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Procédure civile
Recevabilité des requêtes individuelles fondée sur la notion de «préjudice important»
Mots-clefs : CEDH, Requête individuelle, Recevabilité, Préjudice important, Critères
Premières applications par la Cour européenne des droits de l’homme du critère de recevabilité des requêtes fondé sur le « préjudice important ».
Le Protocole n° 14, entré en vigueur le 1er juin dernier, a introduit, parmi d’autres innovations, une nouvelle condition de recevabilité des requêtes individuelles tenant à l’exigence pour le requérant de prouver qu’il a subi un préjudice important.
Faute de définition précise dans le protocole de cette notion de préjudice important, le soin est laissé aux juges de la Cour européenne des droits de l’homme de dégager les critères permettant cette définition au fil de leurs décisions (critères « adaptés, voire adaptables, à la gravité des défis juridiques et statistiques qu'elle aura à relever », selon J.-P. Marguénaud).
C’est désormais chose (en partie) faite avec notamment deux décisions d’irrecevabilité rendues respectivement le 1er juin et le 1er juillet 2010.
Dans la première décision, le préjudice financier allégué, d’un montant de 90 euros, est (selon la Cour) réduit et aucun élément du dossier n’indique que le requérant se trouve dans une situation économique telle que l’issue du litige aurait eu des répercussions importantes sur sa vie personnelle (CEDH 1er juin 2010, Adrian Mihai Ionescu c. Roumanie, § 34 et s.).
De même dans la seconde décision, en date du 1er juillet 2010, la Cour de Strasbourg relève que la violation d’un droit, quelle que soit sa réalité d’un point de vue juridique, doit atteindre un seuil minimum de gravité pour justifier un examen par une juridiction internationale. Or, les griefs du requérant dans cette affaire se limitent expressément au défaut du versement d’une somme équivalente à moins d’un euro (CEDH 1er juill. 2010, Korolev c. Russie). Les juges relèvent toutefois que le seuil de gravité pour justifier un examen par la Cour doit être apprécié au cas par cas et non de façon abstraite. De même, elle s’entoure de diverses précautions en relevant qu’une violation de la Convention peut concerner une question de principe et causer un préjudice important sans avoir une incidence patrimoniale (« The Court is mindful at the same time that the pecuniary interest involved is not the only element to determine whether the applicant has suffered a significant disadvantage. Indeed, a violation of the Convention may concern important questions of principle and thus cause a significant disadvantage without affecting pecuniary interest. It could even have been so in the present case had the applicant complained, for example, of the authorities' failure to enforce his legitimate right to consult his file at the Passport and Visa Department. Yet, the applicant did not challenge the execution of the domestic judgment in that part, limiting his claims solely to pecuniary damage »).
Elle répond ainsi aux critiques que l’introduction de ce critère a pu soulever auprès de certains auteurs l’ayant qualifié de « notion la plus contraire à l’esprit des droits de l’homme que l’on aurait pu trouver » (v. J.-P. Marguénaud, préc.).
Quoi qu’il en soit, on retiendra que le préjudice important s’élève à plus d’un euro et même plus que 90…La définition de ce critère se fera donc en creux.
CEDH 1er juin 2010, Adrian Mihai Ionescu c. Roumanie, n° 36659/04 ; CEDH 1er juill. 2010, Korolev c. Russie, n° 25551/05
Référence
■ J.-P. Marguénaud, « La soumission des mesures provisoires aux exigences du droit à un procès équitable et la dénonciation du lien de fraternité entre le juge et l'avocat de la partie adverse ou les grandes conséquences d'une affaire sans importance », RTD civ. 2010. 285.
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