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Droit civil
Preuve de l’absence de réticence dolosive dans un litige civil
Mots-clefs : Dol (réticence dolosive), Preuve, Attestation, Partie au litige
Un défendeur ne peut produire en justice une attestation fournie par le codéfendeur dans le but de prouver un fait juridique. C’est à bon droit que la cour d’appel a pu déduire de l’absence de communication d’un fait essentiel à la conclusion d’un contrat l’existence d’une réticence dolosive.
Les faits de l’affaire étaient les suivants : une maison avait été vendue en juillet 2002 par l’intermédiaire d’une agence immobilière, puis remise en vente peu de temps après par l’acquéreur. Or, le maire de la commune où était localisé le bien immobilier avait mentionné au notaire — en charge de la rédaction de l’acte authentique de la seconde vente — que la maison était située en zone inondable. Toutefois, cette affirmation ne se fondait pas sur une décision administrative de classement en zone inondable, mais sur la connaissance qu’avait le maire de deux inondations qui avaient eu lieu dans le passé. Par la suite, les acheteurs avaient refusé de signer le contrat de vente définitif.
Le vendeur, et premier acquéreur de la maison, s’était donc retourné contre les premiers vendeurs, pour obtenir la nullité de la vente. Il estimait avoir été victime d’un dol, qui, aux termes de l’article 1116 du Code civil, « est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté ». Conformément au régime de la preuve littérale gouvernant le droit civil, le premier vendeur avait versé au débat une attestation fournie par l’agence immobilière, certifiant que la plaignante avait été mise au courant des inondations au cours de deux visites préalables à l’achat. Cela prouvait l’absence d’élément intentionnel de la dissimulation, nécessaire pour caractériser le délit civil que constitue le dol.
La cour d’appel avait fondé son arrêt sur le principe selon lequel « nul ne peut se faire de preuve à soi-même » pour déclarer la vente nulle. En refusant la production de cette attestation au litige, elle a pu en déduire, conformément à une jurisprudence bien établie, que la vendeuse avait « dissimulé un fait qui, s’il avait été connu de lui [l’acquéreur], l’aurait empêché de contracter » (v. Civ. 3e, 15 janv. 1971). Le dol était donc bien constitué.
La Cour de cassation refuse l’application du principe « nul ne peut se faire de preuve à soi même », en précisant qu’il ne s’applique pas à la preuve des faits juridiques. Cependant, elle précise que l’agence immobilière, partie au litige, « ne pouvait à elle seule démontrer que le vendeur avait prévenu l’acquéreur des risques d’inondations ». A contrario, cela veut dire que l’agence aurait pu apporter cet élément de preuve, en complément d’autres preuves rapportées par des tiers.
La Cour de cassation rejette donc le pourvoi, en faisant « abstraction d’un motif erroné mais surabondant, relatif au principe selon lequel nul ne peut se faire de preuve à soi-même ».
Civ. 3e, 3 mars 2010, n° 08-21.056 et 08-21-057, FS-P+B
Références
« Manœuvre frauduleuse, parfois mensonge ou réticence blâmable, ayant pour objet de tromper l’une des parties à un acte juridique en vue d’obtenir son consentement. »
« Preuve par écrit résultant d’une suite de lettres, de caractères, de chiffres ou de tous autres signes ou symboles dotés d’une signification intelligible, quels que soient leur support et leurs modalités de transmission. »
« Tout événement volontaire ou non, produisant des effets de droit qui sont directement fixés par la loi ; indépendamment de la volonté individuelle (décès, accident, possession). Se distingue du fait matériel, fait quelconque auquel la loi n’attache pas de conséquence juridique. »
« Au sens large : tout fait illicite de l’homme engageant sa responsabilité civile (on oppose le délit civil au délit pénal).
Dans une acception étroite : fait de l’homme résultant d’une faute intentionnelle et engageant sa responsabilité civile (par opposition au quasi-délit qui résulte d’une faute non intentionnelle). »
Source : Lexique des termes juridiques 2010, 17e éd., Dalloz, 2009.
« Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté.
Il ne se présume pas et doit être prouvé. »
■ Civ. 3e, 15 janv. 1971 ; Bull. civ. III, n° 38 ; RTD civ. 1971. 839, obs. Loussouarn.
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