Actualité > À la une
À la une
Droit de l'entreprise en difficulté
Procédure collective : l’insolvabilité ne vaut pas cessation des paiements
Mots-clefs : Procédure collective, Insolvabilité, Cessation des paiements, Passif exigible, Actif disponible
Encourt la cassation, l’arrêt qui, pour caractériser l’état de cessation des paiements, retient que les différents créanciers sont impayés depuis des années ou du moins depuis la date retenue pour le report de la cessation des paiements.
Une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l’encontre d’une avocate. Les juges du fond avaient décidé de reporter la date de cessation des paiements au motif que les différents créanciers étaient « impayés depuis des années et, en tout cas » depuis la date limite qu’ils avaient retenue pour le report (sur les conditions du report v. art. L. 631-8, al. 2 C. com.). Le moyen soulevé en cassation par la débitrice soulignait que les juges s’étaient juste bornés à constater « au mieux [son] insolvabilité », état qui ne correspond pas à la définition légale de la cessation des paiements.
La Haute cour approuve et casse l’arrêt d’appel aux visas des articles L. 631-1, alinéa 1er, L. 631-8 et L. 641-1, IV, du Code de commerce. Elle rappelle qu’en cas de liquidation judiciaire (comme en matière de redressement judiciaire) la date de cessation des paiements est fixée au jour où le débiteur a été placé dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible au moyen de son actif disponible.
L’état d’insolvabilité est donc insuffisant à caractériser la cessation des paiements et les juges ne semblent pas avoir motivé de façon assez précise leur décision. Si la solution semble évidente, cet arrêt a le mérite de souligner que la notion de cessation des paiements, redéfinie par la loi n°2005-845 du 26 juillet 2006 (complétée par l’ordonnance n°2008-1345 du 18 déc. 2008) à l’article L. 631-1 du Code de commerce, soulève encore des difficultés quant à la définition de ses deux éléments constitutifs.
On rappellera alors brièvement que le passif exigible recouvre l’ensemble des dettes certaines, liquides et exigibles au jour où le tribunal statue sur la demande d’ouverture de la procédure de redressement ou liquidation judiciaires. On parle de passif exigible et exigé (même si le créancier a fait preuve de négligence en n’exerçant pas les voies de recours adéquates), ce qui exclut notamment les créances dont peut bénéficier le débiteur et qui font l’objet d’une instance pendante (comme la débitrice le soutenait en l’espèce), ou les réserves de crédit ou les moratoires qui seraient expressément accordés par les créanciers et à la condition que le débiteur en rapporte la preuve (art. L. 631-1 C. com. mod. par ord. 18 déc. 2008). Ces réserves de crédit qui s’analysent comme « toute avance de trésorerie qui ne [sont] pas bloquée[s] ou dont le remboursement n’est pas demandé » (Com. 16 nov. 2010) viennent donc s’imputer à l’actif disponible du débiteur. Elles ne doivent toutefois pas être confondues avec le paiement par un tiers de la dette du débiteur : puisque le tiers se trouve alors subrogé dans les droits de l’ancien créancier, la créance reste inscrite au titre du passif exigible du débiteur. Ainsi, l’actif disponible est donc constitué de l’ensemble de la trésorerie dont le débiteur peut immédiatement disposer, ce qui exclut, comme le souligne l’arrêt commenté, le patrimoine immobilier non encore vendu (v. déjà, Com. 27 févr. 2007).
Com. 7 févr. 2012, n°11-11.347, F-P+B
Références
■ Com. 16 nov. 2010, n°09-71.278, D. 2010. 2830.
■ Com. 27 févr. 2007, n°06-10.170, D. 2007. 872.
■ Code de commerce
« Il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné aux articles L. 631-2 ou L. 631-3 qui, dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.
La procédure de redressement judiciaire est destinée à permettre la poursuite de l'activité de l'entreprise, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif. Elle donne lieu à un plan arrêté par jugement à l'issue d'une période d'observation et, le cas échéant, à la constitution de deux comités de créanciers, conformément aux dispositions des articles L. 626-29 et L. 626-30. »
« Le tribunal fixe la date de cessation des paiements. À défaut de détermination de cette date, la cessation des paiements est réputée être intervenue à la date du jugement d'ouverture de la procédure.
Elle peut être reportée une ou plusieurs fois, sans pouvoir être antérieure de plus de dix-huit mois à la date du jugement d'ouverture de la procédure. Sauf cas de fraude, elle ne peut être reportée à une date antérieure à la décision définitive ayant homologué un accord amiable en application du II de l'article L. 611-8.
Le tribunal est saisi par l'administrateur, le mandataire judiciaire ou le ministère public. Il se prononce après avoir entendu ou dûment appelé le débiteur.
La demande de modification de date doit être présentée au tribunal dans le délai d'un an à compter du jugement d'ouverture de la procédure.
Lorsqu'il a été fait application de l'article L. 621-12, le jugement d'ouverture mentionné aux premier et deuxième alinéas est celui de la procédure de sauvegarde et le point de départ du délai mentionné au quatrième alinéa est le jour du jugement ayant converti la procédure de sauvegarde. »
« I.-Les articles L. 621-1 et L. 621-2 sont applicables à la procédure de liquidation judiciaire.
II.-Dans le jugement qui ouvre la liquidation judiciaire, le tribunal désigne le juge-commissaire. Il peut, en cas de nécessité, en désigner plusieurs.
Dans le même jugement, sans préjudice de la possibilité de nommer un ou plusieurs experts en vue d'une mission qu'il détermine, le tribunal désigne, en qualité de liquidateur, un mandataire judiciaire inscrit ou une personne choisie sur le fondement du premier alinéa du II de l'article L. 812-2. Il peut, à la demande du ministère public ou d'office, en désigner plusieurs.
Le ministère public peut proposer un liquidateur à la désignation du tribunal. Le rejet de cette proposition doit être spécialement motivé. Lorsque la procédure est ouverte à l'égard d'un débiteur qui bénéficie ou a bénéficié d'un mandat ad hoc ou d'une procédure de conciliation dans les dix-huit mois qui précèdent, le ministère public peut en outre s'opposer à ce que le mandataire ad hoc ou le conciliateur soit désigné en qualité de liquidateur.
Un représentant des salariés est désigné dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 621-4 et à l'article L. 621-6. Il exerce la mission prévue à l'article L. 625-2.
Les contrôleurs sont désignés et exercent leurs attributions dans les mêmes conditions que celles prévues au titre II.
Aux fins de réaliser l'inventaire prévu par l'article L. 622-6 et la prisée de l'actif du débiteur, le tribunal désigne, en considération de leurs attributions respectives telles qu'elles résultent des dispositions qui leur sont applicables, un commissaire-priseur judiciaire, un huissier de justice, un notaire ou un courtier en marchandises assermenté.
III.-Lorsque la liquidation judiciaire est prononcée au cours de la période d'observation d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, le tribunal nomme le mandataire judiciaire en qualité de liquidateur. Toutefois, le tribunal peut, par décision motivée, à la demande de l'administrateur, d'un créancier, du débiteur ou du ministère public, désigner en qualité de liquidateur une autre personne dans les conditions prévues à l'article L. 812-2.
Lorsque le débiteur exerce une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, la demande peut aussi être faite au tribunal par l'ordre professionnel ou l'autorité compétente dont, le cas échéant, il relève.
IV.-La date de cessation des paiements est fixée dans les conditions prévues à l'article L. 631-8. »
Autres À la une
-
[ 20 décembre 2024 ]
À l’année prochaine !
-
Droit du travail - relations collectives
[ 20 décembre 2024 ]
Salariés des TPE : à vous de voter !
-
Droit du travail - relations individuelles
[ 19 décembre 2024 ]
Point sur la protection de la maternité
-
Libertés fondamentales - droits de l'homme
[ 18 décembre 2024 ]
PMA post-mortem : compatibilité de l’interdiction avec le droit européen
-
Droit de la famille
[ 17 décembre 2024 ]
GPA : l’absence de lien biologique entre l’enfant et son parent d’intention ne s’oppose pas à la reconnaissance en France du lien de filiation établi à l'étranger
- >> Toutes les actualités À la une