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Droit des personnes
Mandat de protection future et mesure judiciaire de protection : quelle articulation ?
Mots-clefs : Personnes, Incapacités, Curatelle, Mandat de protection future, Mise à exécution, Révocation, Substitution
Le mandat de protection future prend fin par le placement de la personne protégée en curatelle qu’à la condition d’avoir été mis en exécution.
Il résulte de la combinaison des articles 483, 2°et 477, alinéa 2 du Code civil que le mandat de protection future ne peut prendre fin par le placement en curatelle de la personne protégée qu’à la condition d’avoir été préalablement mis à exécution, sauf décision contraire du juge qui ouvre la mesure. Tel est le sens de la décision rendue le 4 janvier dernier par la première chambre civile de la Cour de cassation, qui juge que l'ouverture d'une mesure de curatelle ne peut avoir pour effet de mettre fin à un mandat de protection future qui n’a pas été mis à exécution lors de l'ouverture de la curatelle, et ne peut donc être opposée à la demande de substitution d'un mandat de protection future à la mesure de curatelle.
En l’espèce, un juge des tutelles avait, par jugement du 1er juillet 2014, placé un incapable sous curatelle pour une durée de soixante mois et désigné un mandataire judiciaire à la protection des majeurs en qualité de curateur. Trois mois après ce jugement, le greffe du tribunal d'instance avait visé un mandat de protection future, établi par l'intéressé devant notaire cinq ans auparavant. Les fils de ce dernier avaient alors demandé la nullité du mandat de protection future pour s'opposer à la demande parallèlement formée par leur père de substituer le mandat de protection future à la mesure de curatelle. La cour d’appel rejeta leur demande en nullité et accueillit la demande de substitution formée par le père. Et la Cour de cassation d’approuver la cour d'appel qui, ayant constaté que le mandat de protection future n'avait pas été mis à exécution lors de l'ouverture de la curatelle, en avait à bon droit déduit que cette mesure n'avait pas eu pour effet d'y mettre fin. En outre, après avoir rappelé que la révocation du mandat de protection future peut être prononcée par le juge des tutelles, en application de l'article 483, 4°, du même code, lorsque son exécution est de nature à porter atteinte aux intérêts du mandant, la Haute juridiction écarte le moyen qui ne tendait qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine de la cour d'appel, qui avait estimé que le mandat n'était pas contraire aux intérêts de l’incapable, de sorte que la demande de révocation devait être rejetée.
Le mandat de protection future répond à une éventualité, celle de l'inaptitude du mandant, et consiste en un contrat conclu par acte notarié ou par acte sous seing privé chargeant une personne, en prévision de la nécessité éventuelle de protéger ledit mandant, et de représenter ce dernier dans le cas où il ne pourrait plus pourvoir seul à la défense de ses intérêts. L’article 483 du Code civil vise quatre cas susceptibles de mettre un terme au mandat de protection future. Les demandeurs au pourvoi avaient, pour obtenir gain de cause, tenté de combiner deux d’entre eux : l'effet révocatoire du placement de la personne protégée en curatelle, lequel est automatique selon le 2° du texte, et le prononcé de la révocation par le juge des tutelles à la demande de tout intéressé selon le 4° du même texte, pour lequel une justification spéciale s'impose afin d'établir notamment que l'exécution du mandat est de nature à porter atteinte aux intérêts du mandant.
Cependant, leur pourvoi est rejeté puisque la condition préalable à tous les cas prévus par ce texte – la mise à exécution du mandat – n’était pas en l’occurrence, satisfaite. En ce sens, la Cour de cassation affirme, par une application littérale des termes de l'article 483, 2° du Code civil, que même mis à exécution, le mandat « prend fin par le placement en curatelle de la personne protégée, sauf décision contraire du juge qui ouvre la mesure » (Civ. 1re, 12 janv. 2011, n° 09-16.519). Mais l’automaticité de la fin du mandat de protection future dès que s'ouvre une curatelle ou une tutelle, peu important que le majeur en curatelle puisse conclure un mandat de protection future avec l'assistance de son curateur (C. civ., art. 477, al. 2), est néanmoins soumise à la condition, à la date d’ouverture de la mesure de protection, d’une exécution préalable dudit mandat. Ainsi, un mandat de protection future qui n’a pas été mis à exécution lors de l’ouverture d’une curatelle ne peut pas prendre fin par l’ouverture d’une mesure judiciaire de protection, quand bien même il aurait été conclu antérieurement à l’ouverture de cette mesure. Aussi, un tel mandat, dont l’existence n’a pas été remise en cause par le placement du mandant sous curatelle, peut être substitué à cette dernière mesure dès lors qu’une telle substitution ne porte pas atteinte aux intérêts de la personne protégée.
Civ.1re, 4 janv. 2015, n°15-28.669
Références
■ Civ. 1re, 12 janv. 2011, n° 09-16.519 P; D. 2011. 1204, note D. Noguéro ; ibid. 2501, obs. J.-J. Lemouland, D. Noguéro et J.-M. Plazy ; AJ fam. 2011. 110, obs. T. Verheyde ; RTD civ. 2011. 323, obs. J. Hauser.
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