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Libertés fondamentales - droits de l'homme
Précisions sur les obligations de l'administration à l'égard des demandeurs d'asile
Mots-clefs : Étranger, Demandeur d’asile, Droit d’asile, Référé-liberté, Atteinte grave et manifestement illégale, Accueil décent, Autorisation provisoire de séjour, Hébergement, Ressource
Constitue une atteinte grave et manifestement illégale à l'exercice du droit d'asile le fait pour l'administration de laisser au-delà d'un délai raisonnable un demandeur d'asile sans autorisation provisoire de séjour, sans hébergement et sans ressource.
Lorsqu'une première évaluation des besoins spécifiques du demandeur d'asile est requise ou que les capacités de logement normalement disponibles sont temporairement épuisées, l'autorité administrative doit assurer, pendant une période aussi courte que possible, les besoins fondamentaux du demandeur d'asile sous peine de porter une atteinte grave et manifestement illégale à l'exercice du droit d'asile. Telle est la solution dégagée par le Conseil d'État dans une ordonnance prise au titre du référé-liberté du 17 septembre 2009.
En l'espèce, une ressortissante soudanaise, arrivée en France le 8 août 2009, s'est présentée à la préfecture de l'Oise le 10 août 2009 pour solliciter son admission au séjour dans le cadre du dépôt d'une demande d'asile. Si une convocation lui a été remise afin qu'elle se représente, elle n'a pas été mise en possession d'une autorisation provisoire de séjour. Par ailleurs, ses demandes, afin d'obtenir un hébergement en urgence, n'ont pu être satisfaites et elle n'a perçu aucune allocation financière.
Confirmant cette solution, le juge des référés du Conseil d'État précise que « l'autorité compétente (...) doit (...) aussi longtemps qu'il est admis à se maintenir sur le territoire en qualité de demandeur d'asile et quelle que soit la procédure d'examen de sa demande, lui assurer, selon ses besoins et ses ressources, des conditions d'accueil comprenant le logement, la nourriture et l'habillement, fournies en nature ou sous la forme d'allocations financières ou de bons ou en combinant ces formules ; que si, notamment lorsqu'une première évaluation des besoins spécifiques du demandeur est requise ou lorsque les capacités de logement normalement disponibles sont temporairement épuisées, l'autorité administrative peut recourir à des modalités différentes de celles qui sont normalement prévues, c'est pendant une période raisonnable, aussi courte que possible, et en couvrant les besoins fondamentaux du demandeur d'asile ; qu'une privation du bénéfice de ces dispositions peut conduire le juge des référés à faire usage des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 521-2 (...) du code de justice administrative, lorsqu'elle est manifestement illégale et qu'elle comporte en outre des conséquences graves pour le demandeur d'asile ».
Ce faisant, le Conseil d'État précise sa jurisprudence selon laquelle la privation des demandeurs d'asile de conditions matérielles d'accueil décentes peut constituer une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale (CE, ord. réf., 23 mars 2009, Gaghiev), cette dernière englobant le droit constitutionnel d'asile qui a pour corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié (CE 3 mai 2004, Dogan c. Ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales). D'une part, il liste les obligations pour un accueil dans des conditions décentes du demandeur d'asile en se conformant à celles retenues par l'article 2 de la directive 2003/9/CE du 27 janvier 2003 relative à l'accueil des demandeurs d'asile. D'autre part, il indique les contraintes pour l'administration en cas de carence temporaire des capacités d'accueil.
CE, ord. réf., 17 septembre 2009, Ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire c. Mlle Salah, n° 331950.
Références
■ Directive 2003/9/CE du 27 janvier 2003 relative à l'accueil des demandeurs d'asile, JOUE L n° 31 du 6 févr. :
Article 2 : « Définitions. Aux fins de la présente directive, on entend par : (...) “conditions matérielles d'accueil” : les conditions d'accueil comprenant le logement, la nourriture et l'habillement, fournis en nature ou sous forme d'allocation financière ou de bons, ainsi qu'une allocation journalière (...) ».
■ Jurisprudences
CE, ord. réf., 23 mars 2009, Gaghiev, n° 325884, AJDA 2009. 679.
CE 3 mai 2004, Dogan c. Ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, n° 258085, D. 2004. 1711.
■ Référé-liberté
« Il constitue la véritable innovation de la loi du 30 juin 2000. Il permet au juge, saisi par tout intéressé, d’ordonner, dans un délai de 48 heures, toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne publique ou une personne privée gestionnaire d’un service public aurait porté une atteinte grave et manifestement illégale (CJA, art. L. 521-2). Le juge dispose d’un pouvoir général d’injonction complémentaire à celui des juridictions judiciaires en matière de voie de fait. Il est amené à identifier les libertés fondamentales, examiner la gravité de l’atteinte et son illégalité manifeste (…). »
■ Réfugié
« Au sens très large : toute personne qui fuit son pays pour trouver un refuge ou asile dans un autre pays. Le CESEDA ne le conçoit pas ainsi, selon son art. L. 711-1 : “ la qualité de réfugié est reconnue à toute personne persécutée en raison de son action en faveur de la liberté (cf. al. 4 du préambule de la Const. de 1946 sur le droit d’asile) ainsi qu’à toute personne sur laquelle le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés exerce son mandat aux termes des articles 6 et 7 de son statut tel qu’adopté par l’Assemblée générale des Nations unies le 14 décembre 1950 ou qui répond aux définitions de l’article 1er de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés. Ces personnes sont régies par les dispositions applicables aux réfugiés en vertu de la convention de Genève susmentionnée ”. Cette dernière définit le réfugié notamment comme toute personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut, ou du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays. Le statut du HCR n’opte pas pour une définition fondamentalement différente. »
Source : V. Van Lang, G. Gondouin, V. Inserguet-Brisset, Dictionnaire de droit administratif, 5e éd., Sirey, coll. « Dictionnaire », 2008.
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