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Droit des obligations
Point sur la convention d’assistance bénévole
La convention d’assistance bénévole est caractérisée par l’aide apportée spontanément et gratuitement par une personne à une autre. Une approche juridique de cet acte altruiste donne lieu depuis longtemps à une controverse, tant en ce qui concerne son fondement que son régime.
■ Notion. L’assistance bénévole portée à autrui donne naissance à des relations souvent qualifiées de complaisance ou de courtoisie unissant les personnes qui se rendent un service ou une aide gratuitement, donc sans contrepartie pécuniaire. Elle se traduit chez son auteur (l’assistant) par l’accomplissement d’un acte personnel, spontané et charitable. Invariablement effectué dans un but altruiste, cet acte peut en revanche recouvrir des situations très diverses : acte de sauvetage, entraide familiale ou services rendus entre voisins… Dans tous les cas, elle consiste en une aide prodiguée à autrui.
■ Problématique. Quelle qu’en soit la manifestation, l’aide apportée par l’assistant peut lui causer des dommages corporels, parfois graves, voire fatals (décès). L’assistant ayant spontanément et volontairement porté secours à autrui (qualifié d’« assisté ») doit-il se contenter de l’éventuelle reconnaissance de l’assisté et assumer seul les conséquences de son acte ? A cette question fut, à l’origine, apportée une réponse affirmative : l’assistant bénévole ayant agi de son propre chef et à ses risques et périls devait supporter les suites dommageables de son acte (C. Roy-Loustaunau, Du dommage éprouvé en prêtant assistance à autrui : méthodologie de la réparation, PUAM, 1980, p. 3). Puis le juge finit par admettre que l’équité impliquait de mettre à la charge l’assisté une obligation de réparation du préjudice subi par celui dont l’intervention avait été exclusivement motivée par un élan de générosité : l’obligation de réparer « est une sorte de contrepartie de l’acte d’assistance et puise sa justification dans le désir de ne pas laisser sans indemnisation ceux qui, par leur acte bénévole, aident autrui, s’ils subissent un dommage » (P. Jourdain, obs. ss. Civ. 1re, 27 janv. 1993, RTD civ. 1993. 584).
Encore fallait-il trouver le fondement juridique adéquat à cette obligation de réparation, le Code civil ayant toujours été muet sur cette question. Pour pallier ce vide juridique, les juges ont alors recherché pendant plus d’un siècle, parmi les techniques juridiques existantes, celle permettant d’aboutir au résultat recherché : la réparation des dommages corporels de l’assistant bénévole.
■ Recherche d’un fondement juridique
· Le recours aux règles quasi-contractuelles
En l’absence de règles spécifiques, les juges se sont d’abord appuyés sur les règles applicables aux quasi-contrats, « ces faits purement volontaires de l’homme, dont il résulte un engagement quelconque envers un tiers et quelquefois un engagement réciproque des deux parties » (C. civ., art. 1300, art. 1371 anc.). Parmi ceux-ci, l’enrichissement sans cause n’a d’abord pu être véritablement exploité en jurisprudence : quoiqu’il dérive du principe d’équité qui défend, notamment, de s’enrichir aux dépens d’autrui, l’action de in rem verso supposerait dans ce cadre, outre l’appauvrissement de l’assistant, l’enrichissement corrélatif de l’assisté. Or s’il est possible d’assimiler le préjudice de l’assistant à un appauvrissement (v. M. Douchy, « La notion de quasi-contrat en droit positif français », Économica, 1997, n° 16), il est plus délicat d’évoquer un enrichissement corrélatif du bénéficiaire de l’assistance. Par exemple, dans l’hypothèse d’un succès de sauvetage, « comment apprécier cet « enrichissement » qui consisterait, pour le défendeur, à être resté en vie » ? (R. Bout, « La convention dite d’assistance » », Études P. Kayser, t. I, PUAM, 1971, n° 11). De surcroît, un tel fondement conduirait au résultat inique de priver de toute indemnisation l’assistant dont l’intervention altruiste n’aurait pas porté ses fruits.
Comme celle de l’enrichissement injustifié, la technique de la gestion d’affaires s’est également révélée inappropriée à fonder l’obligation de réparation de l’assisté. Consistant dans le fait pour une personne, le gérant, d’entreprendre spontanément et sans en être chargé, des actes matériels ou juridiques utiles à autrui, désigné comme le maître de l’affaire, ce quasi-contrat ne peut en effet trouver à s’appliquer que lorsque l’acte d’assistance a pour objet la sauvegarde d'intérêts patrimoniaux. S’il consiste à sauvegarder la personne même de l’assisté, la gestion d’ « affaires » ne peut être retenue. En outre, contrairement aux règles applicables à ce quasi-contrat, l’assistant n’agit généralement pas à l’insu de l’intéressé ni avec l’intention de gérer les affaires d’autrui (exemple du sauveteur en mer).
Face à l’insuccès du recours aux règles quasi-contractuelles, la jurisprudence s’est engagée dans une autre direction pour fonder l’indemnisation de l’assistant en érigeant l’aide à autrui comme une institution autonome. Par pure création prétorienne, les tribunaux ont consacré l’existence d’une convention « d’assistance bénévole » (v. A. Sériaux, « L’œuvre prétorienne in vivo, l’exemple de la convention d’assistance », in Mélanges en l’honneur de Michel Cabrillac, 1999, Litec, p. 299 s.) et fait le choix de lui appliquer les règles de la responsabilité civile.
· Le recours aux règles de la responsabilité
Face à la carence des règles quasi-contractuelles, le recours aux règles de la responsabilité civile s’est imposé aux magistrats. Encore fallait-il pour eux trancher entre les deux ordres de responsabilité.
Le fondement contractuel. C’est par un arrêt de la première Chambre civile de la Cour de cassation en date du 27 mai 1959 (Civ. 1re, 27 mai 1959 ), que les juges ont pour la première fois affirmé l’existence d’« une convention d’assistance [...] impliqu(ant) pour l’assisté l’obligation de réparer les conséquences des dommages corporels subis par celui auquel il a fait appel », à propos d’un cultivateur qui avait secouru un chauffeur dont le camion s’était enlisé en bordure d’un champ et qui, à cette occasion, avait été blessé à l’œil. Par cet arrêt, l’assistance bénévole fut assimilée à un contrat justifiant d’engager, en cas de dommages corporels de l’assistant, la responsabilité contractuelle de l’assisté. Ce dernier, contractant d’occasion, uni à l’assistant par une convention de circonstance, s’est ainsi vu, non sans un certain forçage du contrat, obligé de réparer les dommages subis par l’assistant au cours de son intervention du fait de la violation de son obligation de sécurité, greffée au contrat d’assistance par les juges, intégrant cette obligation accessoire de sécurité aux « suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature », selon l’article 1135 du Code civil. Enfin, les tribunaux allèrent plus loin encore en faisant de l’assisté un véritable garant des dommages subis par l’assistant et en décidant que : « l’obligation de l’assisté découlant de la convention d’assistance a pour objet de rendre l’assistant indemne de toutes les conséquences résultant pour lui de l’exécution de la convention, y compris des fautes commises par celui qui apporte bénévolement son aide » (CA Chambéry, 3 déc. 1963).
La doctrine d’alors, tout en se montrant réservée sur la nature contractuelle d’une telle intervention faute d’une volonté clairement exprimée, s’en félicita parfois, la justifiant par l’application d’un principe simple : la fin (l’indemnisation de l’assistant) justifie les moyens (le recours à la qualification contractuelle). Demogue précisait en ce sens : « S’il paraît osé de dire qu’il y a eu entente tacite [...], si cette supposition paraît un peu divinatoire, on peut dire plus simplement : ce contrat innommé, pour répondre aux nécessités sociales solidaristes, doit garantir pleinement le sauveteur, et les juges ont le droit de l’affirmer » (R. Demogue, Traité des obligations en général, I, Sources des obligations, t. III, Paris, éd., A. Rousseau, 1923, p. 23). Toutefois, pour la doctrine majoritaire, la reconnaissance de cette nature contractuelle fut à plusieurs titres contestée.
Critiques. En premier lieu, la doctrine dénonça « le total artifice de cette construction jurisprudentielle » (R. Bout, La convention dite d’assistance, op. cit., p. 182, n° 26) qui, par souci d’équité, s’affranchissait de la conception classique du contrat. En effet, par principe, le contrat suppose un accord des parties ayant pour objet de créer des obligations et requiert, du point de vue du débiteur, le consentement de la partie qui s’oblige. Or comment établir avec certitude la volonté partagée des parties de se lier juridiquement, laquelle peut seule permettre l’exécution d’une obligation, lorsqu’une personne se contente d’accepter l’aide qu’un tiers lui propose gracieusement ? Si le caractère désintéressé de l’acte d’assistance n’est pas un obstacle à la reconnaissance d’un contrat (gratuit donc), on peut toutefois douter que dans ce cas, l’assisté accepte consciemment et par avance d’en supporter les éventuelles conséquences dommageables. Et comment pareillement matérialiser le consentement de l’assisté dans l’hypothèse où la précipitation de son acte, causée par l’urgence de la situation, rend de fait fictive son expression (Ph. Malaurie, et L. Aynès, et Ph. Stoffel-Munck, Droit civil, Les obligations, Defrénois, 2003, p. 202, n° 436, observant que « la pollicitation du sauveteur et plus encore l’acceptation de l’assisté sont souvent douteuses »). En vérité, le caractère spontané de l’aide apportée paraît incompatible avec l’engagement contractuel : « l’intention de complaisance, la courtoisie et le désintéressement qui caractérisent l’acte bénévole paraissent inconciliables avec l’engagement de se lier fermement qu’implique l’engagement contractuel » (P. Jourdain, obs. préc., p. 584). En l’absence de véritable animus contrahendi entre celui qui prête assistance et celui qui bénéficie, il ne saurait y avoir de véritable contrat. De la sorte, les juges contractualisent des actes de complaisance qui se situent en marge du droit (J. Carbonnier, Flexible droit, 7e éd., LGDJ 1992, p. 23, qui parle d’ « hypothèse de non-droit »).
Au-delà, l’existence d’un contrat naît de la rencontre de deux consentements (A l’offre doit normalement correspondre une acceptation), lesquels ne peuvent produire effet, nonobstant le principe du consensualisme, qu’à la condition que la volonté de contracter ait été déclarée, extériorisée, par le verbe ou même par un simple geste, sous réserve que cette expression de la volonté soit sans équivoque. Or bien que dans des hypothèses d’urgence ou de péril imminent, la volonté déclarée de l’assisté paraisse peu réaliste, la jurisprudence considéra néanmoins que l’offre étant faite dans l’intérêt exclusif de l’assisté, son destinataire devait être par symétrie présumé l’avoir acceptée (Civ. 1re, 1er déc. 1969; en l’espèce, le témoin d’un accident de la circulation, au cours duquel le vélomoteur accidenté prit feu, tenta d’éteindre l’incendie mais fut blessé par l’explosion du réservoir. Les juges du fond sont approuvés d’avoir reconnu l’existence d’une convention d’assistance : « la cour d’appel n’avait pas à relever le consentement exprès de l’assisté dès lors que, lorsque l’offre est faite dans son intérêt exclusif, son destinataire est présumé l’avoir acceptée). Malgré son caractère factice, la solution s’appuie toutefois sur un principe acquis en droit des contrats, selon lequel le silence ne vaut acceptation sauf lorsque l’offre a été adressée dans l’intérêt exclusif de son bénéficiaire.
Enfin, la doctrine s’étonna de la discrimination en conséquence opérée au sein des actes d’assistance bénévole. En effet, si toute forme d’aide gracieuse à autrui devait être dotée d’une nature contractuelle, pourquoi la jurisprudence s’évertuait-elle à conférer au transport bénévole un caractère délictuel, et ce, même en cas d’accord des parties sur le partage des frais de voyage ? (R. Bout, La convention dite d’assistance, op. cit., p. 157, v. spéc. p. 177, n°20 ; P. Esmein, obs. préc.).
Plus fondamentalement, la critique tirée de la création prétorienne d’« une convention feinte » (A. Sériaux, L’œuvre prétorienne in vivo : l’exemple de la convention d’assistance, op. cit., spéc. p. 303.), d’un « fantôme de contrat » (Ph. Malaurie, et L. Aynès, et Ph. Stoffel-Munck, op. cit., n° 436) fut suffisamment virulente pour que le fondement délictuel apparût alors préférable à fonder l’obligation de réparation de l’assisté.
Le fondement délictuel. Par un arrêt du 26 janvier 1994 (Civ. 2e, n° 92-14.398), la deuxième chambre civile de la Cour de cassation rattacha les actes de courtoisie au domaine de la responsabilité délictuelle. En l’espèce, un employé municipal, en dehors de ses heures de travail, entreprit d’élaguer un arbre dans la propriété d’un particulier pour lequel il agissait bénévolement. Il tomba, se blessa et demanda réparation sur le fondement de l’article 1382 du Code civil. Il obtint des juges du fond la condamnation de l’assisté à une réparation partielle, sa faute ayant contribué au dommage. Le bénéficiaire du service invoqua alors l’existence d’un contrat à l’appui de son pourvoi, qui fut rejeté au motif que « c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’interpréter la volonté des parties que la Cour d’appel a retenu qu’il ne s’était pas noué entre (les intéressés) de relations contractuelles de quelque forme que ce soit et que leur rapports relevaient d’un pur acte de courtoisie (ce dont elle) a justement déduit que la responsabilité ne pouvait être recherchée que sur le terrain délictuel ».
Cette solution reçut l’approbation de la doctrine majoritaire (P. Jourdain, obs. in RTD civ. 1994, p. 864 s.; Ph. le Tourneau, Droit de la responsabilité et des contrats, Dalloz action, 2004/2005, p. 465, n°1955 ; G. Viney obs. in Chronique, Responsabilité civile, JCP 1994, I, 3809), sensible non seulement à l’abandon de l’artifice de l’approche contractuelle, mais également à l’adoption d’un régime plus favorable à l’indemnisation de l’assistant dès lors que, dans le cadre de la responsabilité délictuelle, l’assistant bénéficiait souvent d’une présomption de responsabilité lorsque son dommage résultait de l’intervention d’une chose en mouvement entrée directement en contact avec lui (v. not. v. Civ. 1re 17 déc. 1996, n° 94-21.838 ; pour le heurt mortel par une masse hydraulique, Civ. 1re, 13 janv. 1998, n° 96-11.223).
La jurisprudence dominante en revint pourtant rapidement à son premier choix.
· Le choix de la responsabilité contractuelle
Consécration du fondement contractuel. Seule la deuxième chambre civile de la Cour de cassation continua de faire appel à la responsabilité délictuelle pour fonder le recours en indemnisation de l’assistant bénévole (Civ. 2e, 12 déc. 1994, n° 91-17.149 ; Civ. 2e, 7 mai 2002, n° 00-14.594; Civ. 2e, 11 juill. 2002, n° 00-21.346; Civ. 2e, 19 juin 2003, n° 01-12.692). En effet, postérieurement à l’arrêt de 1994 précité, les première (Civ. 1re, 10 oct. 1995, n° 93-19.142 ; Civ. 1re, 17 déc. 1996, préc. ; Civ. 1re, 16 juill. 1997, n° 95-17.880 ; Civ. 1re, 19 janv. 1999, n° 96-22.235 ; Civ. 1re, 19 mars 2002, n° 99-17.979) et troisième (Civ. 3e, 13 juill. 1999, n° 97-21.024) chambres civiles ainsi que l’ensemble des juridictions du fond, à quelques rares exceptions, poursuivirent l’analyse contractuelle de l’assistance bénévole, qui fait depuis l’objet de régulières applications par les juges, ces derniers témoignant au surplus d’une très grande rigueur dans la qualification retenue.
La qualification d’obligation de résultat. Plutôt que de concevoir l’obligation de réparer comme une obligation de moyens en la faisant dépendre d’une faute de l’assisté, la jurisprudence a opté pour une obligation de résultat : la convention d'assistance bénévole emporte nécessairement pour l'assisté l'obligation de réparer les conséquences des dommages corporels subis par celui auquel il a fait appel (Civ. 1re, 17 déc. 1996, préc.; Civ. 1re, 16 juill. 1997, préc ; Civ. 1re, 19 janv.1999, préc. ; Civ. 1re, 15 oct. 2014, n° 13-20.875 ; Civ. 1re, 11 mai 2017, n° 14-24.675). Dans cette perspective, l’assistant est indemnisé à la seule condition d’établir que son dommage a été subi au cours de l’exécution de la convention d’assistance. Cela signifie que la jurisprudence fait peser sur l’assisté une obligation plus lourde que celle incombant, dans le contrat d’entreprise, au débiteur, le plus souvent tenu d’une simple obligation de moyens de sécurité. Mais cette sévérité accrue serait justifiée par l’équité à l’origine même de cette création prétorienne : « La découverte d’une convention d’assistance n’a d’intérêt que si l’on met à la charge de l’assisté une obligation de résultat ; et quoique la Haute juridiction n’emploie pas ces termes, c’est bien de cela qu’il s’agit. [...] Le manquement à l’obligation se déduisait de la seule survenance d’un dommage corporel au cours de l’acte d’assistance » (P. Jourdain, obs. ss. Civ. 1re, 16 juill. 1997, préc. ; RTD civ. 1997. 945; v. également C. Blond, « Réflexions sur l’opportunité, pour l’assistant victime, du recours à la convention d’assistance bénévole », LPA, 14 juill. 1999, n° 139, p. 10, v. spéc. p. 15, qui précise : « Il ne serait pas choquant que l’assisté supporte une obligation de réparer de résultat car l’assistant, dans le cadre de son acte altruiste, mérite une large protection »).
Pour déterminer l’étendue du droit à indemnisation de l’assistant, il reste à s’interroger sur l’incidence de sa faute éventuelle. Doit-elle rester indifférente en raison du caractère altruiste de l’acte ou, au contraire, impliquer un partage de responsabilité conformément au droit commun ?
L’appréciation de la faute de l’assistant. Eu égard au particularisme de la situation, la jurisprudence refusait initialement d’imputer à l’assistant une quelconque faute d’imprudence, considérant parfois que l’obligation de l’assisté « a pour objet de rendre l’assistant indemne de toutes les conséquences résultant pour lui de l’exécution de la convention, y compris celle des fautes par le sauveteur » (Chambéry, 3 déc. 1963, préc.). Toutefois, en 1970 (Civ. 2e, 30 avr. 1970), la Cour de cassation décida au contraire que « Toute faute de l’assistant, quelle que soit sa gravité, décharge dans la mesure où elle a concouru à la production du dommage, l’assisté de son obligation de réparer les conséquences dudit dommage », en application des règles de droit commun de la responsabilité civile. Sans revenir sur le système de garantie consacré, il ne conviendrait pas non plus d’éluder toute responsabilité de l’assistant, lequel reste responsable de ses fautes et des choses qu’il a sous sa garde (Civ. 1re, 17 déc. 1996, préc.). Appliquant le droit commun, la Cour de cassation a depuis invariablement réaffirmé sa volonté de tenir compte du comportement de l’assistant dans la production du dommage pour exonérer partiellement l’assisté de sa responsabilité.
■ Portée
Une portée certaine. Dans une espèce récente (Civ. 1re, 5 mai 2021, n° 19-20.579), la Cour de cassation a confirmé l’arrêt qui avait jugé que les fautes respectives de l’assistant et de l’assisté commises lors d’un ménage effectué au domicile de ce dernier avaient « toutes deux concouru à la réalisation du dommage » subi par l’assistant, à hauteur respectivement de 70% pour l’assisté et de 30% pour l’assistant.
Une portée relative ? Dans cette même décision, il est remarquable d’observer que la Cour prend soin de justifier la condamnation de l’assisté, dont la responsabilité sans faute semblait être acquise, en affirmant qu’il avait « commis une faute contractuelle en donnant à (l’assistant) un ordre dont les conséquences pouvaient être dangereuses (…), sans l’accompagner d’une quelconque consigne de sécurité ». Caractérisée par la violation de son obligation de sécurité, la faute de l’assisté est soulignée. Est-ce à dire que la Haute cour consentirait enfin à ne faire peser sur l’assisté qu’une obligation de moyens ? Affaire à suivre…
Références
■ Civ. 1re, 27 mai 1959: D. 1959, p. 524, note R. Savatier ; JCP 1959, II, 11187, obs. P. Esmein ; RTD civ. 1959, p.735, obs. Mazeaud
■ CA Chambéry, 3 déc. 1963 : JCP 1964, II, 13611, note P. Esmein
■ Civ. 1re, 1er déc. 1969 P : D. 1970, jur. p. 422, note M. Puech
■ Civ. 2e, 26 janv. 1994, n° 92-14.398 : RTD civ. 1994. 864, obs. P. Jourdain
■ Civ. 1re 17 déc. 1996, n° 94-21.838 P: D. 1997. 288, obs. P. Delebecque ; RTD civ. 1997. 431, obs. P. Jourdain.
■ Civ. 1re, 13 janv. 1998, n° 96-11.223 P : D. 1998. 580, note M. Viala
■ Civ. 2e, 12 déc. 1994, n° 91-17.149
■ Civ. 2e, 7 mai 2002, n° 00-14.594 P : D. 2003. 463, obs. P Jourdain
■ Civ. 2e, 11 juill. 2002, n° 00-21.346 P : D. 2002. 3297, et les obs., note Y. Dagorne-Labbe ; RTD civ. 2002. 823, obs. P. Jourdain
■ Civ. 2e, 9 juin 2003, n° 01-12.692
■ Civ. 1re, 10 oct. 1995, n° 93-19.142 : RTD civ. 1996. 892, obs. J. Mestre
■ Civ. 1re, 16 juill. 1997, n° 95-17.880 P : D. 1998. 566, note F. Arhab ; RTD civ. 1997. 944, obs. P. Jourdain
■ Civ. 1re, 19 janv.1999, n° 96-22.235
■ Civ. 1re, 19 mars 2002, n° 99-17.979
■ Civ. 3e, 13 juill.1999, n° 97-21.024
■ Civ. 1re, 15 oct. 2014, n° 13-20.875
■ Civ. 1re, 11 mai 2017, n° 14-24.675
■ Civ. 2e, 30 avr. 1970 : RTD civ. 1971, p. 164, n° 26, obs. G. Durry
■ Civ. 1re, 5 mai 2021, n° 19-20.579 P : D. 2021. 902
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