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Propriété littéraire et artistique
Présomption de titularité des droits et preuve des actes d'exploitation
Mots-clefs : Propriété intellectuelle, Titularité des droits, Contrefaçon
La présomption de titularité des droits d'exploitation dont peut se prévaloir à l'égard des tiers poursuivis en contrefaçon la personne qui commercialise sous son nom un objet protégé par le droit d'auteur, suppose, pour être utilement invoquée, que soit rapportée la preuve d'actes d'exploitation.
Cette décision de la première chambre civile du 6 janvier 2011 complète la construction prétorienne relative à la présomption de titularité des droits d'auteur par une personne morale dans le contexte d'une action en contrefaçon. Regrettons toutefois, malgré la cassation de l'arrêt d'appel (Paris, 16 janv. 2009), l'absence de visa qui aurait permis, par un choix entre les articles L. 113-1 et L. 113-5 du code de la propriété intellectuelle, de clarifier le fondement et, de ce fait, la nature de l'œuvre litigieuse (V. déjà Civ. 1re, 3 avr. 2001).
Une personne morale peut être présumée titulaire des droits d'exploitation des œuvres qu'elle commercialise sous son nom. Cette présomption est simple. La Cour de cassation rappelle de manière constante depuis quelques années qu'en l'absence de revendication du ou des auteurs, l'exploitation de l'œuvre par une personne morale sous son nom fait présumer, à l'égard des tiers recherchés pour contrefaçon, que cette personne est titulaire, sur l'œuvre, qu'elle soit ou non collective, du droit de propriété incorporelle de l'auteur (V. Civ. 1re, 15 nov. 2010). La preuve des actes d'exploitation, que l'on a déjà pu qualifier d'actes de possession, est toutefois, selon la Cour de cassation dans sa décision du 6 janvier 2011, le corollaire nécessaire à la présomption de titularité : la preuve pour légitimer la présomption. En effet, comme le notait Frédéric Pollaud-Dulian, « une présomption consiste, en effet, à déduire d'un fait incertain à partir de faits avérés qui le rendent vraisemblable » (RTD com. 2008. 75 obs. Pollaud-Dulian).
Dans l'affaire soumise à la Cour de cassation début 2011, il s'agissait, mais c'est fréquent dans ce domaine, de la titularité des droits sur des modèles. La société qui les commercialise sous son nom et qui prétendait que ces modèles avaient été réalisés par sa styliste sur ses instructions, a assigné un concurrent qui se fournissait chez le même fabricant chinois, en contrefaçon. Son action, et celle de la styliste, a été déclarée irrecevable, aucune justification d'instructions précises adressées au fabricant n'ayant été apportée. Les modèles en cause ayant été acquis concomitamment par la société concurrente chez le même fabricant, il était en effet difficile de déterminer précisément qui était l'auteur de ces modèles. La cassation est logiquement prononcée. Le fait de faire fabriquer ou vendre ne suffit donc pas. L'auteur véritable peut toujours faire reconnaître sa qualité en produisant la preuve de celle-ci. Cette décision permet de combattre, dans un contexte de mondialisation de la fabrication textile notamment, plutôt que d'investir en créant de nouveaux modèles, importeraient certains produits fabriqués en Asie, les commercialiseraient et, de ce seul fait, s'approprieraient les modèles pour évincer concurrence.
Civ. 1e, 6 janv. 2011, F-P+B
Références
« Fait pour un autre que le titulaire d'un droit de propriété intellectuelle ou son licencié d'exploiter ce monopole, portant ainsi atteinte aux droits de son titulaire.
La contrefaçon est un délit correctionnel. Elle constitue aussi un fait générateur de responsabilité civile. »
Sources : Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
■ Code de la propriété intellectuelle
« La qualité d'auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l'œuvre est divulguée. »
« L'œuvre collective est, sauf preuve contraire, la propriété de la personne physique ou morale sous le nom de laquelle elle est divulguée.
Cette personne est investie des droits de l'auteur. »
■ Paris, 16 janv. 2009, RG n° 07/20106 ; RTD com. 2009.306 F. Pollaud-Dulian.
■ Civ. 1re, 3 avr. 2001, n° 99-15.691, D. 2001. 2636, obs. P. Sirinelli.
■ Civ. 1re, 15 nov. 2010, Dalloz actualité, 9 déc. 2010, obs. Daleau.
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