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Droit pénal spécial
Ouverture de compte bancaire et escroquerie
Mots-clefs : Escroquerie, Mensonge, Chèques, Écrit, Manœuvre frauduleuse, Compte en banque
Constitue les manœuvres frauduleuses de l’escroquerie l’ouverture d’un compte qui a pour seul but de se faire délivrer un chéquier, destiné à créer l’apparence d’une solvabilité, permettant ainsi l’acquisition de biens avec la volonté de ne pas en payer le prix.
L’escroquerie est une des quatre principales appropriations frauduleuses du Code pénal, prévue à l’article 313-1 C. pén. Elle consiste, « soit par l'usage d'un faux nom ou d'une fausse qualité, soit par l'abus d'une qualité vraie, soit par l'emploi de manœuvres frauduleuses », à « tromper une personne physique ou morale [et] la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d'un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge ».
On la qualifie généralement de « délinquance astucieuse », car à l’inverse du vol (art. 311-1 C. pén.), elle nécessite un minimum d’organisation, matérialisée par les manœuvres frauduleuses ou le mensonge sur le nom ou la qualité, déterminante dans la remise du bien ou des fonds convoités par les escrocs.
Dans cette affaire, un individu, vraisemblablement frappé d’interdit bancaire pour des incidents de paiement antérieurs, remet à un tiers la somme de 150 euros afin que ce dernier ouvre un compte en banque. Ceci fait, les deux prévenus, munis du chéquier délivré par la banque, dépensent pour plus de 20 000 euros en achats divers, achats qu’ils ne peuvent évidemment pas régler.
En matière d’émission de chèques sans provision, la jurisprudence considère qu’ « un mensonge, même produit par écrit, ne peut constituer une manœuvre frauduleuse, […] s’il ne s’y joint aucun fait extérieur ou acte matériel, aucune mise en scène ou intervention d’un tiers destinés à donner force et crédit à l’allégation mensongère du prévenu ». Dès lors, la seule remise de chèques sans provision, non accompagnée de manœuvres ou de mensonges complémentaires, ne constitue pas une escroquerie (Crim. 1er juin 2005). Toutefois, les juges ont pu condamner pour escroquerie un individu qui avait déposé un chèque sans provision sur un compte et qui avait ensuite tenté d’obtenir le transfert d’une somme importante vers un autre compte, tout en faisant croire au banquier, par des versements d’argents simultanés, qu’il attendait des rentrées d’argents futures (Ass. plén. 18 janv. 2006).
En l’espèce, l’individu qui avait remis les fonds nécessaires à l’ouverture du compte fut condamné en appel pour escroquerie. La chambre criminelle, saisie de son pourvoi en cassation, devait dire si le fait de fournir les moyens nécessaires à l’ouverture d’un compte pouvait caractériser les manœuvres frauduleuses constitutives de l’escroquerie.
La Haute cour valide le raisonnement de la cour d’appel, car l’ouverture du compte, au nom d’un autre individu, constituait plus qu’un simple mensonge, et s’était avéré nécessaire pour l’obtention du chéquier, chéquier qui représentait un gage de solvabilité auprès des commerçants, incités de ce fait à lui remettre les biens vendus.
Crim. 1er juin 2011, n° 10-83.568, FS-P+B+R
Références
« Délit consistant dans le fait, soit par l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité, soit par l’abus d’une qualité vraie, soit par l’emploi de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d’un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge. »
Source : Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
Article 311-1
« Le vol est la soustraction frauduleuse de la chose d’autrui »
Article 313-1
« L'escroquerie est le fait, soit par l'usage d'un faux nom ou d'une fausse qualité, soit par l'abus d'une qualité vraie, soit par l'emploi de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d'un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge.
L'escroquerie est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 375 000 euros d'amende. »
■ Crim. 1er juin 2005, Bull. crim. n° 167.
■ Ass. plén. 18 janv. 2006, Bull. ass. plén., n° 636 ; AJ Pénal 2006. 84 ; D. 2006. 1950, obs. D. Père.
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