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Libertés fondamentales - droits de l'homme
LOPPSI II, acte final
Mots-clefs : Loi, Contrôle de constitutionnalité, Réserves, Conseil constitutionnel, Contrôle d'identité, Internet, Mineurs, Peines planchers, Officier de police judiciaire, Citation, Justice
Par sa décision du 10 mars 2011, le Conseil constitutionnel a censuré treize dispositions de la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI II) votée le 8 février dernier, ayant pour objectif de lutter contre de nombreuses formes de délinquance et de criminalité.
Cette loi intervient dans différents domaines du droit pénal, de la procédure pénale, du droit des étrangers ou encore du droit public (pour un aperçu complet, v. Dalloz Actualités, 10 févr. 2011).
Concernant la justice des mineurs, les Sages ont censuré les peines minimales, prévues par un renvoi dans l'article 20-2 de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante à l'article 132-19-2 créé dans le Code pénal afin de prévoir des peines minimales en cas de violences aggravées par certaines circonstances. Il motive ainsi sa décision en précisant : « qu'en instituant le principe de peines minimales applicables à des mineurs qui n'ont jamais été condamnés pour crime ou délit, la disposition contestée méconnaît les exigences constitutionnelles en matière de justice pénale des mineurs » (cons. n° 27).
La convocation des mineurs par citation de l'officier de police judiciaire (COPJ) est également invalidée par le Conseil, qui relève que le législateur n'a pas différencié selon les âges, antécédents judiciaires et gravité des faits et que le tribunal pour enfants ne disposera pas systématiquement d'informations récentes sur la situation du mineur.
Enfin, le Conseil a invalidé la sanction du non-respect du couvre-feu des mineurs. Il s’agissait de la possibilité ouverte à l'article 43 de la LOPPSI II pour les préfets de décider de « couvre-feu » pour les mineurs, en punissant d'une peine contraventionnelle le fait pour le représentant légal du mineur de ne pas s'être assuré du respect par ce dernier de ce couvre-feu. La censure intervient au motif « qu'en permettant de punir le représentant légal à raison d'une infraction commise par le mineur, il a pour effet d'instituer, à l'encontre du représentant légal, une présomption irréfragable de culpabilité ».
Dans le droit fil de sa décision sur la garde à vue (v. Cons. Const. n° 2010-14/22, QPC du 30 juillet 2010 cons. 17) qui critiquait le trop grand nombre de personnes habilités à effectuer des contrôles d’identité, le Conseil constitutionnel déclare inconstitutionnel l'article 92 de la LOPPSI 2 qui étendait à des agents de police municipale la possibilité de procéder à des contrôles d'identité au motif « que l'article 78-2 du code de procédure pénale prévoit les cas dans lesquels les officiers de police judiciaire, les agents de police judiciaire et les fonctionnaires des services actifs de police nationale ne remplissant pas les conditions prévues pour être agents de police judiciaire peuvent procéder à des contrôles et des vérifications d'identité dans le cadre de leur mission de police judiciaire ou sur réquisition écrite du procureur de la République ; qu'en confiant également ce pouvoir aux agents de police municipale, qui, relevant des autorités communales, ne sont pas mis à la disposition des officiers de police judiciaire, l'article 92 méconnaît l'article 66 de la Constitution ». Et, pour le même motif, les Sages de la rue Montpensier soulèvent d'office l'inconstitutionnalité de l'article 91 de la loi qui accordait la qualité d'agent de police judiciaire aux membres du cadre d'emploi des directeurs de police municipale.
Cependant, le Conseil a déclaré conforme à la Constitution les dispositions permettant de restreindre administrativement et sans délai l'accès à Internet de personnes se livrant à la pédopornographie, et les peines minimales pour les adultes coupables de violences commises avec certaines circonstances aggravantes, car les juridictions gardent la latitude de prononcer une peine inférieure à ce minimum en motivant spécialement leur décision.
Il a également validé les limitations de possibilités d'aménagement de peines pour les personnes reconnues coupables d'homicide volontaire sur une personne dépositaire de l'autorité publique.
Enfin, est jugée conforme à la Constitution la rétention d'une personne par les agents contrôleurs dans les transports le temps de vérifier l'identité d'un contrevenant qui refuse de la révéler (étant précisé que l'information d'un OPJ doit intervenir « dans le plus bref délai possible »).
Cons. const. 10 mars 2011, n° 2011-625 DC
Références
« Peine privative de liberté minimale que doit prononcer une juridiction de jugement à l’encontre des délinquants récidivistes.
Cette limite au principe général d’individualisation de la sanction concerne les majeurs et les mineurs.
Pour les majeurs le législateur détermine précisément les seuils à respecter en fonction de la durée de la peine encourue tant en matière criminelle que correctionnelle pour les délits passibles d’au moins trois ans d’emprisonnement. Le juge conserve néanmoins un pouvoir de personnalisation qui varie selon qu’il s’agit d’une première ou d’une seconde récidive. Pour les crimes et les délits les plus graves (ceux passibles de 10 ans d’emprisonnement ou les violences volontaires par ex.) la multirécidive entraîne nécessairement une privation de liberté qui ne pourra être inférieure au seuil prévu que si le condamné présente des garanties exceptionnelles d’insertion ou de réinsertion.
Pour les mineurs la peine-plancher s’applique aux récidivistes de 13 à 18 ans mais en tenant compte de l’atténuation obligatoire de responsabilité dont ils bénéficient. La peine est donc en principe égale à la moitié de celle encourue par un majeur sauf dans l’hypothèse des mineurs de 16 à 18 ans pour lesquels la diminution légale de peine est écartée. Le pouvoir d’individualisation de la sanction subsiste néanmoins. Il permet non seulement de descendre en dessous des seuils prévus, sous certaines conditions, mais également de préférer à l’emprisonnement une mesure éducative, le législateur n’ayant pas exclu le principe de la primauté de l’éducation sur la répression. »
« Acte de procédure par lequel le ministère public ou la victime saisit directement la juridiction de jugement en informant le prévenu des coordonnées de l’audience. »
Sources : Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
■ Ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante.
■ Article 66 de la Constitution
« Nul ne peut être arbitrairement détenu.
L'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi. »
■ Cons. const. n° 2010-14/22 QPC, 30 juill. 2010, cons. 17.
■ « Adoption définitive de la Loppsi II », Dalloz Actualités, 10 févr. 2011, obs. C. Fleuriot et R. Grand.
Pour aller plus loin :
■ « LOPPSI II : des censures, des réserves et des validations », Dalloz Actualités, 15 mars 2011, E. Allain et S. Brondel.
■ « Loppsi II, les dispositions censurées », Forum pénal Dalloz, 14 mars 201.
■ Le texte de la loi promulguée, disponible sur Légifrance.
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