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Droit pénal général
Pluralité d'entreprises et délégation unique : qui est responsable ?
Mots-clefs : Responsabilité des personnes morales, Hygiène et sécurité, Groupement de sociétés, Délégation de pouvoirs (Délégation unique), Accident du travail, Blessures involontaires
Le délégataire de pouvoirs, désigné par plusieurs sociétés d'un même groupement, qui commet une infraction engage la responsabilité pénale de la seule personne morale employeur de la victime.
Selon l'article 121-2 du Code pénal, les personnes morales sont pénalement responsables « des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants ». Comment ces conditions s'appliquent-elles dans le cadre d'un groupement de sociétés ? C'est à cette question que devait répondre la chambre criminelle dans l'arrêt du 13 octobre 2009.
En l'espèce, trois sociétés (A, B et C) attributaires d'un marché de travaux de construction d'une ligne de tramway constituées en groupement avaient délégué leurs pouvoirs en matière de sécurité à un salarié de la société A. Un salarié de la société B fut blessé sur le chantier ; le délégataire de pouvoirs et la société A furent poursuivis et condamnés pour blessures involontaires. Tous deux formèrent un pourvoi en cassation, fondé sur deux moyens distincts.
Pour sa part, le salarié invoquait une subdélégation implicite de pouvoirs aux différents responsables œuvrant sur le chantier. La Haute Cour rejette, sans surprise, cet argument, la cour d'appel ayant souligné que les documents produits par le prévenu ne révélaient pas de façon claire et sans ambiguïté une telle subdélégation et que rien ne démontrait qu'il y ait eu transfert de la compétence, de l'autorité et des moyens propres à l'accomplissement de leur mission au bénéfice des prétendus subdélégataires. Le prévenu arguait encore du fait qu'il n'était ni un organe ni un représentant de la personne morale. Cet argument est également rejeté, la Cour de cassation admettant que le préposé qui a reçu une délégation de pouvoirs est un représentant de la personne morale.
Pour s'exonérer de sa responsabilité et la reporter sur le seul employeur de la victime, la société A prétendait, de son côté, que la société B lui avait délégué ses pouvoirs en matière de sécurité. Cet argument est accueilli et justifie la cassation. La Haute Cour rappelle que « les infractions en matière d'hygiène et de sécurité des travailleurs commises par le délégataire de pouvoirs désigné par chacune des sociétés constituant un groupement d'entreprises engagent la responsabilité pénale de la seule personne morale, membre du groupement, qui est l'employeur de la victime ». En matière de sécurité, la chambre criminelle admet que plusieurs entreprises puissent déléguer leurs pouvoirs à un préposé d'une entreprise du groupement. Le préposé délégataire est alors supposé agir en qualité de représentant de toutes les entreprises du groupement et, en cas d'accident, c'est l'entreprise employeur du salarié victime qui est tenue pour responsable.
Crim. 13 oct. 2009
Références
« Les personnes morales, à l'exclusion de l'État, sont responsables pénalement, selon les distinctions des articles 121-4 à 121-7, des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants.
Toutefois, les collectivités territoriales et leurs groupements ne sont responsables pénalement que des infractions commises dans l'exercice d'activités susceptibles de faire l'objet de conventions de délégation de service public.
La responsabilité pénale des personnes morales n'exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits, sous réserve des dispositions du quatrième alinéa de l'article 121-3. »
■ Pour aller plus loin
X. Pin, Droit pénal général, 3e éd., Dalloz, coll. « Cours », 2009, n° 284 s.
Rép. pén. Dalloz, V° « Santé et sécurité au travail », par M. Segonds, à paraître (déc. 2009).
■ Jurisprudence
Crim. 1er déc. 1998, Bull. crim. n° 325 ; RSC 1999. 336, obs. Giudicelli-Delage.
Crim. 9 nov. 1999, Bull. crim. n° 252 ; RSC 2000. 389, obs. Mayaud.
Crim. 14 déc. 1999, Bull. crim. n° 306 ; Dr. pénal 2000. Comm. 56, obs. Véron ; RSC 2000. 600, obs. Bouloc.
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