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Projet de loi bioéthique: l’avis du Conseil d’État
Le projet de loi relatif à la bioéthique a été présenté en Conseil des ministres le 24 juillet 2019. Le Gouvernement a décidé de rendre public l’avis du Conseil d’État.
Dans son avis, le Conseil d’État rappelle que ce projet s’inscrit dans le cadre juridique français de la bioéthique, construit par les lois du 29 juillet 1994 (n° 94-654), du 6 août 2004 (n° 2004-800) et du 7 juillet 2011 (n° 2011-814). Ne seront ici traités que certains aspects du projet de loi (AMP, accès à ses origines pour un enfant issu d’une AMP et avortement thérapeutique).
■ L’assistance médicale à la procréation (AMP)
Rappel. Le Conseil d’État rappelle que l’extension de l’accès à l’AMP, telle qu’elle est prévue par le projet de loi, relève d’un choix politique.
Selon l’avis du Conseil d’État : « ni le fait que l’adoption soit déjà ouverte aux couples de femmes et aux personnes seules, ni le droit au respect de la vie privée, ni la liberté de procréer, pas plus que l’interdiction des discriminations ou le principe d’égalité n’imposent l’ouverture de l’AMP. Le Conseil d’État précise à cet égard que la notion de « droit à l’enfant » n’ayant pas de consistance juridique, l’enfant étant un sujet de droit et non l’objet du droit d’un tiers, aucune atteinte au principe d’égalité ne peut être invoquée sur ce terrain. Il ajoute que l’ouverture de l’AMP n’est pas de nature à entraîner juridiquement l’autorisation en France d’autres techniques, telle la gestation pour autrui (GPA). »
Projet parental. Le projet de loi entend fonder le recours à l’assistance médicale à la procréation non plus sur l’exigence d’une infertilité pathologique comme c’est actuellement le cas mais sur le projet parental.
Évaluation médicale et psychologique. Par ailleurs, les personnes qui souhaitent recourir à l’AMP devront faire l’objet d’une « évaluation médicale et psychologique » par l’équipe pluridisciplinaire du centre d’AMP. Selon le Conseil d’État, cette mesure, qui confère au médecin le pouvoir de refuser ou de différer la pratique de l’AMP, est de nature à créer un contentieux contre ces décisions.
Sort des femmes mariées. L’AMP étant ouverte à toutes les femmes quelles que soit leurs situations, le Conseil d’État souligne qu’il est nécessaire de préciser que « la femme menant seule un projet d’assistance médicale à la procréation ne peut être mariée, afin d’éviter tout effet de ce projet sur son conjoint qui n’y aurait pas pris part, notamment en matière de filiation par le jeu de la présomption de paternité du mari. »
Insémination post mortem. Le projet de loi maintient l’obligation d’être en vie au moment de la réalisation de l’AMP, ce qui écarte toute possibilité de recourir à l’AMP à l’aide des gamètes d’un homme décédé ou des embryons conservés par un couple dont l’homme est décédé. Le Conseil d’État constate que cette situation aboutit à ce qu’une femme dont l’époux est décédé doive renoncer à tout projet d’AMP avec les gamètes de ce dernier ou les embryons du couple, alors qu’elle sera autorisée à réaliser une AMP seule, avec tiers donneur…
Il existe donc là un paradoxe alors que le législateur ouvre l’AMP aux femmes non mariées. Il s’ensuit qu’il conviendrait « d’autoriser le transfert d’embryons et l’insémination post mortem, dès lors que sont remplies les deux conditions suivantes : d’une part une vérification du projet parental afin de s’assurer du consentement du conjoint ou concubin décédé ; d’autre part un encadrement dans le temps (délai minimal à compter du décès et délai maximal) de la possibilité de recourir à cette AMP ».
Autoconservation de gamètes. Il s’agit ici de permettre aux femmes d’y recourir, sous certaines conditions tenant notamment à l’âge, afin de mener à bien ultérieurement et personnellement un projet d’AMP. Les frais afférents aux traitements initiaux et au prélèvement des gamètes seront pris en charge dans les conditions du droit commun par la sécurité sociale, les frais de conservation des gamètes demeurant à la charge de la personne, ce qui ne se heurte à aucun obstacle de nature juridique.
■ Le droit pour un enfant conçu dans le cadre de l'assistance médicale à la procréation par recours à un tiers donneur d’accéder à ses origines
Seul l’enfant sera titulaire du droit d’accéder à ses origines et susceptible de l’exercer, s’il le souhaite, à sa majorité. Il pourra avoir accès à des informations non-identifiantes sur le donneur et également avoir accès à l’identité du donneur si celui-ci y consent.
■ L’interruption de grossesse pour raison médicale
Suppression du délai de réflexion. Le projet de loi supprime la proposition systématique d’un délai de réflexion d’au moins une semaine en cas d’interruption de grossesse pour raison médicale envisagée au motif qu'il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic. Le Conseil d’État regrette la suppression de ces dispositions qui se bornaient à imposer au médecin de proposer à la femme enceinte un délai de réflexion que cette dernière n’était pas tenue d’observer. Le Conseil d’État aurait souhaité que la disposition législative maintienne l’obligation de proposer un délai de réflexion sans nécessairement fixer la durée minimale de celui-ci.
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