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Droit des obligations
Réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations : focus sur la promesse unilatérale
Mots-clefs : Promesse unilatérale, Révocation pendant délai d’option, Formation du contrat, Tiers, Nullité
L’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations introduit dans le Code civil une définition de la promesse unilatérale et en détermine le régime s’agissant de sa révocation pendant le délai d’option et du sort du contrat conclu avec un tiers qui connaissait l’existence de la promesse. Cette disposition relative à la promesse unilatérale entre en vigueur le 1er octobre 2016 ; les contrats conclus avant cette date demeurent soumis à la loi ancienne.
Le Code civil ne comporte actuellement aucune disposition générale relative à la promesse unilatérale de contrat. C’est la jurisprudence qui a déterminé le régime de ce contrat préparatoire très fréquent en pratique. L’article 1589-2 du Code civil ne concerne, en effet, que l’enregistrement de certaines promesses unilatérales de vente.
L’article 1124 alinéa 1er, issu de l’ordonnance du 10 février 2016, définit désormais la promesse unilatérale comme étant : « le contrat par lequel une partie, le promettant, accorde à l'autre, le bénéficiaire, le droit d'opter pour la conclusion d'un contrat dont les éléments essentiels sont déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire. ».
En précisant que pour la formation du contrat, seul manque le consentement du bénéficiaire, cette définition nouvelle suggère très fortement que le promettant a, dès la conclusion de la promesse de contrat, d’ores et déjà donné son consentement au contrat promis. Ce qui justifie donc que « La révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n'empêche pas la formation du contrat promis. » (art. 1124, al. 2). Cette disposition nouvelle anéantit la jurisprudence antérieure. En effet, depuis 1993 (Civ. 3e, 15 déc. 1993, n° 91-10.199), la Cour de cassation décidait que la révocation de son engagement par le promettant, avant la levée de son option par le bénéficiaire et pendant le délai qui avait contractuellement accordé à ce dernier pour opter, ne pouvait pas être sanctionné par la formation forcée de la vente promise, mais seulement par des dommages-intérêts. Ainsi, en 2011, elle retenait que : « la levée de l'option par le bénéficiaire de la promesse postérieurement à la rétractation du promettant excluant toute rencontre des volontés réciproques de vendre et d'acquérir, la réalisation forcée de la vente ne peut être ordonnée ». (Civ. 3e, 11 mai 2011, n° 10-12.875). La règle jurisprudentielle était fatale pour ce contrat préparatoire dont elle fragilisait sensiblement la force obligatoire et qu’elle privait de tout intérêt pratique, étant entendu que celui-ci procède du fait que la formation du contrat promis ne dépend plus que du consentement du bénéficiaire ; avec la jurisprudence, il fallait en outre que le promettant ne révoque pas son engagement. Toutefois, les parties à une promesse unilatérale de vente étaient libres de convenir que le défaut d'exécution par le promettant de son engagement de vendre peut se résoudre en nature par la constatation judiciaire de la vente (Civ. 3e, 27 mars 2008, n° 07-11.721).
La sanction de la révocation pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter, que retient le nouveau texte de l’Ordonnance, à savoir la formation forcée du contrat promis, renforce par conséquent l’efficacité de la promesse unilatérale de contrat et lui redonne un intérêt pratique dont la Cour de cassation l’avait privé.
Enfin, toujours dans ce même objectif, le contrat conclu en violation de la promesse unilatérale avec un tiers qui en connaissait l’existence est sanctionné par la nullité de ce contrat (art. 1124, al. 3 du Code civil, tel qu’issu de l’ordonnance). La jurisprudence retient en la matière que la responsabilité délictuelle du tiers peut dans de telles circonstances être engagée (Civ. 3e, 8 juill. 1975, n° 73-14.486).
Article 1124 du Code civil, tel qu’issu de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, entrant en vigueur le 1er octobre 2016.
Références
■ Code civil
Article 1124 du Code civil, tel qu’issu de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, entrant en vigueur le 1er octobre 2016.
« La promesse unilatérale est le contrat par lequel une partie, le promettant, accorde à l'autre, le bénéficiaire, le droit d'opter pour la conclusion d'un contrat dont les éléments essentiels sont déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire.
La révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n'empêche pas la formation du contrat promis.
Le contrat conclu en violation de la promesse unilatérale avec un tiers qui en connaissait l'existence est nul. »
■ Civ. 3e, 15 déc. 1993, n° 91-10.199, D. 1994. 507, note F. Bénac-Schmidt ; ibid. 230, obs. O. Tournafond ; ibid. 1995. 87, obs. L. Aynès ; AJDI 1994. 384 ; ibid. 351, étude M. Azencot ; ibid. 1996. 568, étude D. Stapylton-Smith ; RTD civ. 1994. 584, obs. J. Mestre.
■ Civ. 3e, 11 mai 2011, n° 10-12.875, D. 2011. 1457, note D. Mazeaud ; ibid. 1273, édito. F. Rome ; ibid. 1460, note D. Mainguy ; ibid. 2679, chron. A.-C. Monge et I. Goanvic ; ibid. 2012. 459, obs. S. Amrani Mekki et M. Mekki ; AJDI 2012. 55, obs. F. Cohet-Cordey ; RTD civ. 2011. 532, obs. B. Fages.
■ Civ. 3e, 27 mars 2008, n° 07-11.721, D. 2008. 2965, obs. S. Amrani Mekki et B. Fauvarque-Cosson ; RTD civ. 2008. 475, obs. B. Fages.
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