont été ajoutés au tarif des passagers ou au tarif de fret. Les suppléments de prix optionnels sont communiqués de façon claire, transparente et non équivoque au début de toute procédure de réservation et leur acceptation par le client résulte d’une démarche explicite. »
■ Civ. 25 mai 1870, Bull. civ. n°133.
■ Com. 15 mars 2011, n° 10-16.422.
Procédure permettant aux juridictions des États membres, dans le cadre d'un litige dont elles sont saisies, d'interroger la Cour sur l'interprétation du droit de l’Union ou sur la validité d'un acte de l’Union. La Cour ne tranche pas le litige national. Il appartient à la juridiction nationale de résoudre l'affaire conformément à la décision de la Cour. Cette décision lie, de la même manière, les autres juridictions nationales qui seraient saisies d’un problème similaire. (CJUE, Communiqué de presse n°105/12).
Source : http://curia.europa.eu/jcms/upload/docs/application/pdf/2012-07/cp120105fr.pdf
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