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[ 10 septembre 2013 ] Imprimer

Libertés fondamentales - droits de l'homme

Recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires : d’un régime d’interdiction des recherches avec dérogation à un régime d’autorisation sous conditions

Mots-clefs : Santé publique, Bioéthique, Recherche, Conditions, Embryon, Cellules souches embryonnaires, Principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine

La loi n°2013-715 du 6 août 2013 relative à la bioéthique tendant à modifier la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 en autorisant sous certaines conditions la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires a été validée par le Conseil constitutionnel. Dans la décision n° 2013-674 DC du 1er août 2013, les Sages considèrent que ce nouveau régime de recherche ne porte pas atteinte au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine. La loi du 6 août 2013 modifie uniquement l’article L. 2151-5 du Code de la santé publique.

Sujet éthique et politique en plus d’être technique et scientifique, la recherche sur l’embryon humain passe avec la loi °2013-715 du 6 août 2013 (JO 7 août) d’une interdiction avec possibilité de dérogation à un principe d’autorisation encadrée, c’est-à-dire qu’il existe maintenant, sous certaines conditions, une « présomption de disponibilité de l’embryon humain pour la recherche ». L’embryon surnuméraire devient alors, selon certains auteurs, « un matériau de laboratoire » (v. B. Mathieu).

Avant 2004, aucune recherche n’était autorisée sur l’embryon humain (CSP, anc. art. L. 152-7 et L. 152-8). Puis la loi n° 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique a modifié le Code de la santé publique. Elle maintenait le principe de l’interdiction des recherches sur l’embryon humain tout en instituant un régime transitoire et temporaire permettant de déroger à l’interdiction pour une période de cinq ans. Ainsi, sous certaines conditions, des recherches pouvaient être autorisées (CSP, anc. art. L. 2151-5, art. modifié à la marge par la L. n° 2011-814 du 7 juill. 2011).

Désormais, avec la loi du 6 août 2013 (CSP, art. L. 2151-5), aucune recherche sur l’embryon humain ni sur les cellules souches embryonnaires ne peut être entreprise sans autorisation. Les protocoles de recherche sont autorisés par l’Agence de la biomédecine après vérification des conditions légales. Ainsi, la recherche sur l’embryon doit, notamment, avoir une finalité médicale (et donc aucune fin commerciale). De même, il doit être impossible, en l’état des connaissances scientifiques, de mener cette recherche sans recourir aux embryons humains surnuméraires ou aux cellules souches embryonnaires. Par ailleurs, cette recherche est uniquement autorisée sur des embryons conçus in vitro dans le cadre d’une assistance médicale à la procréation et qui ne font plus l’objet d’un projet parental. Enfin, les embryons surnuméraires du couple ne peuvent faire l’objet de recherche si le couple n’a pas donné son consentement écrit préalable.

Par ailleurs, dans sa décision du 1er août 2013, le Conseil constitutionnel a  jugé que les dispositions déférées ne méconnaissent pas le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine : « si le législateur a modifié certaines des conditions permettant l'autorisation de recherche sur l'embryon humain et sur les cellules souches embryonnaires à des fins uniquement médicales, afin de favoriser cette recherche et de sécuriser les autorisations accordées, il a entouré la délivrance de ces autorisations de recherche de garanties effectives». 

Cons. const. 1er août 2013, Loi tendant à modifier la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique en autorisant sous certaines conditions la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires : n° 2013-674 DC

L. n° 2013-715 du 6 août 2013, 2013 tendant à modifier la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique en autorisant sous certaines conditions la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires (JO 7 août)

Références

 B. Mathieu, « Recherche sur l’embryon : une jurisprudence en demi-teinte », JCP 2013, p. 1560.

■ Code de la santé publique

Article L. 2151-5   (L. n° 2013-715 du 6 août 2013, art. unique)

« I. — Aucune recherche sur l'embryon humain ni sur les cellules souches embryonnaires ne peut être entreprise sans autorisation. Un protocole de recherche conduit sur un embryon humain ou sur des cellules souches embryonnaires issues d'un embryon humain ne peut être autorisé que si :

1° La pertinence scientifique de la recherche est établie ;

2° La recherche, fondamentale ou appliquée, s'inscrit dans une finalité médicale ;

3° En l'état des connaissances scientifiques, cette recherche ne peut être menée sans recourir à ces embryons ou ces cellules souches embryonnaires ;

4° Le projet et les conditions de mise en œuvre du protocole respectent les principes éthiques relatifs à la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires.

II. — Une recherche ne peut être menée qu'à partir d'embryons conçus in vitro dans le cadre d'une assistance médicale à la procréation et qui ne font plus l'objet d'un projet parental. La recherche ne peut être effectuée qu'avec le consentement écrit préalable du couple dont les embryons sont issus, ou du membre survivant de ce couple, par ailleurs dûment informés [informé] des possibilités d'accueil des embryons par un autre couple ou d'arrêt de leur conservation. A l'exception des situations mentionnées au dernier alinéa de l'article L. 2131-4 et au troisième alinéa de l'article L. 2141-3, le consentement doit être confirmé à l'issue d'un délai de réflexion de trois mois. Le consentement des deux membres du couple ou du membre survivant du couple est révocable sans motif tant que les recherches n'ont pas débuté.

III. — Les protocoles de recherche sont autorisés par l'Agence de la biomédecine après vérification que les conditions posées au I du présent article sont satisfaites. La décision de l'agence, assortie de l'avis du conseil d'orientation, est communiquée aux ministres chargés de la santé et de la recherche qui peuvent, dans un délai d'un mois et conjointement, demander un nouvel examen du dossier ayant servi de fondement à la décision :

1° En cas de doute sur le respect des principes éthiques ou sur la pertinence scientifique d'un protocole autorisé. L'agence procède à ce nouvel examen dans un délai de trente jours. En cas de confirmation de la décision, la validation du protocole est réputée acquise ;

2° Dans l'intérêt de la santé publique ou de la recherche scientifique, lorsque le protocole a été refusé. L'agence procède à ce nouvel examen dans un délai de trente jours. En cas de confirmation de la décision, le refus du protocole est réputé acquis.

En cas de violation des prescriptions législatives et réglementaires ou de celles fixées par l'autorisation, l'agence suspend l'autorisation de la recherche ou la retire. L'agence diligente des inspections comprenant un ou des experts n'ayant aucun lien avec l'équipe de recherche dans les conditions fixées à l'article L. 1418-2.

IV. — Les embryons sur lesquels une recherche a été conduite ne peuvent être transférés à des fins de gestation. »

Ancien article L. 152-7

« Un embryon humain ne peut être conçu ni utilisé à des fins commerciales ou industrielles. »

Ancien article L. 152-8

« La conception in vitro d’embryons humains à des fins d’étude, de recherche ou d’expérimentation est interdite. 

Toute expérimentation sur l’embryon est interdite.

A titre exceptionnel, l’homme et la femme formant le couple peuvent accepter que soient menées des études sur leurs embryons. 

Leur décision est exprimée par écrit. 

Ces études doivent avoir une finalité médicale et ne peuvent porter atteinte à l’embryon. 

Elles ne peuvent être entreprises qu’après avis conforme de la commission mentionnée à l’article L. 184-3 ci-dessous dans des conditions définies par décret en Conseil d’État. 

La commission rend publique chaque année la liste des établissements où s’effectuent ces études, ainsi que leur objet. »

Ancien article L. 2151-5 (version 2004)

« La recherche sur l’embryon humain est interdite. 

À titre exceptionnel, lorsque l’homme et la femme qui forment le couple y consentent, des études ne portant pas atteinte à l’embryon peuvent être autorisées sous réserve du respect des conditions posées aux quatrième, cinquième, sixième et septième alinéas. 

Par dérogation au premier alinéa, et pour une période limitée à cinq ans à compter de la publication du décret en Conseil d’État prévu à l’article L. 2151-8, les recherches peuvent être autorisées sur l’embryon et les cellules embryonnaires lorsqu’elles sont susceptibles de permettre des progrès thérapeutiques majeurs et à la condition de ne pouvoir être poursuivies par une méthode alternative d’efficacité comparable, en l’état des connaissances scientifiques. Les recherches dont les protocoles ont été autorisés dans ce délai de cinq ans et qui n’ont pu être menées à leur terme dans le cadre dudit protocole peuvent néanmoins être poursuivies dans le respect des conditions du présent article, notamment en ce qui concerne leur régime d’autorisation. 

 Une recherche ne peut être conduite que sur les embryons conçus in vitro dans le cadre d’une assistance médicale à la procréation qui ne font plus l’objet d’un projet parental. Elle ne peut être effectuée qu’avec le consentement écrit préalable du couple dont ils sont issus, ou du membre survivant de ce couple, par ailleurs dûment informés des possibilités d’accueil des embryons par un autre couple ou d’arrêt de leur conservation. À l’exception des situations mentionnées au dernier alinéa de l’article L. 2131-4 et au troisième alinéa de l’article L. 2141-3, le consentement doit être confirmé à l’issue d’un délai de réflexion de trois mois. Dans tous les cas, le consentement des deux membres du couple est révocable à tout moment et sans motif. 

 Une recherche ne peut être entreprise que si son protocole a fait l’objet d’une autorisation par l’Agence de la biomédecine. La décision d’autorisation est prise en fonction de la pertinence scientifique du projet de recherche, de ses conditions de mise en œuvre au regard des principes éthiques et de son intérêt pour la santé publique. La décision de l’agence, assortie de l’avis du conseil d’orientation, est communiquée aux ministres chargés de la santé et de la recherche qui peuvent, lorsque la décision autorise un protocole, interdire ou suspendre la réalisation de ce protocole lorsque sa pertinence scientifique n’est pas établie ou lorsque le respect des principes éthiques n’est pas assuré. 

 En cas de violation des prescriptions législatives et réglementaires ou de celles fixées par l’autorisation, l’agence suspend l’autorisation de la recherche ou la retire. Les ministres chargés de la santé et de la recherche peuvent, en cas de refus d’un protocole de recherche par l’agence, demander à celle-ci, dans l’intérêt de la santé publique ou de la recherche scientifique, de procéder dans un délai de trente jours à un nouvel examen du dossier ayant servi de fondement à la décision. 

Les embryons sur lesquels une recherche a été conduite ne peuvent être transférés à des fins de gestation. »

 

Auteur :C. G.

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