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Procédure pénale
Les générations futures sont hors de danger !
Le principe de l’interprétation stricte exclut d’assimiler une atteinte à l’environnement à la mise en danger d’autrui quand bien même cette mise en danger pourrait résulter d’une atteinte à l’environnement. Une association, personne morale, ne peut pas arguer d’un préjudice personnel directement causé par le délit de mise en danger d’autrui.
L’association générations futures dépose une plainte simple visant les carences des pouvoirs publics dans les actions susceptibles d’être menées pour lutter contre l’exposition de la population aux polluants atmosphériques pour mise en danger d’autrui. La plainte ayant été classée sans suite, l’association dépose une plainte en se constituant partie civile. Le juge d’instruction rend une ordonnance de refus d’informer dont l’association relève appel.
La cour d’appel confirme l’ordonnance de refus d’informer selon le motif d’une part, que l’association n’est pas habilitée à se constituer partie civile en vertu du principe de l’interprétation stricte et d’autre part, que la mise en danger ne saurait s’appliquer à une atteinte à l’environnement. Plus exactement la cour d’appel relève que la faculté pour les associations agréées de se constituer parties civiles devant les juridictions répressives est un droit exceptionnel et que les dispositions légales qui accompagnent cette faculté sont d’interprétation strictes. Dès lors, elle relève que l’article L. 142-2 du Code de l’environnement qui prévoit cette possibilité pour les associations pour la défense de l’environnement ne s’applique que si l’infraction dénoncée relève de la liste des infractions visées par l’article en question et tel ne serait pas le cas de l’infraction de mise en danger. La cour d’appel ajoute en outre que cette infraction ne saurait être considérée comme une atteinte directe à l’environnement mais peut résulter d’une atteinte à l’environnement. L’atteinte à l’environnement telle qu’elle résulte des dispositions de l’article L. 142-2 du Code de l’environnement protège le cadre de vie, la nature et l’environnement tandis que le délit de mise en danger résulte d’une potentielle atteinte aux personnes. La ratio legis est alors la protection des êtres humains de telle sorte que l’association ne saurait se constituer partie civile sur le fondement du délit de mise en danger qui ne vise pas la protection de l’environnement. Plus classiquement, la cour d’appel souligne avec constance les limites posées par les articles 2 et 3 du Code de procédure pénale qui encadrent l’exercice de l’action civile des associations devant les juridictions répressives. Aussi l’action civile appartient-elle à ceux qui ont personnellement souffert du dommage causé par l’infraction. Partant, la cour d’appel considère que le délit de mise en danger qui consiste dans le fait d’exposer autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ne saurait être de nature à causer un préjudice personnel à l’association, personne morale, qui ne peut souffrir du risque d’exposition d’atteinte à l’intégrité physique.
Au soutien de son pourvoi, l’association fait grief à la chambre de l’instruction de n’avoir pas assimilé l’atteinte à l’environnement à une mise en danger alors même que de l’atteinte à l’environnement peut résulter une mise en danger. Ce reproche se fonde sur une lecture de la cour qui considère que l’article L. 142-2 du Code de l’environnement protège le cadre de vie tandis que l’infraction de mise en danger vise la protection des êtres humains appelés à vivre dans le dit-cadre. Aussi, « en retenant, […] que la mise en danger ne peut être assimilée à l’atteinte à l’environnement, lorsque ce délit implique, pour assurer la protection de la vie et de l’intégrité d’autrui, de veiller à ce qu’aucune atteinte ne soit portée à son cadre de vie », la cour n’aurait pas tiré les conséquences de ses propres constatations. L’association reproche également à l’arrêt de déclarer irrecevable sa constitution de partie civile. Elle considère qu’en vertu de l’article 2, alinéa premier du Code de procédure pénale, une association ne bénéficiant pas d’habilitation légale est susceptible de se constituer partie civile dès lors qu’elle peut arguer d’un préjudice personnel résultant directement de l’infraction. En retenant que la qualité de personne morale exclut l’association du champ d’application de l’infraction de mise en danger, la cour d’appel aurait procédé à une distinction entre les personnes morales et les personnes physiques à laquelle ne procède pas l’article 223-1 du Code pénal. En outre, l’association ajoute qu’une association est recevable à se constituer partie civile si l’infraction est susceptible de porter atteinte aux intérêts collectifs qu’elle a conformément à son objet pour mission de défendre. Elle considère à ce titre qu’ayant pour objet la défense de la santé publique en lien avec les nuisances environnementales, elle avait subi un préjudice direct et personnel découlant de ce délit, en lien avec les intérêts collectifs défendus au titre de son objet.
La Cour de cassation rejette les deux moyens du pourvoi. Elle confirme ce faisant la lecture stricte croisée des articles 2 et 3 du Code de procédure pénale et de l’article L. 142-2 du Code de l’environnement, confiant par là même également la pertinence de l’impossible assimilation de l’atteinte à l’environnement à la mise en danger. Par ailleurs, elle confirme l’analyse selon laquelle une association ne peut se prévaloir d’un préjudice direct et personnel qui résulterait du délit de mise en danger d’autrui.
Crim. 8 sept. 2020, n° 19-85.004
Référence
■ M. Redon, Rép. pén. Dalloz, V° Flore sauvage, avr. 2018, spéc., n° 42 s.
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