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Procédure pénale
Permis de communiquer et garantie des droits de la défense de la personne faisant l’objet d’une incarcération provisoire
Le 7 janvier dernier, la chambre criminelle rendait un arrêt dans lequel elle réaffirmait le caractère fondamental du principe de la libre communication entre la personne mise en examen et son avocat vis-à-vis des droits de la défense.
En l’espèce, le requérant avait fait l’objet d’une mise en examen dans le cadre d’une information judiciaire portant sur des faits d’assassinat en bande organisée et d’association de malfaiteurs. Lors de sa première comparution en vue de son placement en détention provisoire, ce dernier avait sollicité un délai pour préparer sa défense, ce qui avait donné lieu à un renvoi de l’affaire à une date ultérieure et à son incarcération provisoire. Ses avocats avaient par la suite demandé à ce que leur soit délivré un permis de communiquer. Or, il n’a été fait droit à cette demande qu’au lendemain du débat contradictoire différé, qui s’était tenu en leur absence. Le requérant avait alors décidé de former un appel en référé contre l’ordonnance de placement en détention provisoire mais avait été débouté de sa demande devant le juge des référés. L’affaire avait ensuite été renvoyée devant la chambre de l’instruction qui avait rejeté la demande de nullité de l’ordonnance. En effet, les juges du second degré considéraient qu’aucune atteinte n’avait été portée aux droits de la défense, en soulignant notamment le défaut de dépôt d’écriture ainsi que l’absence des avocats choisis lors du débat contradictoire.
Finalement saisie, la chambre criminelle a cassé la décision des juges du fond en retenant que l’absence de délivrance à l’avocat, en temps utile, d’un permis de communiquer avec la personne détenue, en l’absence de circonstance insurmontable, portait atteinte aux droits de la défense.
Cette solution se justifie par la nécessité que le mis en examen puisse bénéficier, au nom du respect des droits de la défense, de l’assistance de son défenseur tout au long de l’instruction et a fortiori lorsqu’il est susceptible de faire l’objet d’une décision attentatoire à la liberté individuelle. C’est précisément dans cet optique que l’article 145 du Code de procédure pénale lui octroie la possibilité d’obtenir un délai pour préparer sa défense, avant la tenue du débat contradictoire précédant la mise en détention provisoire. Toutefois, dès lors que ce même article prévoit également la possibilité de procéder à l’incarcération provisoire du mis en examen jusqu’à la tenue dudit débat, il est également nécessaire que ce dernier puisse préparer sa défense durant le temps de cette incarcération, en communiquant avec son conseil. Or, le permis de communiquer est le support préalable à l’établissement de communications écrites et orales entre les personnes détenues et leur avocat. Pour cette raison, les juges de la chambre criminelle ont considéré que le requérant aurait dû bénéficier de l’assistance de son avocat en prévision et à l’occasion du débat contradictoire, voire même d’office, lors de la décision d’incarcération provisoire. Ce faisant, la délivrance tardive du permis de communiquer portait nécessairement atteinte aux droits de la défense.
Finalement, la chambre criminelle opte, avec cette décision, pour une conception bien plus protectrice et extensive des droits de la défense que celle des juges du fond. Elle considère en effet que l’atteinte à ces droits ne doit pas exclusivement s’apprécier au regard de la tenue du débat contradictoire, prenant ainsi le contre-pied de la chambre de l’instruction qui n’avait tiré aucune conséquence de l’absence de délivrance de permis de communiquer. Ce faisant, la solution retenue offre une parfaite illustration du caractère dual de la mission de l’avocat, chargé d’assurer la défense du mis en examen lors des interrogatoires et confrontations mais également de lui prodiguer, d’une manière plus générale, des conseils juridiques.
Crim. 7 janv. 2020, n° 19-86.465
Références
■ Fiches d’orientation Dalloz : Détention provisoire (Conditions)
■ Encyclopédie pénale – Rubrique : Détention provisoire – Christian GUÉRY – avr. 2019
■ Jurisprudence sur le permis de communiquer :
■ Crim. 12 déc. 2017, n° 17-85.757 P : D. 2018. 11 ; ibid. 1611, obs. J. Pradel ; AJ pénal 2018. 157, obs. T. Lefort
■ Crim. 9 mai 2019, n° 19-81.346
■ Crim. 20 nov. 2019, n° 19-85.934
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