Actualité > À la une
À la une
Droit de la consommation
Pas d’action directe de l’acquéreur à l’égard de l’importateur fondée sur les dispositions du code de la consommation !
Dans une chaîne de contrats translative de propriété, les garanties attachées à un bien, objet de ventes successives, le suivent en tant qu’accessorium et permettent à un sous-acquéreur d’agir à l’encontre du fournisseur/vendeur originaire, et ce, malgré l’absence de lien contractuel entre ces deux cocontractants extrêmes. Toutefois, l’action en garantie exercée par l’acquéreur à l’encontre du vendeur originaire est celle transmise par son auteur, le vendeur intermédiaire. Si celui-ci n’a pas la qualité de consommateur, cette action ne pourra se fonder sur les articles L. 217-3 et L. 217-4 du Code de la consommation.
Dans l’arrêt commenté, un couple (les acquéreurs) fait l’acquisition d’un véhicule auprès d’un distributeur de la marque Hyundai (le vendeur intermédiaire). Lorsque des dysfonctionnements sont observés, les acquéreurs sollicitent la condamnation de l’importateur de la marque (le vendeur originaire) à les indemniser des préjudices subis sur le fondement de la garantie de conformité prévue par le code de la consommation
Alors que les premiers juges accueillent cette demande, la Cour de cassation censure leur raisonnement : « qu’en statuant ainsi, alors qu’aucune action directe n’était ouverte aux acquéreurs sur ce fondement, la juridiction de proximité a violé les textes susvisés. »
L’attendu de principe, rendu aux visas des articles L. 217-3 et L. 217-4 du Code de la consommation, est formulé en ces termes : « attendu qu’il résulte de la combinaison de ces textes que le vendeur agissant dans le cadre de son activité professionnelle ou commerciale est tenu, à l’égard de l’acheteur consommateur, de livrer un bien conforme au contrat et de répondre des défauts de conformité existant lors de la délivrance ; que, n’agissant pas lui-même en qualité de consommateur à l’égard de son propre auteur, le vendeur ne bénéficie pas d’une telle garantie et ne peut donc en transmettre les droits, ce qui exclut toute action directe de l’acteur à ce titre. ».
Ainsi, il est tout d’abord rappelé que le distributeur de la marque Hyundai (vendeur intermédiaire) agit dans le cadre de son activité professionnelle ou commerciale, ce qui exclut donc toute qualification de consommateur au sens de l’article préliminaire du code de la consommation (qui entend par consommateur, « toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole »).
Une fois cette précision rapportée, la Cour de cassation va rappeler que certes, ce vendeur professionnel est tenu, en application des articles L. 217-3 et L. 217-4 du Code de la consommation, d’une garantie légale de conformité à l’égard des acquéreurs-consommateurs. Toutefois, n’étant pas lui-même un consommateur, il ne bénéficie pas d’une telle garantie à l’égard de son propre auteur, le vendeur originaire. Dès lors, les acquéreurs qui exercent l’action directe à l’encontre de l’importateur ne peuvent en bénéficier également.
La solution s’explique par le fait que le vendeur ne peut transmettre plus de droit qu’il n’en a lui-même (pour une solution comparable : Civ. 1re, 27 janv. 1993, n° 91-11.302) : en choisissant de poursuivre l’importateur sur le fondement de cette garantie contractuelle, spécialement ouverte aux consommateurs, les acquéreurs commettent une erreur stratégique irréparable. Peut-être aurait-il été plus judicieux de fonder leurs demandes sur le droit commun (C. civ., art. 1604 s. sur l’obligation de délivrance ou C. civ., 1641 s. dans l’hypothèse d’un vice caché), encore faut-il qu’aucune clause limitative de responsabilité n’ait été prévue entre le vendeur intermédiaire et l’importateur. En tel cas, l’importateur serait en droit d’opposer aux acquéreurs les clauses issues du contrat conclu avec le distributeur, telle une clause de non-garantie (pour des exemples : Civ. 3e, 26 mai 1992, n° 90-17.703 ; Civ. 3e, 30 oct. 1991, n° 87-15.229 ou encore Com. 22 mai 2002, n° 99-11.113).
Civ. 1re, 6 juin 2018, n° 17-10.553
Références
■ Civ. 1re, 27 janv. 1993, n° 91-11.302 P: D. 1994. 238, obs. O. Tournafond ; RTD com. 1993. 709, obs. B. Bouloc.
■ Civ. 3e, 26 mai 1992, n° 90-17.703 P: RDI 1993. 515, obs. P. Malinvaud et B. Boubli ; RTD civ. 1993. 131, obs. P. Jourdain ; RTD com. 1993. 156, obs. B. Bouloc.
■ Civ. 3e, 30 oct. 1991, n° 87-15.229 P: RDI 1992. 76, obs. P. Malinvaud et B. Boubli.
■ Com. 22 mai 2002, n° 99-11.113 P: D. 2002. 2843, obs. P. Delebecque ; RTD civ. 2003. 94, obs. P. Jourdain ; RTD com. 2003. 156, obs. B. Bouloc.
Autres À la une
-
Droit de la famille
[ 5 février 2025 ]
Violences conjugales et indemnisation du préjudice moral : consécration d’une obligation positive supplémentaire au bénéfice des victimes
-
Droit de la consommation
[ 4 février 2025 ]
La finalité professionnelle d’un compte courant se détermine à la date de son ouverture
-
Droit de la responsabilité civile
[ 3 février 2025 ]
Conventions réglementées et fautes de gestion : les deux régimes de responsabilité du gérant de société sont cumulatifs
-
Droit de la responsabilité civile
[ 31 janvier 2025 ]
Tableau récapitulatif des préjudices résultant du dommage corporel
-
Introduction au droit
[ 30 janvier 2025 ]
Annulation d’une location financière : le refus judiciaire d’évaluer le montant de l’indemnité d’occupation faute de preuve suffisante constitue un déni de justice
- >> Toutes les actualités À la une