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Droit constitutionnel
Les ordonnances budgétaires
Prévu par l’article 47 de la Constitution et par la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, le vote du budget est un moment essentiel de notre régime démocratique. Il permet au Parlement, en donnant au pouvoir exécutif les moyens financiers de sa politique, de peser sur le choix de la politique à venir. Ainsi, ce vote est fondamental pour ces deux pouvoirs constitutionnels.
Pour rappel, l'Assemblée nationale, assemblée élue au suffrage direct, est celle qui doit avant tout consentir à l'impôt, elle dispose d’une priorité constitutionnelle sur le Sénat. C’est pourquoi, le projet de loi de finances (PLF) de l’année est déposé obligatoirement sur le bureau de l’Assemblée nationale, au plus tard le premier mardi d’octobre de l’année précédant celle de l’exécution du budget et, elle doit être promulguée au plus tard le 31 décembre.
Le vote de la loi de finances de l’année est ainsi encadré dans des délais constitutionnels stricts : un délai maximal de soixante-dix jours. Celui-ci se décompose de la manière suivante :
– première lecture à l’Assemblée nationale : 40 jours ;
– première lecture au Sénat : 20 jours ;
– navette parlementaire : 10 jours.
Lors de la première lecture,
- soit l’Assemblée nationale se prononce dans les quarante jours (nécessités de 3 votes : 1 sur la partie recettes, 1 sur la partie dépenses et 1 sur l'ensemble du texte) et le Sénat dispose alors, en première lecture, de vingt jours pour statuer. La Constitution n’a pas prévu de deuxième lecture pour le PLF mais à la suite du vote en première lecture par les deux assemblées, si des dispositions du texte restent en discussion, le Gouvernement convoque une commission mixte paritaire (CMP). En cas de succès de la CMP et de l’adoption d’un texte commun sur les dispositions qui restaient en discussion, celui-ci est soumis aux votes des deux assemblées. S’il est adopté, cela entraîne la fin à la navette parlementaire et l’adoption définitive du PLF. En revanche, si la CMP échoue ou si le texte est rejeté par l’une des deux assemblées, l’Assemblée nationale et le Sénat doivent procéder à une nouvelle lecture. En cas de désaccord persistant, le Gouvernement demande à l’Assemblée nationale de statuer définitivement lors d’une lecture définitive. Puis, le Conseil constitutionnel est généralement saisi de la loi de finances initiale.
- soit l'Assemblée nationale ne s'est pas prononcée dans le délai de quarante jours, elle perd alors son droit de priorité. Le projet de loi de finances, tel qu'il a été initialement présenté par le Gouvernement, éventuellement modifié par des amendements adoptés par l'Assemblée nationale et acceptés par le Gouvernement, est examiné par le Sénat qui dispose alors d'un délai de quinze jours. Reste ensuite un minimum de quinze jours pour réunir la commission mixte paritaire, et procéder aux votes (V. supra).
Si le Sénat n'a pas émis un vote en première lecture sur l'ensemble du projet de loi de finances dans le délai imparti, le Gouvernement saisit à nouveau l'Assemblée du texte soumis au Sénat, modifié, le cas échéant, par les amendements votés par le Sénat et acceptés par lui.
La sanction possible : les ordonnances budgétaires
Selon l’article 47, alinéa 3 de la Constitution, « Si le Parlement ne s'est pas prononcé dans un délai de soixante-dix jours, les dispositions du projet peuvent être mises en vigueur par ordonnance ».
Cette procédure reste une possibilité pour le Gouvernement, qui jusqu’à présent n’y a jamais eu recouru.
En effet, il a toujours obtenu le vote du PLF même quand il ne disposait au Parlement que d'une majorité relative, quitte à faire usage des dispositions de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution. Même après la censure du Gouvernement de Michel Barnier en décembre 2024, le Gouvernement de François Bayrou n’a pas mis en œuvre le PLF par ordonnance mais a préféré adopter une loi spéciale, assurant la continuité de la vie nationale et la discussion du PLF avait été reprise en janvier 2025.
Toutefois le constituant de 1958 a prévu ces ordonnances budgétaires qui permettent au Gouvernement de dessaisir le Parlement de son pouvoir financier s'il refuse de l'utiliser de manière raisonnable.
Les ordonnances prévues à l’article 47 de la Constitution, contrairement à celles prévues à l'article 38, opèrent un transfert définitif des pouvoirs du législatif vers l'exécutif, elles ne sont pas soumises à la ratification du Parlement.
Comme les ordonnances budgétaires ne sont jamais ratifiées, elles restent des actes administratifs susceptibles de recours devant le juge de l'excès de pouvoir. Toutefois les dispositions qu'elles contiennent étant pour la plupart des dispositions financières n'intéressant que les rapports entre le Gouvernement et le Parlement et ne produisant d'effet direct qu'à l'égard des agents de l'administration chargés de l'exécuter, elles ne sont pas sources de droits et d'obligations pour les administrés. Dès lors, il faudrait transposer ici les principes établis par le juge administratif (CE 28 mars 1924, Jaurou), qui exclut les lois de finances des sources de la légalité, et estimer que les particuliers n'auraient pas intérêt à agir contre ces dispositions ; ce qui signifie que les autorisations de crédit dans la partie « dépenses » du budget de l'État ne créent pas un droit pour les administrés. Seules les dispositions financières de la partie « recettes » pourraient peut-être faire l'objet d'un recours.
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