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Droit constitutionnel
Loi visant à reconquérir l’économie réelle – loi « Florange » : non-conformité partielle à la Constitution
Mots-clefs : Loi, Non-conformité partielle, Droit du travail, Tribunal de commerce, Code du travail, Code de commerce, Constitution, Contrôle a priori d’une loi, Liberté d’entreprendre, Droit de propriété, Principe de nécessité et de proportionnalité des peines, Déclaration de 1789
La loi n°2014-384 du 29 mars 2014 visant à reconquérir l'économie réelle (loi sur la reprise des sites rentables) telle que publiée au Journal officiel du 1er avril est amputée de certaines dispositions jugées non conformes à la Constitution et notamment de celles concernant les sanctions prévues contre les dirigeants.
La loi n°2014-384 du 29 mars 2014 comprend trois titres :
– Titre I : Obligation de rechercher un repreneur en cas de projet de fermeture d’un établissement : art. 1er à 3 ;
– Titre II : Mesure en faveur de la reprise de l’activité par les salariés : art. 4 ;
– Titre III : Mesure en faveur de l’actionnariat de long terme : art. 5 à 11.
L’article 1er constitue le cœur de la loi. Il a pour objet de définir les obligations nouvelles pour l’entreprise de plus de 1000 salariés ou appartenant à un groupe de plus de 1000 salariés souhaitant fermer l’un de ses établissements qui aurait pour conséquence un projet de licenciement collectif. À cette fin sont insérés dans le Code du travail les articles L. 1233-57-9 à L. 1233-57-22 qui imposent notamment des mécanismes d’information du comité d’entreprise quant au projet de fermeture et à la recherche d’un repreneur. Ces nouveaux articles ont été jugés conformes à la Constitution.
L’article 1er de la loi insère également dans le Code de commerce les articles L. 771-1 à L. 773-3 relatifs à la recherche d’un repreneur concernant la saisine du tribunal de commerce, la procédure de vérification par ce tribunal et les sanctions en cas de non-respect des obligations de recherche d’un repreneur. Le Conseil constitutionnel a censuré certaines de ces dispositions.
Ainsi, certaines dispositions de la loi prévoyaient d’imposer à l’entreprise qui envisage de fermer un établissement d’accepter une « offre de reprise sérieuse ». Le tribunal de commerce aurait dû apprécier ce caractère sérieux « au regard notamment de la capacité de leur auteur à garantir la pérennité de l’activité et de l’emploi de l’établissement ». Il aurait dû examiner également l’existence d’un motif légitime de refus de cession, à savoir la mise en péril de la poursuite de l’ensemble de l’activité de l’entreprise.
Selon le Conseil constitutionnel, en permettant un refus de cession en cas d'offre de reprise sérieuse dans le seul cas où il est motivé par la « mise en péril de la poursuite de l'ensemble de l'activité de l'entreprise » cessionnaire, ces dispositions de la loi auraient eu pour effet de priver l'entreprise de sa capacité d'anticiper des difficultés économiques et de procéder à des arbitrages économiques à un autre niveau que celui de l'ensemble de l'activité de l'entreprise. Par ailleurs, ces dispositions auraient conduit le juge à substituer son appréciation à celle du chef d’entreprise, qui n’est pas en difficulté, pour des choix économiques relatifs à la conduite et au développement de cette entreprise.
Ainsi, l'obligation d'accepter une offre de reprise sérieuse en l'absence de motif légitime et la compétence confiée à la juridiction commerciale pour réprimer la violation de cette obligation font peser sur les choix économiques de l'entreprise, notamment relatifs à l'aliénation de certains biens, et sur sa gestion, des contraintes qui portent une atteinte manifestement disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi (Décis. n° 2014-692 DC, § 21) tant au droit de propriété (DDH, art. 2 et 17) qu'à la liberté d'entreprendre (DDH, art. 4) .
Par ailleurs, portent atteinte au principe de nécessité et de proportionnalité des peines (DDH, art. 8) et en conséquence, revêtent un caractère manifestement hors de proportion avec la gravité du manquement réprimé, les dispositions du code de commerce qui instituent une pénalité en cas de non-respect des obligations de recherche d’un repreneur et de consultation du comité d’entreprise pouvant atteindre vingt fois la valeur mensuelle du salaire minimum interprofessionnel de croissance par emploi supprimé dans le cadre du licenciement collectif consécutif à la fermeture de l’établissement.
Les autres dispositions de la loi « Florange » contestées devant le Conseil constitutionnel ont été déclarées conformes à la Constitution.
Cons. const. 27 mars 2014, n° 2014-692 DC
Loi n° 2014-384 du 29 mars 2014 visant à reconquérir l'économie réelle, JO 1er avr. 2014
Références
■ Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789
« Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'Homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l'oppression. »
« La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la Loi. »
« La Loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une Loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée. »
« La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité. »
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