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[ 5 mai 2010 ] Imprimer

Droit pénal spécial

Limite au secret professionnel de l'avocat

Mots-clefs : Avocat, Secret professionnel (violation, non, sphère privée)

Les informations recueillies par un avocat à la faveur de ses liens d'amitié avec les auteurs présumés d'infractions pénales ne sont pas couvertes par le secret professionnel.

Dans un arrêt du 2 mars 2010, la chambre criminelle statue sur affaire mettant en cause des informations recueillies à titre personnel par un avocat. En l'espèce, une avocate avait recruté une collaboratrice en 2003. Des liens d'amitié se nouèrent et la première fut amenée à connaître les membres de la famille de la seconde. Les relations entre les deux avocates se dégradèrent et la première porta à la connaissance du bâtonnier de l'ordre l'existence, selon elle, d'un trafic d'œuvres d'art contrefaites auquel participait sa collaboratrice, le frère ainsi que la mère de cette dernière. Ces informations furent transmises au ministère public et une information du chef de contrefaçon, escroquerie en bande organisée, recel et association de malfaiteurs fut ouverte. Le frère de la collaboratrice, mis en examen, contesta la validité de la procédure, invoquant que celle-ci avait pour fondement une violation du secret professionnel. Sa requête fut rejetée au fond.

La question posée à la chambre criminelle était celle de la frontière du secret professionnel imposé à l'avocat. La Haute cour s'appuie ici sur les constatations des juges du fond — l'avocate a eu connaissance des éléments qu'elle relate à la faveur des liens d'amitié qui s'étaient noués avec sa collaboratrice, les faits ne pouvant être rattachés à l'exercice par celle-ci de la profession d'avocat — pour en déduire que « l'avocat n'était pas dépositaire, par son état ou par sa profession, des informations divulguées », et que la chambre de l'instruction a justifié sa décision.

En principe, l'auxiliaire de justice n'est tenu au secret qu'en ce qui concerne les informations dont il est dépositaire « par état ou par profession » (art. 226-13 du Code pénal). Ce qui signifie que l'obligation de l'avocat cesse dès lors qu'il n'est plus dans l'exercice de son activité de défense ou de conseil (v. Civ. 2e, 21 juin 1973, pour des propos tenus à une avocate, amie du ménage, par une femme en instance de divorce, considérés comme non couverts par le secret professionnel). Le secret professionnel, dont la violation est pénalement sanctionnée, protège l'idéal démocratique que constitue la possibilité offerte à toute personne d'être effectivement défendue. Il ne se justifie plus dès lors que l'avocat sort de sa sphère professionnelle.

Crim. 2 mars 2010, n° 09-88.453, F-P+F

Références

■ Collaboration

« Contrat écrit par lequel un avocat s’engage à exercer tout ou partie de son activité dans le cabinet d’un autre avocat, contre une rémunération sous la forme d’une rétrocession d’honoraires. L’avocat collaborateur demeure maître de l’argumentation qu’il développe. »

■ Bâtonnier

« Chef élu d’un barreau pour une durée de deux ans. Il préside le conseil de l’Ordre des avocats et exerce des fonctions administratives et disciplinaires. »

■ Secret professionnel

« Obligation dont le respect est sanctionné par la loi pénale, imposant à certains professionnels de taire les confidences recueillies au cours de l’exercice de leur profession.

La confidentialité des informations reçues par l’avocat dans l’exercice de ses fonctions est entendue largement par le législateur : le secret professionnel couvre les consultations adressées par un avocat à son client, les correspondances échangées entre eux ou entre l’avocat et ses confrères, les notes d’entretien et toutes les pièces du dossier (Loi no 1130 du 31 décembre 1971, art. 66-5). »

Source : Lexique des termes juridiques 2010, 17e éd., Dalloz, 2009.

■ Article 226-13 du Code pénal

« La révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. »

■ Civ. 2e, 21 juin 1973D. 1974. 16.

■ v. aussi : C. Porteron, « Le secret professionnel de l'avocat », AJ Pénal 2009. 158.

 

Auteur :S. L.

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