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Droit de l'environnement
Objectif zéro artificialisation nette (ZAN), réalité ou utopie ?
Si l’artificialisation reste aujourd’hui encore un terme franco-français n’ayant aucune définition scientifique internationale, le mot a cependant été redéfini par la loi Climat et Résilience du 22 août 2021 (Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021).
L’artificialisation y est décrite comme « l’altération durable de tout ou partie des fonctions écologiques d’un sol, en particulier ses fonctions biologiques, hybrides, climatiques, ainsi que son potentiel agronomique par son occupation d’usage ». Evoquée dans les lois grenelles (Loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement ; Loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement), la lutte contre l’artificialisation était avant tout de limiter l’atteinte à la biodiversité. Cela passait par exemple par la réalisation de bilan de consommation par les collectivités ou encore des ouvertures de zones à urbaniser plus raisonnées. Le pari, national, d’atteindre l’absence de toute artificialisation nette des sols en 2050 a donc été lancé. L’article 191 de la loi Climat prévoit notamment la diminution par deux du rythme de l’artificialisation dans les dix années suivant la date de sa promulgation. Cet objectif ambitieux permet de s’intégrer, à une échelle mondiale, aux souhaits des Nations Unies durant la période 2021-2030, à savoir restaurer les écosystèmes et favoriser la biodiversité. L’artificialisation est désormais définie à l’article L.101-2-1 du code de l’urbanisme comme « un processus impliquant la perte d’espaces naturel, agricole ou forestier (ENAF) conduisant un changement d’usage et de structure des sols ».
Il y a deux ans déjà, Barbara Pompili, ministre de la transition écologique déclarait au conseil de défense du 27 juillet 2020 qu’« En moyenne, un département de la taille de la Drôme disparait sous le béton tous les dix ans » (Disponible sur : https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2020/07/27/conseil-de-defense-ecologique-du-27-juillet-2020). De quoi amener beaucoup de questionnement quant à cette artificialisation massive qui augmente plus vite que la croissance démographique. Ce phénomène s’explique en partie par la préférence des ménages français pour l’habitat individuel, un cadre fiscal pas toujours adapté, la périurbanisation des villes ou encore le développement du réseau de transport avec des infrastructures comptabilisant 27,8% des surfaces totales artificialisées (Julien Fosse et al., Objectif « Zéro artificialisation nette » : quels leviers pour protéger les sols ? Rapport France et Stratégie, juillet 2019). Autre facteur, le mitage des territoires avec un éparpillement diffus des habitats et de construction sur un territoire initialement rural. Le phénomène d’artificialisation prend des allures de « boule de neige » inquiétantes alors qu’il est souvent impossible ou coûteux de renaturer les terres artificialisées. Quid de la biodiversité ? L’impact de l’artificialisation sur l’écosystème ne se fait pas attendre : destruction des habitats naturels, ruptures des continuités écologiques, imperméabilité des sols impliquant une augmentation du ruissellement des eaux et des risques d’inondation. L’artificialisation engendre également un empêchement de la séquestration de CO2 via la création de trottoirs, voiries qui vient imperméabiliser davantage les sols. Cela restreint la capacité des sols à stocker du carbone et augmente les émissions de CO2. La pollution, liée à l’activité engendrée par les nouvelles zones artificielles, est également une conséquence secondaire : pollution des sols et de l’eau par des substances toxiques industrielles, pollution de l’air liée aux transports et aux activités industrielles...
Alors que faire pour atteindre cet ZAN ? Il est nécessaire d’utiliser des outils présents dans les documents d’urbanismes comme par exemple, le coefficient de biotope (le coefficient de biotope par surface définit la part de surface éco-aménagée (végétalisée ou favorable à l’écosystème) sur la surface totale d’une parcelle considérée par un projet de construction (neuve ou rénovation). Il est essentiel de contribuer au maintien de la biodiversité et de la nature en ville. Des leviers d’action doivent être entrepris autant sur l’aspect urbain, en allant reconquérir les fonctions des sols urbains souvent dégradés, que sur l’aspect rural en préservant et en allant là aussi reconquérir les fonctions des sols (agroécologie etc..). En termes de construction, des solutions peuvent s’offrir aux promoteurs, comme la reconversion du bâti existant via la réhabilitation, la surélévation d’immeubles existants ou encore la construction sur des friches (V. dans ce sens le nouvel article L. 101-2-1 introduit dans le code de l’urbanisme par la loi Climat et résilience). Cette option est d’ailleurs la solution « tendance » du moment permettant de ne pas artificialiser davantage les terres. Pour cela il faut néanmoins encore énormément « monter en compétence », en particulier dans le domaine du recyclage urbain. En fin d’année 2021, la France a enregistré 2 721 friches dont 776 localisées à Paris et sa première couronne, de quoi construire sans auto-détruire (Source : Institut Paris Région, Observatoire des friches franciliennes, étude du 27.10.2021. Disponible sur : https://www.institutparisregion.fr/amenagement-et-territoires/observatoire-des-friches franciliennes/). Cette méthode apporte une première réponse aux promoteurs pour la continuité du développement de leur activité mais soulève d’autres questions.
De la théorie à la pratique, il n’y a qu’en proposant chaque jour des démarches réalistes, avec un impact respectueux de l’environnement, favorables à la protection de la biodiversité et la maîtrise de l’artificialisation que nous pourrons tous ensemble transformer ce qui peut nous sembler utopique ce jour en une réalité dans les dix ans à venir.
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