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Droit des régimes matrimoniaux
Nature du bien acquis par un époux pendant l'instance en divorce
Mots-clefs : Régime légal (av. L. 13 juill. 1965), Communauté de meubles et acquêts, Divorce, Assignation, Promesse unilatérale de vente, Dissolution, Présomption de communauté (non), Bien propre, Date des effets du divorce
La vente conditionnelle d’un bien a pour effet que le transfert de propriété de ce dernier n’est effectif qu’au jour de la signature de l’acte authentique d’achat. Est donc propre le bien acquis définitivement par un époux postérieurement à la date d’assignation du divorce mais antérieurement au prononcé de celui-ci, le jugement de divorce prenant effet dans les rapports entre époux en ce qui concerne leurs biens dès la date de l’assignation.
Les faits de l’espèce se sont déroulés dans les années 1960. Marié sous l’empire de l’ancien régime légal de communauté de meubles et acquêts, un homme a signé seul une promesse de vente en vue d’acquérir un appartement en cours de construction, l’acte authentique devant intervenir dans un délai de deux ans. La vente a effectivement fait l’objet d’une régularisation par acte authentique dans le délai prévu mais au cours de la période séparant l’assignation en divorce de l’acquéreur de son prononcé.
La question était donc de déterminer la nature du bien acquis : propre ou commun ?
Les juges du fond ont considéré qu’en l’espèce la promesse de vente était unilatérale car seuls les vendeurs s’étaient engagés de manière ferme et définitive envers l’époux candidat à l’acquisition ; ce dernier disposait en effet d’un droit d’option et donc de la liberté de ne pas acquérir ultérieurement, quand bien même un dépôt de garantie avait été versé.
De plus, comme le précisait l’acte de vente, les juges ont souligné que le transfert de la propriété n’avait eu lieu qu’à compter de la date de la signature de l’acte authentique, soit dans la période dite « post-communautaire » excluant ainsi la présomption de communauté qui aurait pu peser sur le bien.
Enfin, l’acquéreur n’avait apporté aucune preuve que l’acquisition avait été faite avec des deniers communs.
Aussi l’immeuble fût-il qualifié de bien propre, solution confirmée par la première chambre civile.
La nature du bien aurait donc pu être tout autre si :
– la convention n’avait pas été conditionnelle, prévoyant la levée d’une option : la confirmation de la volonté d’acquérir le bien (v. Civ. 3e, 21 nov. 1984 ; a contrario : « promesse de vente vaut vente » : art. 1589 C. civ.) ;
– et si le transfert de propriété n’était pas intervenu dans la période post-communautaire dont les effets remontent à la date de l’assignation en divorce et non à la date de son prononcé (sur les effets du divorce dans les rapports entre époux en ce qui concerne leurs biens v. application des art. 262-1 et 1442 C. civ. ; v. pour le caractère propre d’un emprunt souscrit après la date de l’assignation par une femme dont l’époux ne peut pas être appelé en garantie : Civ. 1re, 28 juin 2005).
Notons qu’il n’y avait pas eu fraude au droit du conjoint puisque le bien n’avait a priori pas été financé par des fonds communs et n’avait pas vocation à entrée dans la communauté, sauf si le divorce n’avait pu être prononcé (v. Civ. 1re, 4 juin 2007).
Civ. 1re, 1er déc. 2010, n°09-65.673
Références
« Régime matrimonial en vertu duquel tout ou partie des biens dont disposent les époux forme une masse commune et partagée entre eux ou entre l’époux survivant et les héritiers de l’autre, à la dissolution du régime. »
« Acte de procédure adressé par le demandeur au défendeur par l’intermédiaire d’un huissier de justice, pour l’inviter à comparaître devant une juridiction de l’ordre judiciaire et valant, devant le tribunal de grande instance, conclusions pour le demandeur. »
« Rupture du lien conjugal provoquant la dissolution du mariage, du vivant des deux époux, à la suite d’une décision judiciaire, rendue à la requête de l’un d’eux ou de l’un et de l’autre, dans l’un des cas prévus pas la loi.
Obligatoirement prononcé par un jugement du juge aux affaires familiales, il peut être demandé pour quatre causes : soit sur la requête conjointe des époux lorsqu’ils s’entendent sur la rupture du mariage et ses effets (divorce par consentement mutuel); soit sur acceptation de la demande de l’un des époux par l’autre ou par demande conjointe lorsqu’ils acceptent le principe de la rupture sans considération des faits à l’origine de celle-ci et laissent au juge le soin de statuer sur les conséquences du divorce (divorce accepté); soit sur demande de l’un des époux lorsque le lien conjugal est définitivement altéré par cessation de la communauté de vie entre eux ou par séparation depuis au moins deux ans à la date de l’assignation (divorce par altération définitive du lien conjugal); soit sur demande de l’un des époux lorsque des faits constitutifs d’une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune (divorce pour faute). »
■ Promesse synallagmatique de vente
« Avant-contrat par lequel une personne s’engage à vendre un bien déterminé à des conditions, notamment de prix, qui sont acceptées par le bénéficiaire. Cette promesse vaut vente, sauf si la réalisation du contrat définitif est subordonnée par la loi ou par la convention des parties, à l’accomplissement d’une formalité ou à la réalisation d’un événement. »
■ Promesse unilatérale de vente
« Contrat par lequel une personne (le promettant) s’engage à vendre un bien déterminé à des conditions déterminées, notamment de prix, à un autre (le bénéficiaire) qui dispose d’un droit d’option consistant à acheter (en levant l’option) ou non (en laissant passer le délai convenu).
L’inexécution de son engagement par le promettant ne donne lieu qu’à des dommages et intérêts, à moins que le contrat ne contienne une clause d’exécution forcée en nature.
La promesse, lorsqu’elle porte sur un immeuble, un droit immobilier, un fonds de commerce… doit être constatée par acte authentique, ou par un acte sous-seing privé enregistré dans les dix jours, à peine de nullité. »
Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
■ Code civil
Ancien article 262-1 alinéa 1er du Code civil
« Le jugement de divorce prend effet dans les rapports entre époux, en ce qui concerne leurs biens, dès la date d'assignation. »
Article 262-1
« Le jugement de divorce prend effet dans les rapports entre les époux, en ce qui concerne leurs biens :
– lorsqu'il est prononcé par consentement mutuel, à la date de l'homologation de la convention réglant l'ensemble des conséquences du divorce, à moins que celle-ci n'en dispose autrement ;
– lorsqu'il est prononcé pour acceptation du principe de la rupture du mariage, pour altération définitive du lien conjugal ou pour faute, à la date de l'ordonnance de non-conciliation.
À la demande de l'un des époux, le juge peut fixer les effets du jugement à la date à laquelle ils ont cessé de cohabiter et de collaborer. Cette demande ne peut être formée qu'à l'occasion de l'action en divorce. La jouissance du logement conjugal par un seul des époux conserve un caractère gratuit jusqu'à l'ordonnance de non-conciliation, sauf décision contraire du juge. »
« Il ne peut y avoir lieu à la continuation de la communauté, malgré toutes conventions contraires.
Les époux peuvent, l'un ou l'autre, demander, s'il y a lieu, que, dans leurs rapports mutuels, l'effet de la dissolution soit reporté à la date où ils ont cessé de cohabiter et de collaborer. »
« La promesse de vente vaut vente, lorsqu'il y a consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix.
Si cette promesse s'applique à des terrains déjà lotis ou à lotir, son acceptation et la convention qui en résultera s'établiront par le paiement d'un acompte sur le prix, quel que soit le nom donné à cet acompte, et par la prise de possession du terrain.
La date de la convention, même régularisée ultérieurement, sera celle du versement du premier acompte. »
■ Civ. 3e, 21 nov. 1984, Bull. civ. III, n°198 ; RTD civ. 1985. 591, obs. Rémy.
■ Civ. 1re, 28 juin 2005, Bull. civ. I n°279 ; D. 2005. IR. 2036.
■ Civ. 1re, 4 juin 2007, Bull. civ. I, n°221 ; D. 2008. 137 ; RTD civ. 2007. 761, obs. Hauser ; AJ fam. 2007. 358, obs. Hilt.
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