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Droit des régimes matrimoniaux
Les modalités du changement de loi applicable au régime matrimonial
Mots-clefs : Régime matrimonial ; Changement de loi applicable, Exigences de forme
La volonté non équivoque des époux de changer de loi applicable, ne peut ressortir d’un acte notarié poursuivant un autre objet.
Un couple se marie en Algérie en 1962, sans établir de contrat de mariage et donc sans désigner la loi applicable à leur régime matrimonial. Ils s’installent en France en 1995 et ont acquis la nationalité française. Suite au prononcé de leur divorce, ils se sont opposés sur la loi applicable à leur régime matrimonial. Plus précisément il s’agissait de déterminer la valeur juridique d’une déclaration stipulant l’application de la loi française à leur régime matrimonial, contenu dans deux actes notariés (l’un concernant l’achat d’un bien immobilier, l’autre une donation).
Pour rappel la Convention de La Haye de 1978 sur la loi applicable aux régimes matrimoniaux permet aux époux, au cours du mariage, de soumettre leur régime matrimonial à une loi interne autre que celle jusqu’alors applicable. L’article 11 de cette même convention exigeant que cette désignation fasse l’objet d’une stipulation expresse.
En l’espèce, la Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel, estimant que la déclaration mentionnée dans des actes notariés poursuivant un autre objet, ne traduisait pas la volonté non équivoque des époux de soumettre leur régime matrimonial à une loi interne autre que celle le régissant jusqu’alors et ne pouvait constituer une stipulation expresse portant désignation de la loi applicable.
Ainsi la Haute juridiction interprète strictement l’exigence de l’article 11, et requiert pour la satisfaire, un acte qui ne poursuive pas un autre objet que la simple désignation de la loi applicable au régime matrimonial. Les juges de la Cour de cassation souhaitent de cette manière répondre à l’impératif de sécurité juridique et de prévisibilité pour les époux, dont le consentement doit être constaté de manière non équivoque.
Cette exigence de forme imposée par la Cour de cassation applicable à la Convention de La Haye de 1978, semble répondre à l’impératif d’une convention spécifique exigée par l’article 22 du nouveau règlement européen du 24 juin 2016 en matière de régimes matrimoniaux. En effet ce règlement applicable aux époux mariés à partir du 29 janvier 2019 exige une « convention sur le choix de loi applicable », quand l’article 11 de la Convention de La Haye semblait solliciter une simple « stipulation expresse ». La Cour de cassation a peut être ici, fait une application anticipée de cette exigence de forme imposée par le nouveau règlement européen (Sur cette exigence de forme, V. L. Perreau-Saussine, JCP 2016, n° 42, 1116, « Le nouveau règlement européen “régimes matrimoniaux”») du moins elle répond aux impératifs de ce dernier.
Civ. 1re, 13 décembre 2017, n° 16-27.216
Références
■ Convention de La Haye du 14 mars 1978 sur la loi applicable aux régimes matrimoniaux
Article 6
« Les époux peuvent, au cours du mariage, soumettre leur régime matrimonial à une loi interne autre que celle jusqu'alors applicable.
Les époux ne peuvent désigner que l'une des lois suivantes :
1. la loi d'un État dont l'un des époux a la nationalité au moment de cette désignation ;
2. la loi de l'État sur le territoire duquel l'un des époux a sa résidence habituelle au moment de cette désignation.
La loi ainsi désignée s'applique à l'ensemble de leurs biens.
Toutefois, que les époux aient ou non procédé à la désignation prévue par les alinéas précédents ou par l'article 3, ils peuvent désigner, en ce qui concerne les immeubles ou certains d'entre eux, la loi du lieu où ces immeubles sont situés. Ils peuvent également prévoir que les immeubles qui seront acquis par la suite seront soumis à la loi du lieu de leur situation. »
Article 11
« La désignation de la loi applicable doit faire l'objet d'une stipulation expresse ou résulter indubitablement des dispositions d'un contrat de mariage. »
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