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Droit administratif général
Les cloches ne sonneront plus les heures à Boissettes
Mots-clefs : Sonnerie civile, Sonnerie religieuse, Horaires, Cloches, Église, Arrêté municipal, Conseil municipal, Injonction
À la suite d’un conflit entre le maire de Boissettes et des administrés habitants en face de l’église de ce petit village de Seine-et-Marne, la cour administrative d’appel de Paris a ordonné au maire de la commune de prendre un arrêté interdisant toute sonnerie civile autre que celles employées dans les cas de péril imminent exigeant des secours immédiats ou prescrits par les lois et règlements.
En 2006, des propriétaires, habitants en face de l’église de Boissettes, ont demandé au maire du village de prendre un arrêté interdisant toute sonnerie de cloches à des fins civiles, ou, à titre de compromis, de supprimer au moins les sonneries nocturnes (en effet, les cloches sonnaient toutes les heures, deux fois de suite, et toutes les demi-heures, de jour comme de nuit). Celui-ci a refusé de faire droit à leur demande et les propriétaires ont alors saisi le tribunal administratif.
Cependant, après l’introduction du recours, le conseil municipal a, en 2009, décidé de la limitation des horaires de sonneries des cloches (de 6h à 23h) et le maire a pris un arrêté fixant ces nouveaux horaires (9 juin 2010).
Entre-temps la procédure devant le tribunal administratif suivait son cours, et le 1er juillet 2010, ce dernier a annulé la décision de refus du maire d’arrêter toute sonnerie civile de cloches. Il a, par ailleurs, enjoint au maire d’abroger la réglementation de l’utilisation des cloches de l'église à des fins civiles toutes les heures et toutes les demi-heures deux fois de suite, de jour comme de nuit, à l'exception des sonneries civiles prévues par l’article 51 du décret du 16 mars 1906. La Cour administrative d’appel confirme ce jugement.
Pour décider de l’interdiction des sonneries civiles des cloches dans la commune, les juges administratifs visent la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l'État (v. not. art. 27) et son décret d’application du 16 mars 1906 (v. not. art. 51 et 52).
Il est important de distinguer les sonneries civiles (heures, annonce d’un danger…) des sonneries religieuses (offices, angélus, mariages, obsèques…) ; cet arrêt concerne uniquement les sonneries civiles et la Cour administrative d’appel se réfère à la notion d’usages locaux des sonneries civiles précisée dans un arrêt du 8 juillet 1910 (n° 36765, Lebon 565).
Ainsi, l'article 27 de la loi du 9 décembre 1905, en renvoyant à un règlement d'administration publique le soin de déterminer les conditions et les cas dans lesquels les sonneries civiles pourraient avoir lieu, a entendu maintenir aux sonneries des cloches des églises leur affectation principale au service du culte.
Les usages locaux, auxquels se réfère le règlement d'administration publique, visent exclusivement les pratiques suivies à l'entrée en vigueur de cette loi. Ainsi, le maire d’une commune doit justifier d’un usage local antérieur à la loi de 1905 pour utiliser les cloches à fins civiles.
La cour administrative d’appel précise que le maire de la commune de Boissettes ne justifie d’aucun usage local avant la loi de 1905 (v. également, CAA Lyon, 25 mars 2010, Cne de St Apollinaire).
CAA Paris, 5 nov. 2013, Cne de Boissettes, n° 10 PA04789
Références
■ CAA Lyon, 25 mars 2010, Cne de St Apollinaire, n° 08LY02748.
■ Loi du 9 décembre 1905, concernant la séparation des Églises et de l'État
« Les cérémonies, processions et autres manifestations extérieures d'un culte continueront à être réglées en conformité des articles 95 et 97 de la loi municipale du 5 avril 1884 [V. désormais. CGCT, art. L. 2212-2 s. ].
Les sonneries de cloches seront réglées par arrêté municipal, et, en cas de désaccord entre le maire et le président ou directeur de l'association cultuelle, par arrêté préfectoral.
Le décret prévu par l'article 43 de la présente loi déterminera les conditions et les cas dans lesquels les sonneries civiles pourront avoir lieu. »
■ Décret du 16 mars 1906 portant règlement d'administration publique pour l'exécution de la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Églises et de l'État en ce qui concerne l'attribution des biens, les édifices des cultes, les associations cultuelles, la police des cultes
« Les cloches des édifices servant à l'exercice public du culte peuvent être employées aux sonneries civiles dans les cas de péril commun qui exigent un prompt secours.
Si elles sont placées dans un édifice appartenant à l'État, au département ou à la commune ou attribué à l'association cultuelle en vertu des articles 4, 8 et 9 de la loi du 9 décembre 1905, elles peuvent, en outre, être utilisées dans les circonstances où cet emploi est prescrit par les dispositions des lois ou règlements, ou autorisé par les usages locaux. »
« Une clef du clocher est déposée entre les mains du président ou directeur de l'association cultuelle, une autre entre les mains du maire qui ne peut en faire usage que pour les sonneries civiles mentionnées à l'article précédent et l'entretien de l'horloge publique.
Si l'entrée du clocher n'est pas indépendante de celle de l'église, une clef de la porte de l'église est déposée entre les mains du maire. »
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