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Droit des obligations
Majeurs protégés : obligation de convocation du curateur de l’associé aux assemblées générales traitant de décisions significatives pour le patrimoine de la personne vulnérable
Si l'associé d'une société civile doit être assisté de son curateur lors du vote d'une décision mentionnée au II de la colonne 2 de l'annexe 2 du décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008, de sorte que son curateur doit être convoqué à l'assemblée générale ayant une telle question inscrite à son ordre du jour, seule la personne protégée ou son curateur peut se prévaloir, dans les conditions prévues à l'article 465 du Code civil, de la méconnaissance de cette obligation.
Com. 18 sept. 2024, n° 22-24.646 B
Tout associé a le droit de participer aux décisions collectives de la société dans laquelle il a investi (C. civ., 1844, al. 1) et doit, le cas échéant, pouvoir s’y faire représenter. Dans la plupart des cas et sans avoir à motiver sa décision, l’associé a le droit de se faire représenter à l’assemblée générale par un tiers en lui donnant mandat d’exercer ses pouvoirs. Dans d’autres cas, la représentation ne fait pas l’objet d’un choix : elle est imposée par la loi. Ainsi de certains majeurs protégés, dont la représentation est obligatoire pour exercer valablement leurs droits.
Il convient cependant de distinguer les majeurs sous sauvegarde de justice, les majeurs sous curatelle, et les majeurs sous tutelle. Les premiers conservent l’exercice de leurs droits (C. civ., art. 435), en sorte qu’ils peuvent participer seuls à l’assemblée générale et y voter sans représentation. Les seconds, curatélaires, sont en principe soumis au même régime. Une dérogation est toutefois prévue : le majeur sous curatelle doit être assisté par son curateur si la décision inscrite à l’ordre du jour a des répercussions importantes sur son patrimoine ou en cas de décisions sociales significatives, comme une modification des statuts de la société. Quant au majeur sous tutelle, il doit être représenté par son tuteur pour tous les actes d’administration et ce dernier doit, en outre, obtenir l’autorisation du juge des tutelles pour les actes de disposition.
Concernant le régime de la curatelle, la décision rapportée vient en particulier préciser les règles applicables à la convocation du curateur d’un associé d’une société civile d’exploitation agricole (SCEA) placé sous curatelle, en cas d’assemblée générale ayant une question relative à un acte de disposition à l'ordre du jour.
Après avoir rappelé l’obligation de convoquer le curateur aux assemblées générales traitant de décisions importantes pour l’associé en sa qualité de majeur protégé, la Cour de cassation souligne que si cette règle n’est pas respectée, seule la personne protégée, ou son représentant légal, peut contester la décision prise en méconnaissance de cette obligation de convocation, laquelle est donc sanctionnée par la nullité relative.
■ Obligation de convocation du curateur pour les décisions importantes
Lorsqu’un associé est sous curatelle, son curateur doit être présent aux assemblées générales pour voter les décisions importantes. Cette obligation de convocation vise à permettre que la personne sous curatelle soit assistée et conseillée par son représentant légal lors de la prise de décisions susceptibles d’impacter son patrimoine, garantissant ainsi la protection de ses intérêts.
À propos d’actes de cession de parts sociales, la Haute juridiction rappelle ici le principe selon lequel le curateur d'un associé doit obligatoirement être convoqué aux assemblées générales appelées à statuer sur des décisions ayant un impact significatif sur le contenu ou la valeur du patrimoine de la personne protégée. Il en va ainsi, notamment, d’une modification des statuts, de la vente d’un actif immobilier, de l’octroi d’un emprunt ou, plus généralement, de tout acte de disposition entrant dans le champ d’application du décret du 22 décembre 2008 relatif aux actes de gestion du patrimoine des personnes placées en curatelle ou en tutelle. Portant sur des actes de disposition, la décision en l’espèce votée en l’absence du curateur de l’associé sous curatelle l’avait donc été de manière irrégulière.
Sollicitée par la cédante et non par l’associé protégé, la nullité de l’assemblée générale n’est toutefois pas prononcée.
■ Sanction du défaut de convocation : nullité relative de l’assemblée
L'absence de convocation du curateur à une assemblée générale devant statuer sur des décisions importantes peut entraîner la nullité de cette assemblée. Relative, cette nullité ne peut toutefois être invoquée que par la personne protégée elle-même, ou par son curateur : « Si l'associé d'une société civile doit être assisté de son curateur lors du vote d'une décision mentionnée au II de la colonne 2 de l'annexe 2 du décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008 relatif aux actes de gestion du patrimoine des personnes placées en curatelle ou en tutelle, de sorte que son curateur doit être convoqué à l'assemblée générale ayant une telle question inscrite à son ordre du jour, seule la personne protégée ou son curateur peut se prévaloir, dans les conditions prévues à l'article 465 du code civil, de la méconnaissance de cette obligation. »
La violation d’une règle protectrice des intérêts du majeur protégé ne peut en effet être sanctionnée que par une nullité relative, ce qui restreint le champ des titulaires de l’action à la personne protégée et à son représentant légal. Justifiée par les intérêts propres au majeur qu’il convient de protéger, cette sanction de la nullité relative permet en pratique d’empêcher d'autres associés d’instrumentaliser cette irrégularité pour faire annuler des décisions qui ne portent pas préjudice à l'associé sous curatelle. Elle renforce ainsi la protection des intérêts de la personne protégée en lui réservant, ainsi qu'à son curateur, le droit d’agir en nullité, en même temps qu’elle préserve sa liberté de décider si l'absence de convocation de son représentant légal justifie de remettre en cause les décisions prises lors de l'assemblée.
À retenir : Le majeur placé sous curatelle peut en principe participer seul aux assemblées générales et y voter, mais l’assistance de son curateur est requise lorsque sont votées, au cours de ces assemblées, des décisions importantes pour son patrimoine. Si la nullité de l'assemblée pour défaut de convocation du curateur doit inviter à respecter scrupuleusement cette obligation, celle-ci reste toutefois réservée à la personne protégée et à son curateur.
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