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Droit pénal général
« Non au harcèlement » scolaire
Le 18 novembre dernier, était organisée par le ministère de l’éducation nationale la septième édition de la journée éducative « Non au harcèlement » visant à sensibiliser la communauté éducative au harcèlement en milieu scolaire.
Face à l’ampleur préoccupante d’un tel fléau, le législateur, par la loi no 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance, dite « loi Blanquer », a inscrit à l’article L. 511-3-1 du Code de l’éducation la notion de droit à une scolarité sans harcèlement, ce qui peut paraître insuffisant pour ne pas dire symbolique en l’absence de mesures concrètes fortes.
Faute de délit autonome, le harcèlement scolaire est sanctionné par les dispositions de l’article 222-33-2-2 du Code pénal, relatif au harcèlement moral en général.
Il s’en évince une définition consistant pour un élève à faire subir à un autre élève ou groupe d’élèves « des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale ». Plusieurs circonstances aggravantes viennent augmenter le quantum de la peine et le montant de l’amende encourus, à savoir, à titre d’exemples, le faible âge de la victime lorsqu’elle a moins de 15 ans, sa particulière vulnérabilité due à sa maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique apparente ou connue de l’auteur ou encore l’utilisation d’un service de communication au public en ligne ou par le biais d’un support numérique ou électronique comme internet et les réseaux sociaux.
Or, force est de constater qu’en traitant le harcèlement scolaire sous le seul prisme de l’article 222-33-2-2 du Code pénal, le droit actuel s’avère lacunaire et inadapté à la réalité de ce phénomène de plus en plus intense et complexe. Pour preuve, citons deux exemples édifiants. Les dispositions actuelles renvoient à une seule hypothèse, celle du harcèlement scolaire par un autre mineur, sans prévoir pour autant l’hypothèse de la commission de tels faits par un adulte. Par ailleurs, il n’est fait état que de certaines conséquences résultant de ces actes, telles que la dégradation des conditions de vie de l’enfant ou de l’adolescent, ce qui occulte totalement les impacts graves et parfois pérennes sur le parcours scolaire de la victime, sur sa santé et sur sa vie.
Le Gouvernement, qui entend faire de la lutte contre le harcèlement scolaire une grande cause nationale, a récemment dévoilé son plan préventif d’action, le programme pHARe (« Prévenir le Harcèlement et Agir avec Respect), généralisé à toutes les académies, dans toutes les écoles et dans tous les collèges du programme. Il s’appuie sur huit piliers, à savoir : « mesurer le climat scolaire », « prévenir les phénomènes de harcèlement », « former une communauté protectrice de professionnels et de personnels pour les élèves », « intervenir efficacement sur les situations de harcèlement », « associer les parents et les partenaires et communiquer sur le programme », « mobiliser les instances de démocratie scolaire et le comité d’éducation à la santé, à la citoyenneté et à l’environnement », « suivre l’impact de ces actions » et « mettre à disposition une plateforme dédiée aux ressources ».
Mais, face à l’urgence à intervenir pour près de 700 000 victimes par an, soit 10% de l’ensemble des élèves et étudiants, selon les chiffres de l’UNICEF et du ministère de l’éducation nationale, le législateur a hâté le pas dans une proposition no 4008 de loi visant à lutter contre le harcèlement scolaire, qui a été déposée et sera examinée prochainement par l’Assemblée nationale dans le cadre d’une procédure accélérée.
Cette proposition a pour objectif clair et évident de combler un vide juridique en inscrivant dans le Code pénal le harcèlement scolaire comme délit autonome (art. 5 de la proposition) et donc d’« augmenter la prise de conscience sociétale de la gravité des faits de harcèlement scolaire ou universitaire, mais également d’harmoniser les sanctions, et donc le niveau de protection, entre les différents actes de harcèlement qui surviennent au cours des apprentissages » (exposé des motifs de la proposition). Sont également envisagés l’inscription dans le Code de l’éducation d’un « droit à la protection contre le harcèlement scolaire » (art. 1er de la proposition), l’augmentation de la prise en charge médicale des victimes (art. 3 de la proposition), un stage de responsabilisation à la vie scolaire, sorte de mesure alternative aux poursuites (art. 8 de la proposition) et la création d’un groupement d’intérêt public pour concevoir des plans de lutte globaux contre le harcèlement financé par une contribution spécifique pesant sur les grands réseaux sociaux où le harcèlement scolaire se prolonge (art. 9 de la proposition).
Il est à espérer que ces mesures permettront d’endiguer ce phénomène longtemps banalisé, minoré voire ignoré et inciteront les témoins de tels faits ou de faits proches tels que les violences scolaires (C. pén., art. 222-7 à 222-16-3) et la provocation au suicide (C. pén., art. 223-13) à les signaler au procureur de la République, comme le prévoient les dispositions de l’article 40 du Code de procédure pénale.
Enfin, la victime de harcèlement scolaire peut engager la responsabilité civile de son agresseur s’il est majeur, ou celle de ses parents s’il est mineur, pour obtenir une indemnisation sur le fondement des dispositions de l’article 1240 du Code civil. En outre, elle peut engager la responsabilité de l’État sur le fondement des dispositions de l’article L. 911-4 du Code de l’éducation si l’école est publique ou celle de la direction de l’établissement s’il s’agit d’un établissement privé.
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