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[ 30 juin 2020 ] Imprimer

Procédure pénale

L’obligation d’information du représentant d’un mineur gardé à vue, un impératif qui vise ses intérêts

N’a pas justifié sa décision la chambre de l’instruction qui ne prononce pas la nullité de la garde à vue d’un mineur pour l’irrégularité de l’information de la mesure à son représentant alors qu’il est d’une part, désigné par le mineur et d’autre part, victime présumée des faits reprochés au mineur. L’obligation d’information du représentant du mineur vise les seuls intérêts de sa défense. Il est donc impératif de rechercher un autre représentant dès lors qu’il existe un conflit de nature à ne pas garantir une procédure respectueuse des intérêts contraires en présence. 

 

M. E. a été placé en garde à vue suite à des faits de violences exercés sur M. L., éducateur du foyer auquel le mineur était confié ainsi que sur une jeune fille également placée au sein de ce foyer. Ses droits résultants de la garde à vue lui ont été notifiés et M. L. a été informé de cette mesure en qualité de personne ou service auquel est confié le mineur. M. E. est par la suite placé sous le statut de témoin assisté. Son avocat saisi la chambre de l’instruction en nullité de la garde à vue ainsi que des actes et pièces trouvant leur support dans la garde à vue. Cette requête en nullité s’appuie sur l’impératif d’information de la garde à vue des mineurs fixé par l’ordonnance du 2 février 1945. Selon l’article 4, II de l’ordonnance, il est fait obligation à l’officier de police judiciaire d’informer les parents, le tuteur, la personne ou le service auquel est confié le mineur de la mesure de garde à vue dont il fait l’objet. La requête en nullité est fondée sur l’irrégularité de l’information donnée à la personne ou au service auquel le mineur est confié. 

Pour écarter la requête en nullité de la garde à vue ainsi que des autres pièces de la procédure, la cour d’appel retient que le mineur avait lui-même désigné son éducateur en la personne de M. L., éducateur au centre départemental de l’enfance, comme responsable. Il a ainsi été avisé en sa qualité d’éducateur représentant le foyer au sein duquel le mineur était placé. Il n’y aurait pas plus d’irrégularité en ce qu’il n’est pas porté atteinte aux intérêts de la personne du mineur. En effet, les juges du fond ajoutent que si M. L. a été d’une part, entendu comme victime des faits pour lesquels le mineur a été placé en garde à vue et titulaire, d’autre part, de l’information de la mesure de garde à vue, cette circonstance n’a pas été de nature, à ce stade de la procédure, à porter atteinte aux intérêts du mineur concerné. 

Plusieurs éléments viennent au soutien du moyen du pourvoi formé par M. E. Il est d’abord avancé que la violation de l’obligation d’information prévue par l’article 4, II de l’ordonnance fait nécessairement grief au mineur dès lors qu’elle le prive d’une protection fondamentale à l’exercice de ses droits. Aussi, l’information délivrée à un éducateur présumé représenter l’enfant ayant également la qualité de victime de ce dernier serait de nature à porter atteinte aux intérêts du mineur concerné. Il est également reproché à la chambre de l’instruction de n’avoir par rechercher si le ou les responsables légaux devant être informés n’étaient pas le père ou la mère du mineur. Enfin, que si le représentant légal devant être informé se prétend victime des faits reprochés au mineur et pour lesquels il fait l’objet de la mesure, il doit être cherché à la délivrer à un autre représentant. 

La Cour de cassation reproche à la chambre de l’instruction de n’avoir pas justifié sa décision et prononce la cassation. Elle retient alors il n’appartient pas au mineur de désigner lui-même la personne responsable du foyer dans lequel il se trouve placé. Par ailleurs, elle considère que l’information relative à la garde à vue du mineur, délivrée à une personne victime présumée de ses violences n’est pas de nature à conduire une procédure respectueuse des intérêts contraires en présence. Enfin, elle ajoute que « l’irrégularité de cette information fait nécessairement grief au mineur dès lors que la formalité prévue a pour finalité de permettre à la personne désignée d’assister le mineur dans ses choix de personne gardée à vue dans le seul intérêt de sa défense ». L’information ainsi délivrée à une personne vis-à-vis de laquelle il peut subsister un doute quant à sa partialité est vidée de son sens en ce qu’elle ne répond pas à l’intérêt recherché par cet impératif. 

Crim. 17 juin 2020, n° 20-80.065

Pour aller plus loin

■ Ph. Bonfils, L. Bourgeois-Itier, V° Enfance délinquante, Rép. pén. Dalloz, oct. 2018, Actualisation avr. 2020. 

 

Auteur :Chloé Liévaux

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