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Loi JOP 2024 : protection de la santé et de l’ordre public versus droit au respect de la vie privée
Déclarée conforme partiellement à la Constitution par le Conseil constitutionnel, la loi relative aux jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de 2024 a fait l’objet de deux réserves d’interprétation concernant les analyses génétiques lors des contrôles antidopage et le traitement des algorithmes des images collectées issues de la vidéoprotection ou de drones.
Cons. const. 17 mai 2023, n° 2023-850 QPC
■ La lutte contre le dopage et le droit au respect de la vie privée
La loi JOP 2024 renforce la lutte contre le dopage (art. 5 s.). Est notamment inséré un article L. 232-12-1 dans le code du sport qui autorise le laboratoire antidopage français accrédité par l’Agence mondiale antidopage à procéder, dans certains cas, à la comparaison d’empreintes génétiques et à l’examen des caractéristiques génétiques de toute personne qui participe ou se prépare à une manifestation sportive.
Quels sont les objectifs de valeur constitutionnelle poursuivis par le législateur ?
Protéger la santé et sauvegarder l’ordre public
Le législateur a souhaité renforcer les moyens de prévenir et de rechercher les manquements aux règles relatives à la lutte contre le dopage, qui tendent à assurer la protection de la santé des sportifs ainsi que la loyauté des compétitions.
Ces objectifs de protection de la santé et de sauvegarde de l’ordre public sont ainsi mis en balance avec le droit au respect de la vie privée dont le Conseil constitutionnel précise que ce droit demande que soit observée une particulière vigilance dans l’analyse et le traitement des données génétiques d’une personne.
La personne contrôlée doit être expressément informée, préalablement au prélèvement, et en particulier au moment de son inscription à chaque compétition sportive :
- de la possibilité que les échantillons prélevés fassent l’objet d’analyses génétiques, dont la nature et les finalités lui sont alors précisées ;
- de l’éventualité d’une découverte incidente de caractéristiques génétiques pouvant être responsables d’une affection justifiant des mesures de prévention ou de soins pour elle-même ou au bénéfice de membres de sa famille potentiellement concernés et de ses conséquences, ainsi que de la possibilité de s’opposer à ce qu’une telle découverte lui soit révélée.
Le Conseil constitutionnel prononce une réserve d’interprétation selon laquelle : « Il appartiendra aux autorités administratives compétentes de s’assurer, sous le contrôle du juge, que les conditions dans lesquelles cette information est délivrée au sportif sont de nature à garantir que, en décidant de prendre part à la compétition, il consent également à ce que les échantillons prélevés puissent faire l’objet d’analyses génétiques ».
A noter que si ce dispositif avait initialement été prévu uniquement le temps des jeux Olympiques et Paralympiques et pendant leurs phases préparatoires afin de répondre aux demandes du Comité international olympique (CIO) de mise en conformité avec le Code mondial antidopage ; le législateur a finalement décidé de le rendre pérenne.
■ La sécurité, la vidéoprotection intelligente, les algorithmes et le droit au respect de la vie privée
La loi JOP (art. 10) prévoit à titre expérimental, jusqu’au 31 mars 2025, afin d’assurer la sécurité des manifestations sportives, récréatives ou culturelles particulièrement exposées à des risques, que les images collectées au moyen d’un système de vidéoprotection ou de drones peuvent faire l’objet de traitements algorithmiques afin de détecter et signaler certains événements en procédant à une analyse systématique et automatisée de ces images. L’objectif est de détecter en temps réel des comportements prédéterminés en lien avec le terrorisme ou des atteintes graves à la sécurité des personnes. Ces systèmes de caméras « augmentées » sont constitués de logiciels de traitements automatisés d’images couplés à des caméras. Ils permettent d’extraire diverses informations à partir des flux vidéo qui en sont issus.
Les caméras pourront être placées dans les lieux accueillant les manifestations sportives, récréatives ou culturelles et à leurs abords ainsi que dans les véhicules et les emprises de transport public et sur les voies les desservant.
Ces moyens techniques augmentent considérablement le nombre et la précision des informations qui peuvent en être extraites. Ainsi la mise en œuvre de tels systèmes de surveillance doit être assortie de garanties particulières de nature à sauvegarder le droit au respect de la vie privée. Le législateur a veillé à ce que le développement, la mise en œuvre et les éventuelles évolutions des traitements algorithmiques demeurent en permanence sous le contrôle et la maîtrise de personnes humaines.
L’objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l’ordre public est ici mis en balance avec le droit au respect de la vie privée protégé par l’article 2 de la Déclaration de 1789.
Les dispositions de l’article 10 de la loi JOP 2024 sont déclarées conformes à la Constitution, toutefois, elles font l’objet d’une réserve d’interprétation.
En effet, la durée de l’autorisation par le préfet de l’emploi d’un traitement algorithmique doit être proportionnée à celle de la manifestation dont il s’agit d’assurer la sécurité. Il peut suspendre l'autorisation ou y mettre fin à tout moment s'il constate que les conditions ayant justifié sa délivrance ne sont plus réunies. Ces dernières dispositions ne sauraient sans méconnaître le droit au respect de la vie privée, être interprétées autrement que comme obligeant le préfet à mettre fin immédiatement à une autorisation dont les conditions ayant justifié la délivrance ne sont plus réunies. Il convient donc d’interpréter le verbe « pouvoir » comme un devoir et non une simple possibilité.
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