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Droit pénal général
Légitime défense : la proportionnalité s’apprécie à l’aune du comportement et non du résultat
Mots-clefs : Légitime défense, Fait justificatif, Proportionnalité, Riposte, Automobiliste, Accident
Les conséquences de l’acte de riposte ne peuvent être juridiquement prises en compte pour caractériser ou non le fait justificatif de légitime défense.
L'exigence de nombreuses conditions objectives permet d'affirmer la légitimité de la défense. Celle-ci ne peut être admise que si plusieurs conditions sont réunies lesquelles sont relatives à la fois à l'agression et à la riposte (V. Légitime défense, R. Bernardini, Rép. pén., avr. 2014). S’agissant de l'acte de défense, l’arrêt du 17 janvier apporte une précision concernant la proportion de la riposte avec l'agression et plus précisément sur la proportionnalité du moyen employé et le préjudice causé à l'agresseur.
Les faits à l’origine de cette décision sont d’une triste banalité. A la suite d'un accident matériel de la circulation survenu sur le boulevard périphérique parisien, l'un des conducteurs est sorti de son véhicule et est allé vers l'autre conducteur, l’a attrapé par le cou en le « cravatant ». Prenant peur, ce dernier ayant pris la fuite au volant de son véhicule pour se réfugier dans un chantier, puis voulant en repartir, le premier conducteur a mis le sien en travers de la voie et en est descendu pour aller l'insulter. Les deux automobilistes en étaient venus aux mains et énervés s’étaient échangés des coups. Finalement, l’un des conducteurs, courbé pour parer les coups de son adversaire, a lancé sa main en avant vers l’autre qui a ensuite chuté au sol après que sa tête heurte le capot de la voiture puis ensuite le sol. Il est demeuré paraplégique à la suite de cette chute.
En première instance, l’auteur du dommage, a été déclaré coupable du chef de violences aggravées et responsable pour moitié de leurs conséquences dommageables. La cour d’appel, analysant différemment les faits, a prononcé une relaxe, retenant la légitime défense et débouté les parties civiles de leur demande. Outre l’incertitude tenant au déroulement des faits, l’impossibilité d’établir véritablement si la victime a été touchée par le geste du mis en cause (la main lancée en avant) ou si, en tentant de l'éviter, il a été déséquilibré, les juges retiennent que « le prévenu, ayant été contraint de se défendre et de riposter pour éviter de recevoir d'autres coups, a réagi de manière proportionnée, un coup de poing contre d'autres coups de poing, face à une agression injustifiée, réelle, actuelle, les conséquences dramatiques pour la victime ne pouvant être juridiquement prises en compte ». Statuant sur le pourvoi formé, la Cour de cassation approuve le raisonnement mené, relevant l’absence de « disproportion entre l’agression et les moyens employés peu important à cet égard le résultat de l’action ».
Infirmant l’analyse selon laquelle le caractère proportionné de la défense, nécessaire à sa légitimité, doit s’apprécier non seulement au regard des moyens de défense employés mais également au regard de son résultat pour l’agresseur, la chambre criminelle admet que cette proportionnalité doit exister entre l’acte d’agression et l’acte de riposte, et non entre le premier et les conséquences de la conduite défensive. Cette position rejoint celle de la doctrine laquelle estime que, le texte se référant aux moyens employés doit être interprété comme écartant le résultat de ces moyens du champ de la comparaison en vue de mesurer la nécessité de la riposte (Desportes et le Gunehec, Droit pénal général, 16e éd., 2010, Économica, n° 733 - Pradel, Le nouveau code pénal, 2e éd., 1995, Dalloz, n° 40).
Reste à rappeler que sur le plan civil, toute responsabilité civile, quelle qu'en puisse être le fondement, se trouve exclue pour la personne qui est justifiée sur le terrain de la légitime défense (Crim. 15 juin 2000, n° 00-81.341. Crim. 13 janv. 2009, n° 08-80.888). La Cour de cassation affirme que : « la légitime défense reconnue par le juge pénal ne peut donner lieu, devant la juridiction civile, à une action en dommages-intérêts de la part de celui qui l'a rendue nécessaire » (Civ. 2e, 22 avr. 1992, n° 90-14.586).
Crim. 17 janvier 2017, n° 15-86.481
Références
■ Crim. 15 juin 2000, n° 00-81.341.
■ Crim. 13 janv. 2009, n° 08-80.888.
■ Civ. 2e, 22 avr. 1992, n° 90-14.586 P, D. 1992. 353, note J.-F. Burgelin ; RTD civ. 1992. 768, obs. P. Jourdain.
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