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Droit de la santé
Précisions sur l’indemnisation des dommages imputables aux vaccinations obligatoires
Par trois arrêts rendus le 7 novembre 2024, le Conseil d’État apporte des précisions attendues sur les conditions d’engagement de la responsabilité de l’État en cas de vaccination obligatoire.
Ces trois arrêts permettent au Conseil d’État d’établir pour les juges du fonds un « mode d’emploi » sur les conditions de l’engagement de la responsabilité de l’État en cas de vaccination obligatoire. Ainsi lorsque les juges sont saisis d'un litige individuel portant sur la réparation des conséquences pour la personne concernée d'une vaccination présentant un caractère obligatoire, il leur appartient :
- dans un premier temps, non pas de rechercher si le lien de causalité entre la vaccination et l'affection présentée est ou non établi, mais de s'assurer, au vu du dernier état des connaissances scientifiques en débat devant eux, qu'il n'y a aucune probabilité qu'un tel lien existe ;
- ensuite, d’envisager deux possibilités : - soit, après cet examen, ils constatent qu’il n’existe aucune probabilité qu'un tel lien existe, ils rejettent alors la demande, - soit, dans l'hypothèse inverse, ils procèdent à l'examen des circonstances de l'espèce et retiennent alors l'existence d'un lien de causalité entre la vaccination obligatoire subie par la victime et les symptômes qu'elle a ressentis que si ceux-ci sont apparus, postérieurement à la vaccination, dans un délai normal pour ce type d'affection, ou se sont aggravés à un rythme et une ampleur qui n'étaient pas prévisibles au vu de son état de santé antérieur ou de ses antécédents et, par ailleurs, que ces symptômes ne peuvent pas être regardés comme résultant d'une autre cause que la vaccination.
■ Probabilité non nulle de l’existence d’un lien de causalité entre l’administration du vaccin obligatoire contre l’hépatite B contenant des adjuvants à base de sels d'aluminium et une myofasciite à macrophages (maladie neurologique induite par l’hydroxyde d’aluminium utilisé comme adjuvant dans certains vaccins) et délai normal d’apparition des symptômes, responsabilité de l’État: CE 7 nov. 2024, n° 472707 A
Un homme a reçu, à titre obligatoire, pendant son service national, plusieurs injections du vaccin contre le virus de l'hépatite B contenant des adjuvants à base de sels d'aluminium. Il a ensuite souffert quelques mois après la dernière injection, de troubles consistant en des douleurs musculaires, et un état d'essoufflement et de fatigue généralisée. Ces troubles se sont aggravés et ont conduit à plusieurs hospitalisations, auxquels se sont ajoutés des troubles cognitifs. Il demande donc la condamnation de l'État afin d’être indemnisé des préjudices qu'il estime avoir subis à la suite de cette vaccination obligatoire.
En l’espèce, « la probabilité de l'existence d'un lien de causalité entre l'administration d'un vaccin contenant des adjuvants à base de sels d'aluminium et les symptômes de douleurs musculaires et articulaires, d'asthénie et de troubles cognitifs susceptibles d'être rattachés à la myofasciite à macrophages ne peut, dans le dernier état des connaissances scientifiques, être regardée comme exclue ». Le délai d'apparition des symptômes, inférieur à un an, peut être considéré comme normal pour une affection liée à la myofasciite à macrophages et se caractérisant par les symptômes manifestés par l'intéressé.
Il en résulte que, dans les circonstances de l'espèce, le lien de causalité entre la vaccination contre l'hépatite B et les symptômes doit être regardé comme établi. La responsabilité de l'État est dès lors engagée au titre des dispositions de l'article L. 62 du code du service national.
■ Probabilité non nulle de l’existence d’un lien de causalité entre l’administration du vaccin obligatoire contre l’hépatite B contenant des adjuvants à base de sels d'aluminium et une myofasciite à macrophages et délai d’apparition des symptômes excédant le délai normal : CE 7 nov. 2024, n° 472625 B
Une infirmière d’un centre hospitalier a reçu des injections de plusieurs vaccins (contre l’hépatite B, la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite) à titre obligatoire, en raison de ses activités professionnelles. Elle a ressenti, plus de cinq ans après, divers troubles qu'elle a imputés à cette vaccination, en lien avec une myofasciite à macrophages diagnostiquée par la suite. Si la probabilité de l'existence d'un lien de causalité entre l'administration d'un vaccin contenant des adjuvants à base de sels d'aluminium et les symptômes de douleurs musculaires et articulaires, d'asthénie et de troubles cognitifs susceptibles d'être rattachés à la myofasciite à macrophages ne peut, dans le dernier état des connaissances scientifiques, être regardée comme exclue. Le délai de cinq ans constaté entre la vaccination litigieuse et l’apparition des symptômes ne peut être regardé comme un délai normal qui permettrait d’établir un lien entre la vaccination et la myofasciite à macrophages alors que les études disponibles indiquent un délai moyen compris entre un et deux ans entre la vaccination et les premiers signes cliniques de cette pathologie. Ainsi, le lien de causalité entre les vaccinations et la pathologie ne peut être regardé comme établi.
■ Probabilité ne pouvant être exclue qu'il existe un lien de causalité entre l'administration du vaccin contre l'hépatite B et la sclérose en plaques : CE 7 nov. 2024, n° 466288 B
Une femme a reçu plusieurs injections du vaccin contre l'hépatite B, à titre obligatoire afin de devenir agent des services hospitaliers. Environ un an après, elle a été diagnostiquée comme atteinte d'une sclérose en plaques. Le juge de cassation exerce en l’espèce un contrôle de la qualification juridique des faits sur l'appréciation de ce qu'il n'y a aucune probabilité qu'un lien de causalité existe entre l'administration d'un vaccin obligatoire et une affection présentée par la personne vaccinée. Ainsi, si aucun lien de causalité n'a pu être établi à ce jour entre l'administration du vaccin contre l'hépatite B et la sclérose en plaques, l'hypothèse qu'un tel lien existe a été envisagée par des travaux de recherche scientifiques ayant donné lieu à des publications dans des revues reconnues qui ont justifié une vigilance particulière des autorités sanitaires, et n'a pas été formellement démentie par les nombreuses études portant sur ce sujet. Dès lors, au vu du dernier état des connaissances scientifiques en débat, la probabilité de l’existence d’un lien entre l’administration du vaccin contre l’hépatite B et la sclérose en plaques ne peut être regardée comme exclue.
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