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Droit constitutionnel
QPC : l’Union nationale des familles (UNAF) ne détient pas un « monopole » de représentation auprès des pouvoirs publics
Mots-clefs : Question prioritaire de constitutionnalité (QPC), Conseil d’État, Conformité à la Constitution, Principe d’égalité, Liberté d’expression, Liberté d’association
Les dispositions législatives habilitant l’Union nationale des associations familiales à représenter l’ensemble des familles auprès des pouvoirs publics ne méconnaissent ni le principe d’égalité, ni celui de la liberté d’expression, ni le principe de la liberté d’association a décidé le Conseil constitutionnel dans une décision du 28 mai 2010.
La seconde décision relative à la QPC posée par le Conseil d’État au Conseil constitutionnel porte sur le 2° de l’article L. 211-3 du CASF. Selon l’Union des familles en Europe (UFE) ces dispositions porteraient atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution et notamment au principe d’égalité en ce qu’elles font de l’Union nationale des associations familiales (UNAF) et des unions départementales des associations familiales (UDAF) qui lui sont affiliées les interlocuteurs privilégiés des pouvoirs publics en matière de politique familiale. L’UFE dénonce le « monopole absolu » de représentation attribué l’UDAF et de l’UNAF par la loi. Pour cela, elle soutient que ce « monopole » de représentation est contraire à trois libertés publiques fondamentales que sont le principe d’égalité, la liberté d’expression et la liberté d’association.
Le Conseil constitutionnel en examinant tour à tour ces trois griefs conclut à la conformité à la Constitution des dispositions contestées.
1. Selon une jurisprudence constante (v. dernièrement, Cons const. du 6 août 2009), le Conseil constitutionnel a toujours considéré que l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 (DDHC) relatif au principe d’égalité devant la loi « ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ». Afin de vérifier le respect du principe d’égalité en l’espèce, le Conseil examine certaines dispositions du CASF relatives aux associations familiales. Ces associations ayant « pour but essentiel la défense de l'ensemble des intérêts matériels et moraux, soit de toutes les familles, soit de certaines catégories d'entre elles » sont régies par loi du 1er juillet 1901 et se forment librement. En revanche, les UDAF et l’UNAF, véritables fédérations d’associations, sont instituées dans un but d’utilité publique afin de permettre la représentation officielle de l’ensemble des familles auprès des pouvoirs publics, les associations familiales sont libres d’y adhérer. Ces fédérations ont vocation à rassembler toutes les associations familiales qui le souhaitent. Ainsi, le Conseil constitutionnel considère que les associations familiales et les unions chargées de les regrouper ne sont pas placées dans une situation identique par la loi et ont une nature différente. Le principe d’égalité entre associations familiales et UDAF ou UNAF ne peut être invoqué afin de critiquer le fait que les associations ne jouissent pas des prérogatives reconnues aux UDAF et UNAF.
2. Le deuxième grief de l’UFE reposait sur la méconnaissance de la liberté d’expression (art. 11 DDH). L’UNAF ayant pour mission de défendre les intérêts de toutes les familles, elle a vocation à dépasser les intérêts propres à chacune des associations familiales afin de défendre l’intérêt général. Cela ne restreint pas pour autant la liberté d’expression des associations familiales. En effet, le Conseil affirme que les pouvoirs publics peuvent prendre en compte les intérêts et les positions défendues pas les associations familiales qu’elles soient adhérentes ou non à l’UNAF.
3. En vertu du principe de liberté d’association, principe fondamental reconnu par les lois de la République et solennellement réaffirmé par le préambule de la Constitution, depuis la décision du Conseil constitutionnel du 16 juillet 1971, les associations se constituent librement et peuvent être rendues publiques sous la seule réserve du dépôt d’une déclaration préalable. Le Conseil considère que les dispositions du CASF ne méconnaissent pas le principe de la liberté d’association des associations familiales. En effet, celles-ci peuvent se constituer librement, sont libres d’adhérer à l’UNAF et peuvent librement se regrouper selon les modalités qu’elles définissent.
Cons. const. 28 mai 2010, Union des familles en Europe, n° 2010-3 QPC
Références
■ Article L. 211-3 du Code de l’action sociale et des familles
« L'union nationale et les unions départementales des associations familiales sont habilitées, sans préjudice de tous les droits et prérogatives pouvant résulter de leurs statuts, à :
1° Donner leur avis aux pouvoirs publics sur les questions d'ordre familial et leur proposer les mesures qui paraissent conformes aux intérêts matériels et moraux des familles ;
2° Représenter officiellement auprès des pouvoirs publics l'ensemble des familles et notamment désigner ou proposer les délégués des familles aux divers conseils, assemblées ou autres organismes institués par l'État, la région, le département, la commune ;
3° Gérer tout service d'intérêt familial dont les pouvoirs publics estimeront devoir leur confier la charge ;
4° Exercer devant toutes les juridictions, sans avoir à justifier d'un agrément ou d'une autorisation préalable de l'autorité publique, notamment de l'agrément prévu à l'article L. 421-1 du code de la consommation, l'action civile relativement aux faits de nature à nuire aux intérêts moraux et matériels des familles, y compris pour les infractions prévues par l'article 227-24 du code pénal.
Chaque association familiale ou fédération d'associations familiales, dans la limite de ses statuts, conserve le droit de représenter auprès des pouvoirs publics les intérêts dont elle a assumé la charge. »
■ Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789
« La Loi est l'expression de la volonté générale. Tous les Citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs Représentants, à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les Citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. »
« La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi. »
■ Cons const. du 6 août 2009, Loi réaffirmant le principe du repos dominical et visant à adapter les dérogations à ce principe dans les communes et zones touristiques et thermales ainsi que dans certaines grandes agglomérations pour les salariés volontaires, n° 2009-588 DC.
■ Cons. const. du 16 juill. 1971, Loi complétant les dispositions des articles 5 et 7 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association, n° 71-44.
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