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Droit des obligations
Reconnaissance de dette : c’est au souscripteur de prouver l’absence de cause
Mots-clefs : Reconnaissance de dette, Présomption de cause, Charge de la preuve, Objet de la preuve
La reconnaissance de dette est valable quoique la cause n'en soit pas exprimée car celle-ci étant alors présumée, il incombe au souscripteur qui se prétend libéré d'apporter la preuve de son inexistence.
Par l’arrêt rapporté, la Cour de cassation rappelle qu’une reconnaissance de dette demeure valable, quoique sa cause ne soit pas exprimée. La cause étant dans ce cas présumée, il incombe alors au souscripteur qui se prétend libéré d’apporter la preuve de son inexistence.
En l’espèce, un homme oppose à son ancienne concubine une reconnaissance de dette que cette dernière aurait souscrite. Il produit l’acte de reconnaissance, dûment signé par son ancienne compagne, satisfaisant ainsi la charge de la preuve pesant sur lui puisque selon l’article 1315 alinéa 1er du Code civil, le prétendu créancier est tenu de prouver l’existence de l’obligation.
En revanche, le billet n’est pas causé. Cela ne remet toutefois pas en cause sa validité, l’article 1132 du même code prévoyant expressément que dans ce cas, l’acte « n’est pas moins valable, quoique la cause n’en soit pas exprimée ». Relevant en principe du seul droit commun des contrats, l’article 1132, qui fonde une présomption que la cause de l’obligation invoquée existe, est depuis longtemps étendu par la Haute cour à la reconnaissance de dette (Civ. 1re, 25 oct. 1967). En vertu de ce texte, la cause de l’acte, même non exprimée, est donc présumée et c’est alors au souscripteur qu’il appartient d’établir l’absence (ou l’illicéité) de la cause.
Sur ce point, la jurisprudence est constante. Ainsi la première chambre civile avait-elle déjà jugé qu’il appartient aux signataires d’une reconnaissance de dette qui prétendent, pour contester l’existence de la cause de celle-ci, que les sommes qu’elle mentionne ne leur ont pas été remises, d’apporter la preuve de leurs allégations (Civ. 1re, 14 janv. 2010 ; v. égal. Civ. 1re, 21 juin 2005).
Or dans cette affaire, la prétendue souscriptrice affirmait être libérée de la somme promise. L’existence de l’obligation ayant été valablement établie par son ancien concubin, elle devait alors, au titre d’une défense au fond, prouver le fait de sa libération (C. civ., art. 1315, al. 2). Autrement dit, pesait sur elle la charge de prouver l’absence de cause de la reconnaissance de dette. Ce à quoi elle parvint, démontrant avoir intégralement réglé, au moyen de fonds personnels et d'emprunts souscrits en son nom et remboursés par ses soins, les sommes qu'elle s'était engagée à rembourser au titre de l'achat d'un terrain et de travaux de construction. Pour les juges, la réalité de l'absence de remise des fonds prétendument prêtés était donc bien établie ; dès lors, la cause invoquée étant inexistante, la reconnaissance de dette devait être annulée en application de l'article 1131 du Code civil.
Ainsi la Cour confirme-t-elle la nature simple de la présomption d’existence de la cause. La présomption d’existence de la cause n’est donc qu’une « présomption simple, susceptible de preuve contraire par le débiteur », lequel « peut démontrer qu’en réalité, l’obligation indiquée est dépourvue de cause » (v. M. Fabre-Magnan). La difficulté apparaît d’emblée : la charge de prouver un fait négatif. Par conséquent, la Cour de cassation limite l’objet de la preuve à l’absence de remise des fonds (Civ. 1re, 7 avr. 1992). « Ce faisant, elle évite d’ériger la preuve de l’absence de cause en preuve impossible ».
Civ. 1re, 3 juill. 2013, n°12-16.853
Références
■ Code civil
« L'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet. »
« La convention n'est pas moins valable, quoique la cause n'en soit pas exprimée. »
« Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation. »
■ Civ. 1re, 25 oct. 1967, Bull. civ. I, n°312.
■ Civ. 1re, 14 janv. 2010, Bull. civ. I, n°7.
■ Civ. 1re, 21 juin 2005, n°04-10.673.
■ Civ. 1re, 7 avr. 1992, Bull. civ. I, n°114.
■ M. Fabre-Magnan, Les obligations, PUF, 2004, n°144, p. 373.
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