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[ 15 décembre 2011 ] Imprimer

Droit pénal spécial

QPC relative à la conduite après usage de stupéfiants

Mots-clefs : Conduite, Stupéfiant, Principe de légalité des délits et des peines, Principe de nécessité des peines, Contrôle de constitutionnalité a posteriori, QPC, Code de la route, Conformité à la Constitution

L’article L. 235-1, alinéa 1er § I du Code de la route qui réprime la conduite d'un véhicule lorsque son conducteur a fait usage de plantes ou de substances classées comme stupéfiants est conforme à la Constitution a décidé le Conseil constitutionnel dans une décision QPC du 9 décembre 2011.

Dans un arrêt du 5 octobre 2011, la chambre criminelle de la Cour de cassation renvoie au Conseil constitutionnel une QPC relative à la conformité à la Constitution de l’article L. 235-1, alinéa 1er § I du Code de la route selon laquelle cette disposition ne délimiterait pas dans le temps, par rapport au contrôle, l'usage de substances illicites par le conducteur concerné et ne préciserait pas le lien de causalité entre ledit usage et son influence sur la capacité de conduire. Après avoir examiné la constitutionnalité de la disposition contestée, le Conseil constitutionnel l’a déclaré conforme aux droits et libertés garantis par la Constitution.

Il était plus précisément reproché à cette disposition législative de porter atteinte au principe de légalité des délits et des peines et au principe de nécessité des peines en ne prévoyant pas le taux de substance illicite détectable dans le sang ni la durée entre la prise de stupéfiant et la conduite.

Rappelons toutefois, de manière préliminaire, que l’usage des stupéfiants est illicite en France (art. L. 3421-1 CSP,. v. la liste des stupéfiants : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000533085&fastPos=5&fastReqId=1256936434&categorieLien=cid&oldAction=rechTexte ) et que l’objet de l’article L. 235-1, al. 1er § I du Code de la route est de faire renoncer à la conduite en condamnant toute personne utilisant des stupéfiants (v. Crim. 12 mars 2008).

Dans sa décision du 9 décembre 2011, le Conseil constitutionnel vérifie dans un premier temps si le législateur a porté atteinte au principe de légalité des délits et des peines (art. 8 DDH et art. 34 Const. 58) selon lequel il doit fixer lui-même le champ d’application de la loi pénale et définir les crimes et délits en termes suffisamment clairs et précis. En l’espèce, le Conseil constate que l’infraction est constituée si les analyses sanguines révèlent la trace de produits stupéfiants dans le sang. Le critère retenu exclut tout arbitraire et imprécision. Par ailleurs, en l’état des connaissances scientifiques, médicales et techniques, la fixation des seuils minima de détection témoignant de l’usage de stupéfiants dans le sang appartient au pouvoir réglementaire sous le contrôle du juge, le législateur n’a pas méconnu le principe de légalité des délits et des peines en ne précisant pas ces seuils pour que l’infraction soit constituée.

Dans un second temps, le Conseil constitutionnel a regardé si le principe de nécessité des peines était respecté. L’article L. 235-1, al. 1er § I du Code de la route punit de deux ans d’emprisonnement et de 4 500 euros d’amende la conduite d’un véhicule dès lors que l’analyse sanguine démontre l’usage de stupéfiants par le conducteur. Au regard des risques existant relatifs à la conduite après usage de stupéfiants, les peines encourues ne sont pas considérées par le Conseil comme manifestement disproportionnées.

Cons. const. 9 déc. 2011, M. Jérémy M., n° 2011-204 QPC

Références

Crim. 5 oct. 2011, n° 11-90.085.

Crim. 12 mars 2008, Bull. crim. no 61; D. 2008. 1719, obs. Caron et Ménotti ; AJ pénal 2008. 283.

Article L. 235-1 du Code de la route

« I.-Toute personne qui conduit un véhicule ou qui accompagne un élève conducteur alors qu'il résulte d'une analyse sanguine qu'elle a fait usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants est punie de deux ans d'emprisonnement et de 4 500 euros d'amende.

Si la personne se trouvait également sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool dans le sang ou dans l'air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du présent code, les peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et 9 000 euros d'amende.

II.-Toute personne coupable des délits prévus par le présent article encourt également les peines complémentaires suivantes :

1° La suspension pour une durée de trois ans au plus du permis de conduire ; cette suspension ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ; elle ne peut être assortie du sursis, même partiellement ;

2° L'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis pendant trois ans au plus ;

3° La peine de travail d'intérêt général selon les modalités prévues à l'article 131-8 du code pénal et selon les conditions prévues aux articles 131-22 à 131-24 du même code et à l'article 20-5 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante ;

4° La peine de jours-amende dans les conditions fixées aux articles 131-5 et 131-25 du code pénal ;

5° L'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;

6° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;

7° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation aux dangers de l'usage de produits stupéfiants.

III.-L'immobilisation du véhicule peut être prescrite dans les conditions prévues aux articles L. 325-1 à L. 325-3.

IV.-Les délits prévus par le présent article donnent lieu de plein droit à la réduction de la moitié du nombre maximal de points du permis de conduire. »

Article L. 3421-1 du Code de la santé publique

« L'usage illicite de l'une des substances ou plantes classées comme stupéfiants est puni d'un an d'emprisonnement et de 3750 euros d'amende.

Les personnes coupables de ce délit encourent également, à titre de peine complémentaire, l'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation aux dangers de l'usage de produits stupéfiants, selon les modalités fixées à l'article 131-35-1 du code pénal.

Si l'infraction est commise dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, ou par le personnel d'une entreprise de transport terrestre, maritime ou aérien, de marchandises ou de voyageurs exerçant des fonctions mettant en cause la sécurité du transport dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 euros d'amende. Pour l'application du présent alinéa, sont assimilés au personnel d'une entreprise de transport les travailleurs mis à la disposition de l'entreprise de transport par une entreprise extérieure. »

Article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen

« La Loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une Loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée. »

Article 34 de la Constitution de 1958

« La loi fixe les règles concernant :

– les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques ; la liberté, le pluralisme et l'indépendance des médias ; les sujétions imposées par la Défense nationale aux citoyens en leur personne et en leurs biens ;

- la nationalité, l'état et la capacité des personnes, les régimes matrimoniaux, les successions et libéralités ;

– la détermination des crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables ; la procédure pénale ; l'amnistie ; la création de nouveaux ordres de juridiction et le statut des magistrats ;

– l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ; le régime d'émission de la monnaie.

La loi fixe également les règles concernant :

– le régime électoral des assemblées parlementaires, des assemblées locales et des instances représentatives des Français établis hors de France ainsi que les conditions d'exercice des mandats électoraux et des fonctions électives des membres des assemblées délibérantes des collectivités territoriales ;

– la création de catégories d'établissements publics ;

– les garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires civils et militaires de l'État ;

– les nationalisations d'entreprises et les transferts de propriété d'entreprises du secteur public au secteur privé.

La loi détermine les principes fondamentaux :

– de l'organisation générale de la Défense nationale ;

– de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources ;

– de l'enseignement ;

– de la préservation de l'environnement ;

– du régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales ;

– du droit du travail, du droit syndical et de la sécurité sociale.

Les lois de finances déterminent les ressources et les charges de l'État dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique.

Les lois de financement de la sécurité sociale déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique.

Des lois de programmation déterminent les objectifs de l'action de l'État.

Les orientations pluriannuelles des finances publiques sont définies par des lois de programmation. Elles s'inscrivent dans l'objectif d'équilibre des comptes des administrations publiques.

Les dispositions du présent article pourront être précisées et complétées par une loi organique. »

 

Auteur :C. G.


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