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Droit du travail - relations individuelles
Liberté d’expression du salarié
Mots-clefs : CDD, Rupture anticipée, Faute grave du salarié (non), Liberté d’expression, Rupture abusive
Ne constitue pas une faute grave justifiant la rupture anticipée du CDD, l’usage fait par le salarié de sa liberté d’expression dans la presse, discréditant son supérieur hiérarchique et s’inscrivant dans une polémique médiatique.
Un joueur de football professionnel contestant la rupture anticipée de son contrat à durée déterminée pour faute grave, saisit la juridiction prud’homale. Condamné à verser diverses sommes sur le fondement de l’article L. 1243-4 du Code du travail, l’employeur attaqua la décision ayant jugé la rupture abusive.
En vertu de l’article L. 1243-1 du Code du travail, la rupture du CDD avant son terme n’est légale que dans trois cas limitativement prévus :
– l’accord des parties ;
– la faute grave du salarié ou celle de l’employeur ;
– la force majeure.
En l’espèce, il était reproché au footballeur son attitude permanente et persistante d’opposition envers son entraîneur, son recours aux médias pour exposer publiquement son désaccord avec ce dernier et ses méthodes d’entraînement, ainsi que le dépôt d’une plainte pénale à son encontre, qui avait fait l’objet d’une large publicité.
Ces faits étaient-ils constitutifs d’une faute grave justifiant la rupture anticipée ?
De jurisprudence constante, la faute grave du salarié, dont la preuve doit être rapportée par l’employeur qui l’invoque, est soumise à l’appréciation des juges du fond et est définie comme celle qui rend impossible le maintien du lien contractuel (Soc. 13 févr. 1963).
Dans cette affaire, les juges avaient pu rappeler d’une part que, sauf mauvaise foi du joueur, le dépôt d’une plainte pénale constitue l’exercice d’un droit et ne peut être constitutif d’une faute.
Ils ont pu constater d’autre part que les propos tenus par le footballeur s’inscrivaient dans le cadre d’un lynchage médiatique qui n’avait pu être stoppé par le président du club, l’entraîneur ayant aussi critiqué et dénoncé publiquement l’incompétence du joueur. Aussi, rappelant les termes l’article L. 1121-1 du Code du travail selon lesquels la liberté d’expression dont jouit le salarié (dans l’entreprise et en dehors de celle-ci) peut être restreinte uniquement par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché, la Haute cour confirme la position des juges du fond qui avait estimé que le salarié n’avait pas abusé de sa liberté d’expression et qu’ainsi aucune faute grave ne pouvait être retenue à l’encontre du joueur.
Soc. 28 avr. 2011, n°10-30.107
Références
« La faute grave du salarié, appréciée par les tribunaux et contrôlée par la Cour de cassation, est, selon cette dernière, un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié pendant la durée du préavis. Elle permet à l’employeur de renvoyer le salarié sans préavis et sans indemnités de licenciement. »
« Au sens large, tout événement imprévisible et insurmontable empêchant le débiteur d’exécuter son obligation; la force majeure est exonératoire.
Au sens étroit, la force majeure s’oppose au cas fortuit ; elle est un événement non seulement imprévisible et insurmontable mais encore d’origine externe, absolument étranger à la personne du débiteur (force de la nature, fait du prince, fait d’un tiers).
La Cour de cassation n’exige plus la condition d’extériorité, en matière contractuelle du moins; elle admet qu’il y a force majeure lorsque le débiteur a été empêché d’exécuter par la maladie, dès lors que cet événement présentait un caractère imprévisible lors de la conclusion du contrat et était irrésistible dans son exécution. »
Source : Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
■ Code du travail
« Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché. »
« Sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave ou de force majeure. »
« La rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée qui intervient à l'initiative de l'employeur, en dehors des cas de faute grave ou de force majeure, ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat, sans préjudice de l'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L. 1243-8.
Toutefois, lorsque le contrat de travail est rompu avant l'échéance du terme en raison d'un sinistre relevant d'un cas de force majeure, le salarié a également droit à une indemnité compensatrice dont le montant est égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat. Cette indemnité est à la charge de l'employeur. »
■ Soc. 13 févr. 1963, JCP 1963. II. 13183, note Bizière.
■ E. Dockès, J. Pélissier, G. Auzero, Droit du travail, 25e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2010, n°322.
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