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Droit des obligations
Le courtage matrimonial peut constituer une pratique commerciale trompeuse
Mots-clefs : Pratique commerciale trompeuse, Eléments constitutifs, Droit à l’information, Information substantielle, Droit de rétractation
L’absence d’information sur l’existence et les modalités d’exercice d’un droit de rétractation que la loi qualifie d’information substantielle et institue au profit des cocontractants d’une agence matrimoniale en leur qualité de consommateurs d’un service constitue une pratique commerciale trompeuse.
Une société de courtage matrimonial ainsi que sa gérante avaient été poursuivies devant le tribunal correctionnel pour pratiques commerciales trompeuses. Les premiers juges les avaient déclarées coupables et condamnées chacune à une amende et à payer à la partie civile une certaine somme à titre de dommages et intérêts. La cour d’appel confirma le jugement rendu en jugeant les prévenues coupables de pratiques commerciales trompeuses par omission de l’information substantielle relative au droit de rétractation au motif qu’en l’absence d’indication de prix dans les communications publicitaires, la première et seule invitation à s’engager était la communication faite lors de l’entretien au cours duquel le contrat avait été signé. Elle ajouta que les prévenues ne rapportaient pas la preuve de la délivrance d’une information claire et précise permettant au consommateur de réfléchir sereinement, après la signature du contrat à l’agence, à l’exercice éventuel de son droit de rétractation et qu’en revanche, il était démontré qu’aucun adhérent ne disposait sur ce point d’une information écrite et donc intelligible et non ambiguë au sens du texte d’incrimination. Elle en déduisit qu’eu égard aux circonstances entourant la signature de ce contrat d’adhésion, les prévenues avaient commis le délit qui leur était reproché, en toute connaissance de cause. Au soutien de leur pourvoi en cassation, les prévenues contestèrent tout d’abord la qualification retenue, une pratique commerciale trompeuse supposant l’existence d’une information (dite « communication commerciale ») qu’un contrat d’adhésion n’est pas susceptible de constituer une tromperie sur les caractéristiques essentielles du service fourni, quand les clichés et témoignages publiés sur leur site, même mensongers, sont accessoires au service fourni. Elles invoquaient également l’absence d’obligation, dans le cadre de leur activité, d’informer par écrit leurs cocontractants de l’existence et des modalités d’exercice du droit de rétractation dont ils bénéficient. Leur pourvoi est rejeté par la chambre criminelle au motif que l’information relative au droit de rétractation prévu en matière de contrat de courtage matrimonial n’avait pas été fournie de manière intelligible, sans ambiguïté ni contretemps, dans le contrat lui-même ou de toute autre manière alors qu’une telle information est légalement considérée comme substantielle dans toute communication commerciale, que celle-ci soit antérieure ou concomitante à la transaction commerciale.
Remplaçant l'ancienne incrimination de la publicité fausse, l'actuel article L. 121-1 du Code de la consommation dispose qu’une pratique commerciale est trompeuse si, compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé, elle omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ou lorsqu'elle n'indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte (C. consom., art. L. 121-1, II, dans sa rédaction issue de la L. n° 2008-3 du 3 janv. 2008, art. 39). Le texte vise de manière générale les pratiques commerciales et non plus seulement la publicité, qu’il inclut cependant en se référant au « moyen de communication utilisé ». La nouveauté essentielle tient à la notion d’information substantielle. Alors qu’au titre des communications publicitaires trompeuses, on retenait que le caractère de nature à induire en erreur devait résulter d'un silence gardé, d'une dissimulation ou d'une ambiguïté, le texte actuel précise que cette réticence doit porter sur une information essentielle. En effet, l'article 83, II de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (JO 5 août) a complété le texte de l'article L. 121-1, II du Code de la consommation relatif aux omissions constitutives de pratiques commerciales trompeuses, lequel dispose depuis, dans son premier alinéa, qu'une pratique commerciale est trompeuse si, compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé « et des circonstances qui l'entourent », expression légale expressément reprise en l’espèce par la cour d’appel et que reprend la Haute cour, elle omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ; or le second alinéa donne une liste d'informations considérées comme substantielles dans toute communication commerciale « constituant une invitation à l'achat et destinée au consommateur mentionnant le prix et les caractéristiques du bien ou du service proposé. Or l'existence d'un droit de rétractation, si ce dernier est prévu par la loi » (C. consom., art. L. 121-1, II, 5°), est intégrée à cette liste. S’agissant du courtage matrimonial, la loi du 23 juin 1989 a instauré un droit de rétractation pouvant être exercé pendant sept jours, en sorte que le pourvoi formé par les prévenues devait nécessairement être rejeté.
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