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Droit de la consommation
Procédure de surendettement : incompatibilité avec la déchéance du terme du prêt
Lors d’une procédure de surendettement durant laquelle une ordonnance a rendu exécutoires des recommandations de la commission de surendettement prévoyant un rééchelonnement de la dette, précédé d’un moratoire de quatorze mois, la banque créancière ne saurait prononcer une déchéance du terme fondée sur des impayés relatifs à la dette ainsi rééchelonnée et antérieurs à cette procédure.
Civ. 1re, 12 juill. 2023, n° 22-16.653 B
Susceptible d’être prononcée par un établissement de crédit lorsque l’emprunteur ne paie pas ses échéances en dépit de mises en demeure préalables, la déchéance du terme du prêt permet au prêteur d’exiger de l’emprunteur le remboursement immédiat du solde du prêt et de mettre fin au contrat qui les lie. Cette déchéance du terme ne peut cependant être prononcée que si certaines conditions sont réunies. La décision sélectionnée en témoigne.
En l’espèce, une banque avait consenti à un couple de particuliers un prêt de restructuration. À la suite d’une demande d’ouverture d’une procédure de surendettement déposée par l’emprunteur et déclarée recevable le 29 juin 2015, une ordonnance du 12 octobre 2015 avait rendu exécutoires les recommandations de la commission de surendettement qui prévoyaient notamment un moratoire de quatorze mois pour le remboursement de la dette contractée à l’égard de la banque. Cependant, le 12 février 2016, cette dernière avait mis l’emprunteuse en demeure de régulariser la situation. Cette mise en demeure étant restée infructueuse, la banque avait ensuite, par lettres recommandées du 14 juin 2016, notifié au couple la déchéance du terme du prêt. La cour d’appel de Paris rejeta la demande en remboursement de la banque, motif pris que la déchéance du terme prononcée n’était pas compatible avec la procédure de surendettement engagée.
Devant la Cour de cassation, la banque faisait grief à l’arrêt d’avoir rejeté ses demandes à l’égard de l’époux emprunteur alors que la déchéance du terme notifiée à un codébiteur solidaire à la suite d’une mise en demeure restée sans effet produit ses effets à l’égard des co-emprunteurs solidaires, sans qu'il soit nécessaire que ceux-ci soient eux-mêmes mis en demeure. Ce moyen ne parvient cependant pas à convaincre la Haute juridiction. Pour la première chambre civile, en effet, il résulte de l’ancien article L. 331-3-1, alinéas 2 et 3, du Code de la consommation, dont les termes figurent désormais à l’article L. 722-5, alinéa 1er du même code, que la décision déclarant recevable la demande d’ouverture d’une procédure de surendettement emporte interdiction pour le débiteur, sauf autorisation judiciaire, de payer, en tout ou partie, une créance autre qu’alimentaire jusqu’à l’homologation, par le juge, des mesures recommandées par la commission de surendettement. Or, après avoir relevé que la demande d’ouverture d’une procédure de surendettement de l’emprunteur avait été déclarée recevable le 29 juin 2015 et qu’une ordonnance du 12 octobre 2015 avait rendu exécutoires les recommandations de la commission de surendettement qui prévoyaient un rééchelonnement de la dette contractée à l’égard de la banque précédée d’un moratoire de quatorze mois, la cour d’appel avait fait ressortir qu’il n’était pas établi que les conditions d’acquisition de la déchéance du terme, laquelle ne pouvait résulter que d’impayés antérieurs au 29 juin 2015, aient été réunies à l'égard de l’emprunteur.
Protectrice des intérêts légitimes du débiteur surendetté, cette solution mérite d’être approuvée. La banque ne saurait prononcer la déchéance du terme en raison du défaut de remboursement de certaines échéances du prêt alors que ces dernières font l’objet d’un rééchelonnement établi par une procédure de surendettement, lui-même précédé par une période de moratoire étendue sur une longue durée. L’établissement créancier se doit de respecter les mesures ainsi décidées par la commission départementale de surendettement, de même qu’il lui est interdit d’engager de nouvelles mesures d’exécution contre son débiteur s’il n’est pas d’abord mis fin au plan de surendettement (Civ. 2e, 9 janv. 2020, n° 18-19.846).
Références :
■ Civ. 2e, 9 janv. 2020, n° 18-19.846 P : D. 2020. 76 ; Rev. prat. rec. 2020. 11, chron. R. Laher.
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