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[ 7 novembre 2018 ] Imprimer

Droit international privé

L’injonction « Mareva » en Common Law conciliable avec les mesures conservatoires en droit français

Contrairement à la saisie conservatoire en droit français, l’injonction Mareva, assimilée à une mesure conservatoire et provisoire, ne rend pas indisponible les biens du débiteur. Ces deux mesures, ayant alors un objet distinct, peuvent se combiner.

En l’espèce, un juge chypriote avait prononcé une injonction dite « Mareva » à l’égard de trois sociétés françaises, et au bénéfice d’une société chypriote, afin de garantir le paiement d’une créance. Cette injonction, ayant pour effet de geler tous les avoirs des sociétés françaises. Cette ordonnance a été déclarée exécutoire en France, en vertu du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000, dit « Bruxelles 1 ». Puis, par une ordonnance du juge de l’exécution français, la société chypriote a été autorisée à pratiquer diverses mesures conservatoires à l’encontre desdites sociétés françaises, pour garantir la même créance. 

Les sociétés françaises contestent en appel et, à nouveau devant la Haute juridiction, cette autorisation par le juge français de pratiquer de nouvelles mesures conservatoires sur une même créance, alors que la décision étrangère a été reconnue exécutoire en France. Les requérants, estimant que l’autorité de la chose jugée attachée à la décision étrangère reconnue applicable et exécutoire en France, s’oppose à ce qu’une nouvelle décision puisse être prononcée en France. En effet, si les conditions de l’autorité de la chose jugée (triple identité : de partie, d’objet, et de cause), prévue à l’article 1355 du Code civil, sont remplies, une nouvelle action ne peut être intentée. 

Le point litigieux dans cette affaire, a été pour les juges de la Cour de cassation, de déterminer la portée d’une injonction « Mareva », issue du Common Law, par rapport à la saisie conservatoire du droit français. 

La Haute juridiction, valide le raisonnement de la Cour d’appel, considérant que l’injonction « Mareva » n’a pas le même objet que la saisie conservatoire. En effet, elle estime que l’injonction « Mareva », a pour objet d’empêcher que le débiteur n’organise son insolvabilité, en lui interdisant de disposer de ses biens, sous peine de sanctions civiles et pénales. Ainsi, cette mesure ne rend pas indisponible les biens des débiteurs. Tandis que, la saisie conservatoire en droit français, a pour objet de garantir le recouvrement des créances en rendant les biens des débiteurs indisponibles. 

Autrement dit, l’injonction « Mareva », s’opère in personam, contrairement à la saisie conservatoire qui s’opère in rem.

Dès lors, en l’absence d’identité d’objet, l’autorité de la chose jugée des décisions chypriotes, exécutoires en France, ne s’opposait pas à d’autres mesures conservatoires portant sur les biens détenus en France par les sociétés françaises. 

Civ. 1re, 3 octobre 2018, n° 17-20.296

 

Auteur :Hugo Douard

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