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Droit civil
Le droit de rétention est opposable au sous-acquéreur de bonne foi
Mots-clefs : Vente, Droit de rétention, Opposabilité, Sous-acquéreur, Bonne foi
Le droit de rétention est un droit réel, opposable à tous, y compris aux tiers non tenus de la dette comme le sous-acquéreur de bonne foi d'un camping-car.
Voici un arrêt qui devrait conduire les acheteurs de véhicules automobiles à être particulièrement vigilants ! Sans être inédite (v. Com. 31 mai 1994), la solution posée par la première chambre civile dans cet arrêt du 24 septembre 2009 n'en est pas moins intéressante.
En l'espèce, des acheteurs avaient acquis des camping-cars auprès d'un vendeur qui avait lui-même acheté les véhicules auprès d'un fabricant, mais sans en avoir payé le prix. Usant de son droit de rétention, le fabricant avait conservé l'intégralité des documents administratifs relatifs aux véhicules, ce qui empêchait donc les sous-acquéreurs d'utiliser leur camping-car alors même que, pour leur part, ils s'étaient acquittés du prix.
Saisis par ces derniers, les juges du fond avaient retenu un abus de droit et prononcé la remise forcée des documents. Cet arrêt d'appel est cassé au double visa de l'article 1612 du Code civil, qui fonde le droit de rétention du vendeur, et des « règles gouvernant le droit de rétention ». Dans un attendu de principe, la Haute cour affirme que « le droit de rétention est un droit réel, opposable à tous, y compris aux tiers non tenus de la dette ».
Le droit de rétention est donc opposable au sous-acquéreur de bonne foi, c'est-à-dire même lorsqu'il n'existe aucune relation contractuelle entre le détenteur et le tiers contre lequel il s'exerce, et alors même que le second n'est pas débiteur du premier et qu'il ignore tout de la situation juridique du vendeur de son propre vendeur. La solution dégagée se justifie par le fait que le droit de rétention en question est fictif ; il ne porte pas sur la chose elle-même (le véhicule) mais sur un droit sur la chose (le droit de l'utiliser), c'est-à-dire sur un bien incorporel.
La Cour estime que « le droit de rétention exercé par [le fabricant], qui pouvait légitimement prétendre au paiement du prix des véhicules, était opposable aux sous-acquéreurs, la bonne foi de ceux-ci et l'insolvabilité du [distributeur] ne pouvant faire dégénérer en abus l'exercice de ce droit ». Autrement dit, la connexité entre la créance de prix impayé et le bien retenu (concrètement le bien retenu était le bien impayé lui-même) rendait, en l'espèce, l'exercice du droit de rétention légitime, même à l'égard des tiers.
Références
■ Droit de rétention
« Droit du créancier qui a en sa détention ou possession un bien appartenant au débiteur de refuser de s’en dessaisir tant qu’il n’est pas payé. Depuis la loi no 2008-776 du 4 août 2008, celui qui bénéficie d’un gage sans dépossession peut se prévaloir d’un droit de rétention sur la chose. »
Source : Lexique des termes juridiques 2010, 17e éd., Dalloz, 2009.
■ Article 1612 du Code civil
« Le vendeur n'est pas tenu de délivrer la chose, si l'acheteur n'en paye pas le prix, et que le vendeur ne lui ait pas accordé un délai pour le paiement. »
■ Com. 31 mai 1994, Bull. civ. IV, n° 195 ; D. 1994. IR. 174
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