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Droit administratif général
Mesures de liquidation d’une créance : absence de caractère d’actes créateurs de droits
Mots-clefs : Acte administratif, Régime, Acte créateur de droit, Décision implicite, Retrait, Liquidation d’une créance
Les mesures qui se bornent à procéder à la liquidation de la créance née d’une décision prise antérieurement, ne sont pas créatrices de droits, juge le Conseil d’État dans un arrêt du 12 octobre dernier.
Une décision implicite liquidative d’une créance peut-elle constituer un acte créateur de droits ne pouvant être retirée ? Le Conseil d’État répond par la négative dans un arrêt de section du 12 octobre 2009. Cette solution n’était pas forcément évidente dans la mesure où le juge administratif reconnaît aux décisions administratives accordant un avantage financier, même indu, le caractère de décisions créatrices de droit, ce caractère ne s’étendant toutefois pas aux mesures qui se bornent à procéder à la simple liquidation d’une créance née d’une décision prise antérieurement (CE, Sect., 6 novembre 2002, Mme Soulier). Par ailleurs, une décision implicite accordant un avantage financier crée des droits au profit de son bénéficiaire alors même que l'administration était tenue de refuser cet avantage (CE, avis cont., 3 mai 2004, M. Fort, n° 262074).
En l’espèce, n’ayant, au 1er janvier 2003, plus qu’un enfant à charge au lieu de trois, M. Fontenille en avait informé son administration. Mais bien qu’il n’ait plus rempli les conditions pour percevoir l’indemnité pour charges militaires au taux correspondant à trois enfants à charge, son administration avait continué à lui verser cette indemnité à ce taux pendant plus de trois ans. En août 2006, s’apercevant de son erreur, l’administration a émis un titre de perception à l’encontre de M. Fontenille pour recouvrer les sommes indûment payées et ce dernier a demandé au juge l’annulation de ce titre. Il soutenait que la décision implicite prise en ne modifiant pas le montant de son indemnité était une décision créatrice de droit qui ne pouvait pas être retirée.
La Haute juridiction administrative juge au contraire que « le maintien indu du versement d’un avantage financier à un agent public, alors même que le bénéficiaire a informé l’ordonnateur qu’il ne remplit plus les conditions de l’octroi de cet avantage, n’a pas le caractère d’une décision accordant un avantage financier et constitue une simple erreur de liquidation ».
CE, sect., 12 octobre 2009, M. Fontenille, n° 310300
Références
« Les décisions implicites ou tacites résultent du silence gardé par l’Administration pendant un certain délai. Elles s’opposent aux décisions expresses ou explicites, qui représentent le mode habituel d’édiction des actes administratifs. On distingue la décision implicite de rejet de la décision implicite d’acceptation.
1. La décision implicite de rejet
L’article 21 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations dispose que “ le silence gardé pendant plus de deux mois par l’Administration sur une demande vaut décision de rejet ”, réduisant ainsi le délai qui était auparavant de quatre mois (CE 27 mars 2006, Kaci, AJDA 2006. 1212). Il consacre une règle procédurale ancienne, issue d’une loi du 17 juillet 1900, généralisée par celle du 7 juin 1956, qui vise à permettre la formation de recours contentieux dans l’hypothèse où l’Administration s’abstient de répondre, évitant ainsi des blocages liés à la règle de la décision préalable. Le même article renvoie à des décrets en Conseil d’État le soin de fixer des délais dérogeant au droit commun, lorsque la complexité ou l’urgence de la procédure le justifie. L’article 21 confère en outre au principe valeur législative, mettant ainsi un terme à une divergence fameuse entre le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État. Le premier, dans sa décision Protection des sites, avait fait de la règle selon laquelle le silence vaut rejet un principe général du droit, auquel seule la loi peut déroger. Le second considérait depuis l’arrêt Cne de Bozas du 27 février 1970, qu’un décret fixant la règle inverse n’est pas illégal.
2. La décision implicite d’acceptation
Différents textes législatifs ou réglementaires prévoient, par dérogation à la règle précédente, que le silence observé par l’Administration sur une demande d’autorisation vaut acceptation de la demande, et donc édiction d’une décision implicite positive. Ce type de décision se rencontre notamment en droit de l’urbanisme : permis tacites de construire (CE A. 1er juin 1973, min. Équipement et logement c/ Épx Roullin, Rec. 390) ou de démolir, autorisations tacites de cumul d’exploitations agricoles, de défrichement; mais aussi en droit hospitalier : autorisations tacites de création ou d’extension d’établissements sanitaires privés (CE 24 janv. 1986, Mattéi et Maymard, Rec. 12, concl. Bonichot). L’article 22 de la loi du 12 avril 2000 précitée vise à unifier ces délais dérogatoires, en prévoyant que “ le silence gardé pendant deux mois par l’autorité administrative sur une demande vaut décision d’acceptation dans les cas prévus par décrets en Conseil d’État ”. L’expiration du délai donnant naissance à une décision créatrice de droits, il a fallu adapter le régime du retrait à cette hypothèse (art. 23 loi 12 avr. 2000). De même, la motivation des décisions implicites, de rejet ou d’acceptation, présente d’évidentes difficultés. »
Source : V. Van Lang, G. Gondouin, V. Inserguet-Brisset, Dictionnaire de droit administratif, 5e éd., Sirey, coll. « Dictionnaire », 2008.
■ CE, sect., 6 novembre 2002, Mme Soulier, RFDA 2003. 225, concl. S. Austry et 240, note P. Delvolvé, AJDA 2002. 1434, chron. Donnat et Casas, AJFP 2003, n° 2, p. 20, note Fuchs.
■ CE, avis cont., 3 mai 2004, M. Fort, n° 262074, Lebon 194.
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